• * 18.- 26. Les ordres monastiques

    Travaux de la Commanderie de Saint-Léger

    La vie monastique

    Travaux initialement prévus pour le Chapitre du 20 mars 2020

    Nos Frères Chevaliers Axel et Jean-Paul vont à présent nous rappeler brièvement les origines du monachisme, ce que furent les Cisterciens (l’Ordre des Cisterciens), la vie des moines cisterciens au 12ème siècle et en quoi a consisté la réforme cistercienne. Ils tenteront aussi d’expliquer les raisons de cette réforme.

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    18. Les ordres monastiques

    18.1. Un ordre monastique

    Un ordre monastique est un ordre religieux dans lequel sont regroupées des personnes qui ont pour mode de vie le monachisme. Il en existe dans plusieurs religions, mais dans le christianisme, c'est un ordre régulier dont les clercs, retirés du siècle, ont prononcé des vœux religieux et respectent une règle monastique de vie commune.

    Un monastère est un ensemble de bâtiments où vit une communauté religieuse de moines ou de moniales. Il en existe dans la religion chrétienne et dans le bouddhisme.

    On parle également d' « abbaye » si ce monastère est dirigé par un abbé. On parle de « prieuré » s'il est de moindre importance. Souvent, le prieuré est dépendant d'une abbaye ou d'un monastère. Les monastères des ordres militaires du Moyen Âge étaient appelés « commanderies ». On parle aussi de « couvents » pour les résidences de Franciscains et de Dominicains par exemple, tandis que les Bénédictins ou Prémontrés habitent des abbayes ou prieurés.

     

    18. 2. Un ordre régulier

    Un ordre régulier est une agrégation de religieux qui prononcent des vœux religieux solennels, irrévocables, et qui suivent la même règle.

    Pour le christianisme, certains de ces ordres ont existé avant les schismes. Depuis, le catholicisme et l'anglicanisme sont à peu près les seules Églises chrétiennes ayant conservé cette organisation de la vie consacrée.

    Parmi les plus connus, je citerais :

    • L’Ordre de saint Augustin
    • L’Ordre bénédictin ou Ordre de Saint-Benoît
    • L’Ordre de Cluny ou Ordre des Clunisiens
    • L'Ordre cistercien
    • L’Ordre des Dominicains
    • L’Ordre des Prémontrés

     

    18. 3. L'Ordre cistercien

    L'Ordre cistercien est un ordre monastique de droit pontifical. C'est une branche réformée des Bénédictins dont l'origine remonte à la fondation de l'abbaye de Cîteaux par Robert de Molesme en 1098. L'Ordre cistercien joue un rôle de premier plan dans l'histoire religieuse du 12ème siècle.

    Par son organisation et par son autorité spirituelle, il s'impose dans tout l'Occident, jusque sur ses franges : la  tonsure est une pratique adoptée par certaines églises chrétiennes, consistant à raser une partie des cheveux d'un clerc. Signe de renonciation au monde, elle est aussi, avec la prise d'habit et le changement de nom, un élément d'un rituel de mort et de renaissance qui efface les pêchés antérieurs.

    Messire Axel VDH, Chancelier

    Sitographie :

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Ordre_cistercien  

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Tonsure

    19. Bref historique du monachisme

    19. 1. Apparition du monachisme

    Le monachisme chrétien a débuté en Égypte et en Terre Sainte et continua plus tard en Abyssinie (l’Éthiopie actuelle).

    Le monachisme semble être apparu très rapidement dans l’histoire du christianisme : des moines ont vécu au 3ème siècle dans les déserts égyptiens. Ce n'est pourtant pas un phénomène propre à la religion chrétienne. 

    Le désert égyptien s’est progressivement peuplé de monastères, surtout autour de Nitrie, qui était appelée la « cité sainte ». On estime qu'il y avait au moins 50 000 moines qui vivaient dans cette région à certaines époques.

    Dès le commencement, la vie monastique recommandait la lecture assidue de la Parole de Dieu.

    Déjà au début du 3ème siècle on a connaissance de moines vivant dans le désert égyptien. Ceci est attesté par des manuscrits retrouvés à Qumran et appelés « Manuscrits de la mer Morte ». Ils indiquent que cette recherche exigeante de spiritualité existait également dans la religion juive préchrétienne. 

