• * Approche de l'histoire de l'Ordre

    Approche synthétique de l'histoire de l'Ordre

    Un peu d’histoire pour comprendre ce qu’est l’Ordre aujourd’hui !

    Les croisades

    Au Moyen Age sont apparus plusieurs institutions de moines soldats et, parmi elles, les « Chevaliers du Temple », qui n’étaient pas tous français, comme on a encore tendance à le croire de nos jours. Tout en relevant de l’Empire et d’une armée du nord et de l’est, ils étaient de diverses provenances. Certains étaient issus des Flandres, amis du comte de Boulogne, d’autres venaient de l’entourage du Sire de Champagne, d’autres du Languedoc, de Provence et du Roussillon.

    A l’issue du Concile de Clermont d’Auvergne, le 27 novembre 1095, le pape Urbain II avait lancé un appel angoissé pour apporter de l’aide aux chrétiens d’orient, menacés par les musulmans. Cette exhortation lança la première croisade qui se divisera en deux mouvements, respectivement la croisade populaire et la croisade des barons.

    La croisade populaire prêchée par Pierre l’Ermite, formée des membres du petit peuple, ne possédant aucune expérience des armes, s’ébranla dès avril 1096. Dirigée par Pierre l’Ermite et de petits seigneurs tels Gautier Sans Avoir. Leur ignorance dans le domaine militaire aboutit à un véritable massacre.

    La croisade des barons était formée de quatre groupes :

    • le premier, composé de Croisés du Nord, était dirigé par Godefroid de Bouillon, duc de Basse-Lotharingie, et son frère Baudouin de Boulogne ; traversant la Hongrie et la Bulgarie, il arriva à Constantinople vers la Noël de 1096 ;
    • le deuxième, formé de Siciliens-Normands, était commandé par Bohémond de Tarente et par son neveu Tancrède ; voyageant par la mer, il débarqua à Constantinople le 16 avril 1097 ;
    • le troisième, qui regroupait les Croisés méridionaux sous l’étendard de Raymond de Saint-Gilles, comte de Toulouse, traversa l’Italie, la Dalmatie, l’Albanie et Salonique pour atteindre Constantinople le 17 avril 1097 ;
    • le quatrième, qui rassemblait les Croisés du Nord et du centre de la France, était mené par Robert de Flandre, Etienne de Blois, Hugues de Vermandois, frère du roi et traversa les Alpes et l’Italie.

    Toutes forces réunies, les Croisés traversèrent l’Asie mineure. Le premier juillet 1097, ils bousculèrent les forces de Kilidj Arslan, stupéfiant ainsi tout l’Orient. Le 3 juin 1098, ils s’emparèrent d’Antioche et au mois de juin 1099, ils atteignirent Jérusalem.

    Après de furieux combats, ils conquirent cette cité le 15 juillet 1099. Selon Guillaume de Tyr, le Conseil de la Croisade voulut stabiliser les conquêtes en les transformant en un royaume franc ayant pour capitale Jérusalem.

    Le 22 juillet 1099, il procéda à l’élection d’un roi. Godefroid de Bouillon fut préféré au comte de Toulouse. Ce premier prit le simple nom d’Avoué du Saint-Sépulcre car, par humilité, il ne voulut pas porter une couronne d’or là où le Christ avait porté une couronne d’épines. A sa mort, en 1100, lui succédèrent successivement Baudouin I et Baudouin II.

    Dans ce nouveau royaume, aucun des Grands ne pensait à protéger les pèlerins. C’est pourquoi, Hugues de Payens et Geoffroy de Saint-Omer et quelques compagnons prirent en charge cette mission, sous le nom de « Pauvres Chevaliers du Christ ».

    D’Hugues de Payens on ne sait presque rien, si ce n’est qu’il est apparenté au comte Hugues de Champagne. Sans l’aide de ce dernier, lui-même ami de Saint Bernard de Clairvaux, les Templiers seraient restés dans l’ombre. Il est à remarquer que ces trois hommes sont très liés et vivent dans la même région.

    On admet qu’il participe à la première croisade dans l’ost (Synonyme d’armée, à l’époque féodale, mais aussi service militaire que les vassaux devaient à leur suzerain au Moyen Age.) du comte de Blois et de Champagne. Il a dû ainsi connaître personnellement Godefroid de Bouillon, ses deux frères Baudouin et Eustache de Boulogne et leur cousin Baudouin du Bourg, futur Baudouin II, roi de Jérusalem, ce qui explique l’importance de sa bienveillance future à l’égard de l’Ordre. Hugues de Payens semble être retourné en Orient, en 1104 ou 1105, en compagnie d’Hugues de Champagne.

    Mais qui était ce comte Hugues de Champagne, né en 1067 ?

    Fils de Thibaut III de Blois et de Champagne, il reçut en fief la Champagne en 1093. Il était donc le suzerain d’Hugues de Payens. Il ne participa pas à la première croisade mais se rendit en Orient en 1104 ou 1105. De retour en 1108, il prit contact avec Etienne Harding, abbé de Cîteaux. Dès lors, ce dernier mit tout son monastère à l’étude minutieuse des textes hébraïques, se faisant même aider par les savants rabbins de Haute-Bourgogne.

    Le comte de Champagne repartit en 1114 vers la Terre Sainte pour un court séjour. A son retour, il recontacta l’abbé de Cîteaux et offrit à cet Ordre un territoire situé dans la forêt de Bar-sur-Aube, afin d’y créer une abbaye qui portera le nom de « Abbaye de Clairvaux ».

    Celle-ci fut confiée à Bernard de Fontaine, appelé plus tard Bernard de Clairvaux. Ne pourrait-on pas penser que le comte de Champagne se trouvait porteur d’une révélation qu’il confia à l’abbé de Cîteaux et qui poussa ce dernier à préparer son monastère à la lecture d’un document hébraïque qui devait venir. Ce document nécessitait très probablement que l’on fît appel à tous ceux qui pouvaient apporter leur aide.

    Le deuxième voyage n’était-il pas un voyage de vérification dont le résultat nécessitait qu’il soit confié à une personne aussi marquante que Bernard de Clairvaux, et cela sur les terres de Champagne, donc sous la protection du comte ?

    Dès lors le comportement du comte de Champagne devint de plus en plus étrange. Il voulut retourner en terre Sainte, non comme combattant ou comme pèlerin, mais pour entrer chez les Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem qui protégeaient, aidaient, soignaient les pèlerins.

    Il semble peu probable que Hugues de Champagne, grand suzerain au domaine plus étendu que ceux du roi de France, se soit senti une envie irrésistible de soigner les pèlerins. Et ce, même pour le salut de son âme, pour lequel Clairvaux aurait suffi !

    Etant marié, sa demande fut refusée, sa femme refusant d’entrer au couvent, comme le voulait la coutume. Dès lors, c’est Hugues de Payens qui partit ! Mais, n’y tenant plus, Hugues de Champagne répudia sa femme, renia son enfant, renonça à son comté et, en 1125, rejoignit les Chevaliers du Temple. Etait-ce pour garder les routes de Palestine ? Cela semble peu probable. Mais ce départ ne concernait-il pas plutôt le travail réel, effectué par les Templiers en Palestine ?

    Quant à Bernard de Clairvaux, né en 1090 près de Dijon, fils d’Escalin et d’Alet de Montbard, il entra à Cîteaux sous l’abbatiat d’Etienne Harding et fonda l’abbaye de Clairvaux en 1115. Immédiatement, il prit la direction de l’Occident.

    Ce n’est pas une vue de l’esprit car il tança vertement rois, papes, évêques, grands vassaux et tous obéirent à ce moine. Zélateur du culte marial, c’est lui qui créa le terme « Notre Dame ». Tel est l’homme qui allait faire le Temple et lui confier sa mission.

    Quelle était donc cette mission confiée par Bernard de Clairvaux à l’Ordre du Temple ?

    Il paraît évident qu’Hugues de Payens et son oncle, André de Montbard, n’étaient pas envoyés par Bernard de Clairvaux uniquement pour garder les routes et que ce n’est pas la raison du comportement d’Hugues de Champagne. Cela ils auraient pu le faire en aidant les Hospitaliers de Saint-Jean.

    Pourtant, cette protection, l’Ordre l’a toujours assurée, même aux moments où il est extrêmement puissant. Plus tard, lorsque l’Ordre sera constitué et qu’il possèdera une armée en Palestine, elle aura pour rôle la défense des Lieux saints.

    La création de l’O.S.M.T.J.

    Selon le chroniqueur Jacques de Vitry, l’Ordre Souverain et Militaire du Temple de Jérusalem fut fondé en Palestine, en 1118. C’est cette année qui a été retenue pour fixer l’ère de l’Ordre.

    Il fut institué comme corps d’élite permanent et mobile, par opposition à l’armée féodale, avec, en plus, un caractère monacal. Cette création militaire et spirituelle était une innovation originale dans le monde latin. L’Ordre du Temple était donc une nouvelle chevalerie, formée de chevaliers moines.

    L’O.S.M.T.J. est né par la seule bonne volonté de neuf chevaliers qui s’étaient unis avec pour objectifs principaux :

    • de protéger les pèlerins en route vers Jérusalem,
    • d’assurer la sécurité des chemins

    et

    • défendre les lieux saints dans la cité.