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    Le principe, gouvernant cette attitude de repli sur soi, est l’idée qu’on ne peut rencontrer Dieu que loin des agitations du monde, et que cette relation doit-être personnelle, exclusive, intense à l’image des Apôtres du Christ. 

    À l'origine, tous les moines chrétiens étaient des ermites qui rencontraient rarement d'autres personnes. Mais à cause de l'extrême difficulté de la vie solitaire, beaucoup de moines ont échoué dans leur vocation, et soit retournèrent à leurs vies antérieures dans la cité, soient perdirent leurs illusions spirituelles.

    Une forme transitoire de monachisme a été créée plus tard : des moines « solitaires » vivaient assez proches les uns des autres pour s'offrir un soutien mutuel et pour se rassembler les dimanches pour des services religieux en commun.

    Les moines suscitent cependant un tel engouement populaire qu’il devient rapidement de plus en plus difficile de respecter l’engagement initial. C’est ainsi que se constitue la première communauté régie par des règles diverses mais toutes marquées par un principe fondamental que l’on retrouvera beaucoup plus tard dans le cénobitisme. Ce fut Pacôme le Grand qui préconisa que des moines vivent sous le même toit (C’est ce qu’on appelle le monachisme cénobitique) et participent ensemble au culte.

    Aux premiers temps du christianisme, le cénobitisme était une forme de vie monastique en communauté, propre aux cénobites, par opposition aux ermites et anachorètes qui vivaient seuls une vie consacrée à la prière et la contemplation. La vie communautaire occidentale présuppose l’obéissance à un supérieur hiérarchique.

    En Occident, les premiers monastères ont été fondés en Gaule à la fin du 4ème  siècle. Le monachisme s'est peu à peu imposé par le biais d'une large diffusion de récits qui seront recopiés dans les monastères jusqu'à la fin du Moyen Age. Les « Dialogues » du pape Grégoire Le Grand notamment, ont assuré la propagation du monachisme en Europe.

    Chaque monastère a développé son mode de vie et n’entretenait que très peu de relations avec les autres communautés.

    Le premier théoricien du monachisme en Occident fut l'abbé Jean Cassien de Marseille.

    Le besoin s’est rapidement imposé d'édicter un code de comportement afin de régir la vie en commun des moines, pour définir ce qui était communautaire et ce qui était personnel, la place à accorder au travail et celle à la prière, etc. Les règles monastiques ont proliféré, mais de ces règles multiples, une seule a triomphé : c’est celle de saint Benoît.

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    19. 2. Premier monastère bénédictin

    Au 6ème siècle, Benoît de Nurcie – qui deviendra saint Benoît – fonde, en 530, le monastère de Mont-Cassin, où il écrit une règle de vie monastique, modérée, peu exigeante, mais néanmoins réaliste et loin des outrances orientales. Selon les termes de saint Benoît, ce n’était qu’ « une petite règle pour les débutants étant conscient de la décadence de la vie monastique ». Il avait également conscience que l’anachorétisme ne convenait qu’à une élite. A côté de la relation de maître à disciple, il a introduit une relation horizontale fondée sur la charité entre frères.  Elle était adaptée aux faiblesses et aux capacités des hommes et ne prétendait pas faire des moines des êtres d’exceptions.

    Le texte était divisé en 73 chapitres. Les sujets abordés peuvent être regroupés en trois catégories distinctes :

    • les règles d'accession à la sainteté (par le silence, l'obéissance et l'humilité),
    • la vie quotidienne (le temps du moine se partage entre le travail manuel, la prière et la lectio divina, la lecture de la Bible et des textes sacrés)
    • et enfin la discipline communautaire (les pénitences à infliger, les interdictions et notamment celle de la propriété privée, la façon de diriger le monastère).

    19. 3. La Règle bénédictine

    Aux alentours de l’An Mil, l’expansion de la règle bénédictine est achevée : elle est appliquée dans quasiment tous les monastères d’Occident à l’exception de l’Espagne et des pays celtiques.

    En Occident on tend à se différencier des communautés orientales par son étroite dépendance à l’égard du pouvoir temporel. En Europe, la fondation d’un monastère découle d’une volonté politique affichée par un représentant du pouvoir laïque (un seigneur ou un roi), plus rarement par un évêque.

    Pour toutes ces raisons, les monastères dépendent étroitement des autorités laïques qui les fondent, contrôlent le respect de la règle, des préceptes essentiels que sont l’obéissance, la continence, l’humilité.

    Vu le caractère mesuré et équilibré de la règle de Saint Benoît la quasi-totalité des monastères d'Occident s’est ralliée à un texte écrit à l'origine pour trois monastères italiens de taille modeste.

    Le pape Grégoire le Grand a fait l'éloge de la règle et de son auteur.

    La règle a été révisée par Benoît d'Aniane : celui-ci a mis l'accent sur la nécessité de lutter contre les tendances de sécularisation des monastères, contraire à l'esprit initial du monachisme.

    19. 4. L'Ordre bénédictin

    L’ordre de Saint-Benoît est plus connu sous le nom d’Ordre des Bénédictins. C’est une fédération de monastères qui ont, au cours de leur histoire, adopté la règle de saint Benoît. Saint Benoît de Nursie en est considéré comme le fondateur en 529.

    Ce n'est pas le plus ancien Ordre de l'Occident chrétien puisque, auparavant, existaient déjà des monastères qui appliquaient la règle des moines de saint Augustin. Mais c'est celui qui a connu le plus large succès. Ses membres suivaient la règle de saint Benoît et appartenaient à la confédération bénédictine.

    L’ordre de Saint-Benoît avait pour objectif fondamental, et même unique de l'existence, la recherche de Dieu, universel et éternel. Cette quête impliquait l'ordre dans des tâches d’évangélisation et de défrichement de l'Europe.

    L'ordre bénédictin a atteint son apogée vers la fin du 12ème siècle. Il possédait alors en France environ 2 000 abbayes et 20 000 prieurés, et en Europe 100 000 monastères.

    En 2005, on dénombrait encore dans le monde environ 8 000 bénédictins répartis dans 435 monastères ou prieurés formant 21 congrégations.

    Frère J.-P. VS, Visiteur Prieural

    20. Le renouveau cistercien (11ème – 12ème siècles)

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    Avec Bernard de Clairvaux qui intervient de façon plus ou moins directe comme arbitre, guide spirituel dans les grandes questions du siècle, l'Ordre cistercien prend le rôle de gardien de la paix religieuse. Avec le soutien de la papauté, des rois et des évêques, l'Ordre prospère et grandit. Les autorités laïques et ecclésiastiques souhaitent qu'il insuffle son esprit dans l'Église régulière et séculière. Le succès de Cîteaux traduit l'écho de la pensée de saint Bernard au 12ème siècle et le profond bouleversement de la société qu'elle engendra.

    Au 12ème siècle, l'Ordre cistercien exerce une grande influence politique. Cette expansion assure aux Cisterciens une place prépondérante non seulement au sein du monachisme européen, mais aussi dans la vie culturelle, politique et économique.  Le début du 12ème siècle voit le retour de la prépondérance du pouvoir épiscopal et du pouvoir seigneurial sur les congrégations monastiques. Cette théorie instaure le modèle d'une société cloisonnée dans laquelle chaque groupe assume une fonction définie. Nous vivons d’importants points forts :

    1. L’essor économique et politique de l'Occident
    2. La croissance démographique
    3. La croissance agricole et essor des campagnes
    4. La Croissance de la société urbaine
    5. La reprise des échanges et de l’extension territoriale
    6. La renaissance politique
    7. La réforme religieuse
    8. L’Emancipation pontificale

    Référence : https://fr.wikipedia.org/wiki/Ordre_cistercien

    21. L’Ordre cistercien rencontre la réussite économique

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    21.1. Cîteaux suscite, au début du 12ème siècle, une vague de conversions dans la société chevaleresque. De par le retour à la Règle préconisé par saint Bernard, l'Ordre se coupe des sources traditionnelles de revenus monastiques. Les monastères disposent d'une main d'œuvre gratuite, recourent aux techniques modernes qui assurent un rendement bien supérieur aux autres exploitations de l'époque, répondent aux besoins des villes avides de denrées variées, de vêtements moins rustiques, de matériaux en toujours plus grande quantité. Les moines fréquentent les marchés où ils vendent les surplus de l'exploitation et dépensent peu, produisant tout ce dont ils ont besoin. L'argent s'accumule d'autant plus que le monastère cistercien, à l'écart du monde, donne peu. Si Cîteaux participe à l'élan de générosité du 12ème siècle qui conduit à prendre soin des indigents, c'est par le conseil voire le chantage. Résolument hors du monde, il incite ceux qui y vivent, les clercs et les princes, à réduire les dépenses superflues et à se consacrer à l'aumône.

    L'Ordre fascine les esprits, érige un modèle de piété chrétienne et fait émerger les nouveaux modes de pensée, la pensée cistercienne rencontre un écho important, ce dont témoigne l'omniprésence, au 12ème siècle, de religieux formés dans les abbayes de l'Ordre aux plus hautes charges ecclésiastiques.

    Cîteaux enracine l'idée selon laquelle tout salut est impossible dans le monde, seul le monachisme, forme de vie la plus parfaite, pouvant assurer le repos de l'âme détachée de l'enveloppe corporelle.

    La vie chrétienne devient la source d'une lutte perpétuelle contre les tentations chez le simple croyant qui s'interroge sur la qualité de sa quête spirituelle. Les Cisterciens, à la suite des écoles cathédrales et notamment de leur plus célèbre représentant, Abélard (né en 1079 près de Nantes - mort le 21 avril 1142, est un philosophe, dialecticien et théologien chrétien, père de la scolastique et inventeur du conceptualisme).

    Référence : http://histgeo.free.fr/curieux/fichier2.html

    21. 2. Tout au long du 12ème siècle, d’un bout à l’autre de l’Europe, de nouvelles abbayes cisterciennes voient le jour. Et les dons, de toute nature, partout, affluent. Grâce à une bonne gestion, le monde cistercien est florissant. Certaines abbayes, à l’instar des banques, deviennent même les créancières de la société aristocratique.

    Il faut dire que l’ensemble du système est basé sur une production très développée, qui démarre environ quarante ans après l’arrivée de Bernard-de-Fontaine à Cîteaux.

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    Autrefois, les moines priaient, les paysans cultivaient, les seigneurs se battaient. Désormais, avec l’aide des convers, les moines produisent. Ils se rendent même sur les marchés pour vendre le produit de leur labeur. Les Cisterciens s’orientent vers des activités économiques très spécialisées. Les Anglais produisent de la laine, ceux de Franche-Comté produisent du sel…

    La surproduction rurale permet aux villes de se développer. « Si le 13ème siècle a été le siècle des villes, c’est parce que le 12ème a été celui des monastères », assure Jean-François Leroux, l’historien de Clairvaux.

    Clairvaux possède en outre une quantité importante de maisons dans les villes de foires : Troyes, Bar et Provins. « Ce patrimoine immobilier a assuré, dans les temps troublés, des revenus que les campagnes ravagées du début du 15ème siècle ne procuraient plus », écrit Sylvette Guilbert, historienne.

    Dans le même temps, on passe maître de la communication « politique » : le comte de Champagne, à l’époque, est aussi vassal du duc de Bourgogne.

    22. Les Cisterciens sont des agriculteurs

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    La production est d’abord agricole dans les abbayes cisterciennes, comme à Clairvaux. Le site possède au Moyen Âge 3000 ha de terres labourables, 500 ha de prés, 250 ha de vignes, 15000 ha de bois, et de 3 à 4000 moutons.

    Clairvaux dispose aussi de seize granges et une vingtaine de centres annexes dont quatre celliers. Le principe de la champagnisation des vins blancs de la Champagne méridionale, qui est datée du 18ème siècle avec le Dom Pérignon, pourrait avoir été testé d’abord à Clairvaux, selon certains historiens.

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    Tout ce patrimoine est moins important que celui des abbayes bénédictines, mais ça reste considérable. Et cela signe la fin de la pureté évangélique, sur laquelle l’Ordre repose via l’ascèse et la pauvreté, et l’avènement d’une richesse très importante, dont toute l’Europe tire profit, grâce aux 700 abbayes d’hommes et aux 1000 abbayes de femmes qui existent alors.

    23. Les Cisterciens ont compris l’importance de l’eau

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    « Toutes les abbayes cisterciennes ont dans leur nom une référence à l’eau », explique Jean-François Leroux. Presque toujours érigées dans le fond d’un vallon, ces abbayes donnaient en effet une importance fondamentale à l’eau : elle était nécessaire à l’hygiène, très importante chez les Cisterciens, permettait de créer étangs à partir de barrages pour élever carpes et brochets (Ils étaient végétariens), et faisait tourner les moulins pour la production et le travail.

    24. Les Cisterciens utilisaient la métallurgie

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    Les Cisterciens maîtrisaient aussi les techniques de la métallurgie. Ils extrayaient et travaillaient le métal, particulièrement dans certaines régions, comme la Champagne et la Bourgogne, là où l’Ordre est né. Et les sols s’y prêtaient. Ils offraient des gisements superficiels, faciles d’accès, apprend-on grâce à une enquête de Bertrand Gille, poursuivie par d’autres chercheurs après lui.

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    La première forge date de 1157 et la métallurgie se développe jusqu’au début du 14ème siècle et une des premières mutations importantes dans la sidérurgie est lancée par les Cisterciens, qui utilisent la force de l’eau pour remplacer la force humaine, en mettant en place un martelage mécanique, hydraulique, de la forge. L’activité disparaîtra au terme d’une crise économique grave au 14ème siècle.

     * 18.- 26. L'Ordre cistercien  * 18.- 26. L'Ordre cistercien  * 18.- 26. L'Ordre cistercien

    En résumé : Quand nous disons : « Cîteaux », nous viennent immédiatement à l'esprit les monastères à l'architecture austère, disséminées dans des vallées encaissées. Austère, dépouillée, simplifiée, l'architecture l'est par réaction. Car le bâtiment cistercien est indissociable de l'exigence morale prônée par saint Bernard à l'orée du 12ème siècle. Ce qu'il pourfend, ce sont l'opulence et le faste de Cluny qui détournent les moines de leur fonction et incitent à la divagation de l'esprit quand tout devrait contribuer à les faire communier vers un seul but, la prière et la soumission au Divin. Toute une vie d'agressions, de dénonciations qui le mèneront au conflit avec les Clunisiens mais aussi avec les écoles cathédrales et Abélard, avec les hérétiques, avec les chevaliers peu soucieux des devoirs chrétiens. Bernard lutte sans relâche, prêchant l'abandon des vices que sont l'orgueil et le plaisir des richesses, des vices qui empêchent le progrès dans le Christ et retiennent le fidèle sur le chemin de l'élévation personnelle. Le succès de Cîteaux traduit l'écho de la pensée de saint Bernard au 12ème siècle et le profond bouleversement de la société qu'elle engendra.

    Synthèse de recherches effectuées par Messire Axel VDH, Chancelier de Commanderie

    Référence : http://histgeo.free.fr/curieux/fichier2.html

     

    Je vais à présent tenter d’expliquer les raisons de la réforme cistercienne.

    25. Pourquoi une réforme ?

    A la fin du 11ème siècle, le monachisme bénédictin tend à se confondre avec le monachisme clusien. C’est que, depuis sa fondation en 909, Cluny a acquis un prestige considérable : l’Ordre est implanté partout en Occident et même jusqu’en Palestine à la faveur de la Première Croisade.

    Cluny doit son succès à son fondateur, le Duc d’Aquitaine, Guillaume III. Celui-ci renonce à ses droits sur le monastère et le place directement sous la protection de Rome. La communauté se fait le fer de lance de la règle bénédictine. En 931, le pape Jean XI l’autorise à prendre la direction de tout monastère soucieux de se conformer à la Règle de saint Benoît. Grâce aux reliques des apôtres Pierre et Paul apportées de Rome, le monastère devient un lieu de pélerinage incontournable et, grâce aux donations destinées à assurer les prières des moines après la mort du donateur, généralement un propriétaire foncier très important, tout monastère exerce un véritable pouvoir seigneurial.

    A la fin du 11ème siècle, des voix se sont élevées à la fois à l’intérieur et à l’extérieur de l’ordre pour dénoncer ce qui semblait être un détournement voire une perversion de l’idéal monastique. La charité fut également mise à mal à Cluny. Ces critiques envers Cluny, les Cisterciens les ont reprises à leur compte. Mais cette fois, sous l’égide de saint Bernard, la dénonciation a pris une ampleur inconnue, l’agression fut violente, incessante, d’autant plus déstabilisante qu’elle s’inscrivait au moment où tous, et en particulier le Pape, cherchaient à rabaisser la congrégation devenue trop puissante et trop orgueilleuse.

    Je traiterai, pour terminer, de la réforme cistercienne.

    26. La réforme cistercienne

    Lorsque Bernard de Fontaine (devenu saint Bernard de Clairvaux) entra à Cîteaux en 1112, le monastère fondé quatorze ans plutôt était dans une situation difficile, pris entre deux conceptions, deux courants de pensée. D’un côté, l’ordre clunisien, dont j’ai déjà évoqué la situation. De l’autre, les sectes hérétiques qui dénonçaient le manquement à la parole évangélique, c’est-à-dire au vœu de pauvreté et qui prêchaient le renoncement à tout. Je citerai pour exemple les sectes de Cologne qui étaient des sectes hérétiques de type cathare.

    Bernard prôna la mesure qui seule permettait l’élévation de l’esprit. Il rejeta Cluny dont le faste était une insulte aux pauvres : l’église resplendissait sur ses murailles, et elle manquait de tout pour ses pauvres ; elle enduisait d’or ses pierres et elle laissait ses enfants nus ; on prenait aux indigents de quoi flatter les yeux des riches. Bernard dénonça également les hérétiques, coupables de remettre en cause la société d’ordre.

    Bernard, abbé de Clairvaux, qu’il avait fondé en 1115, est le symbole du monachisme cistercien parce qu’il a lutté sans relâche toute sa vie pour imposer ses vues, contre Cluny et contre les hérétiques.

    Bernard a insisté sur la nécessité d’obtenir soi-même son salut car la vraie religion est intérieure. Mais le combat ne devait pas s’arrêter là : le travail du moine devait consister à réduire sans cesse l’écart entre le spirituel et le temporel et pour cela, à revenir à un passé idéalisé où le gouffre n’aurait été qu’une fissure. De là est issu ce désir de réforme purificatrice des Cisterciens, de retour au temps des premières communautés et leur méfiance à l’égard de tout ce qui est nouveau.

    Mais les Cisterciens ne se voulaient pas en dehors de la société. Cîteaux œuvra donc pour une réforme du monachisme ! Bernard ne proposa pas pour autant de remettre en cause les fondements de l’institution. L’ascétisme resta la forme la plus parfaite de l’existence spirituelle mais il convenait d’y accéder par paliers et en communauté comme l’avait préconisé saint Benoît.

    Les Cisterciens voulaient se garder du caractère présomptueux de ces excès. Pour cela, ils entendaient se conformer à ce qui a fait ses preuves et premier lieu : la règle bénédictine. En quoi consiste le fondement du renouveau cistercien ? Il ne s’agit pas d’inventer mais de revenir à la pureté originelle et pour cela, de dénoncer les habitudes et les conceptions absentes de la règle et forgées au cours des siècles.

    La réforme, construite en opposition aux dérives clunisiennes, est toutefois une interprétation, une adaptation, une relecture du texte bénédictin écrit cinq siècles et demi plus tôt.

    L'ambition de saint Bernard est de rétablir le moine à sa juste place dans la société : refus du monde, refus du confort, refus de la seigneurie, refus de tout ce qui éloigne le moine de sa mission, le combat dans le Christ, et par conséquent, des devoirs traditionnels du monachisme d'alors et, en premier lieu, l'éducation du peuple. Le monachisme cistercien prône à la fois le retrait du monde et la vie en communauté.

    Ce que saint Bernard redoutait plus que tout, c’était le péché d’orgueil, l’entorse faite au vœu d’humilité qui éloignait le moine du chemin de la sagesse et de l’élévation personnelle. « Elevez-vous par l’humilité. Telle est la voie ; il n’y en a pas d’autre », disait-il !

    Sa règle préconisait une communauté vivant en autarcie et capable de subvenir à ses besoins, en un mot : l’autosuffisance.

    Le respect de la règle a eu pour effet de fonder une nouvelle société à l’écart de la société séculière, un lieu de combat et de pénitence, un lieu où la communauté, solidaire et retranchée, n’avait pour seule vocation que l’élévation personnelle de chacun. Le monastère était avant tout une collection de personnes, chacune engagée sur le chemin de la perfection.

    Frère J.P. VS, Visiteur Prieural

    Sitographie :

    http://histogeo.free.fr/curieux/cisterciens.html

    htpp://lartesmets.e-monsite.com/page/religions-au-moyen-age/le-renouveau-cistercien/la-reforme-cistercienne.html

    Suggestions de prolongements :

    Georges Duby, Saint Bernard, L'art cistercien, Champs Flammarion, Paris, 1979.

    Marcel Pacaut, Les moines blancs, Fayard, Paris, 1992.

    Léon Pressouyre, Le rêve cistercien, Découvertes Gallimard, Paris, 1990.

    L'âge d'or des grandes abbayes, L'histoire n° 217, janvier 1998.

    Lien avec la synthèse et les conclusions


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