    Ces neuf chevaliers généralement cités dans la littérature sont :

    • Hugues de Payns, un vassal d’Hugues 1er de Champagne et un parent par alliance des Saint Clair de Roslin,
    • André de Montbard, l'oncle de Bernard de Clairvaux et autre vassal d’Hugues de Champagne,
    • Geoffroi de Saint Omer, un fils d’Hugues de Saint-Omer,
    • Payen de Montdidier, un parent de la famille régnante de Flandres,
    • Archambaud de Saint Amand, autre parent de la maison régnante de Flandre,
    • Geoffroy Bisol,
    • Gondemare ou Gondernar,
    • Rossal,
    • Godefroy.

    Ces neuf chevaliers avaient décidé de s'unir pour défendre les pèlerins et assurer la protection des routes. Ils formèrent l'ordre des « Pauvres Chevaliers du Christ ». A leur tête, les deux premiers chevaliers habituellement cités dans la liste des neuf : Hugues de Payens et Geoffroy de Saint-Omer.

    Remarquons que parmi les neuf chevaliers qui se présentèrent devant Baudouin II, roi de Jérusalem, deux au moins étaient proches de Bernard de Clairvaux : Hugues de Payens, chef de mission, et le frère de la mère de Bernard de Clairvaux, André de Montbard.

    Ces neuf chevaliers avaient donc décidé de se mettre au service de Dieu et du Roi de Jérusalem. Ils ne se placèrent pas sous l’autorité de ce dernier, mais reçurent néanmoins de Baudouin II le droit d’occuper un terrain et une partie de son palais situé à proximité des ruines du temple de Salomon. D’où leur nom de « Chevaliers du Temple », transformé par l’usage populaire en « Templiers ». 

    L'ordre des « Pauvres Chevaliers du Christ » devint alors « l'Ordre du Temple ». Le nom de « Templiers » n'apparaîtra que plus tard. Jusqu'en 1127, les chevaliers se cantonneront à leur mission première. Il existe hélas peu de traces à propos des « Templiers » durant cette période.

    Ils s’imposèrent de suivre une règle monastique très stricte, celle de Saint-Augustin, et donc de faire vœu de pauvreté, de chasteté et d’obéissance tout comme les chanoines réguliers. Il s'agit donc initialement d'un ordre de moines – chevaliers. Ils s’étaient fixé pour objectif d'assurer le service et la protection des pèlerins essentiellement entre Jaffa, le lieu de débarquement, et la cité sainte, Jérusalem. L’ordre des « Pauvres Chevaliers du Christ » a été créé afin d’assurer notamment la garde du défilé d'Athlit, le chemin d’accès le plus dangereux pour les pèlerins.

    Dans la majorité des sources bibliographiques relatives à la fondation de l’ordre, les noms de ces neuf chevaliers reviennent régulièrement, parfois avec de petites variantes orthographiques. Si l’on est quasi certain que ces neuf chevaliers ont participé à la fondation de l'ordre, selon certaines sources difficiles à vérifier, ils auraient pu être une trentaine. A l’heure actuelle, il ne semble possible d’apporter quelques précisions que pour la vie des quatre premiers généralement cités :

    • Hugues de Payens, originaire de Payns en Champagne

    Hugues de Payens ou de Pains ou de Payns (de Paganis), ainsi nommé de la terre de Pains en Champagne, située entre Méry-sur-Seine et Troyes, était issu de la maison des comtes de Champagne. Comme tous ses compagnons, il appartenait à la plus haute noblesse. Il était Sire de Montigny. Il mourut en 1136, emportant les regrets de tout ce qu'il y avait de chrétiens zélés en Palestine.

    Hugues de Payens vécut en Champagne après 1070. C'est en l'année 1110, et en qualité de témoin, qu'il appose sa signature sur deux chartes d’Hugues de Troyes, comte de Champagne. Il est probable qu’Hugues de Payns, vassal d'Hugues de Troyes, était un seigneur de renom, proche de la famille comtale.

    En 1095, le pape Urbain II déclencha la guerre sainte contre l'Islam au Proche Orient. Le départ massif de la première croisade s'acheva en 1099 par la prise de Jérusalem par les croisés. Hugues de Payens n'y a pas participé.

    Ce n'est que plus tard, en 1104, qu'il accompagne son suzerain Hugues de Champagne en Terre Sainte où il demeura pendant trois ans. De retour chez lui, Hugues de Payens épouse une jeune fille noble du sud de la Champagne, Elisabeth de Chappes. Ils auront trois enfants nés entre 1108 et 1114, prénommés Gibin, Isabelle et Thibaud. En 1113, Hugues de Payens signe une charte de donation du comte de Champagne.

    Le document porte l'inscription suivante : « Hugo, dominus (seigneur) de Peanz ». Un an plus tard, il repart en Terre Sainte, mais cette fois-ci s'y installe définitivement. Il doit alors se séparer de sa femme qui entre au couvent et y restera jusqu'à la mort de son mari. Hugues de Payens rejoint les chevaliers qui œuvraient à la protection du tombeau du Christ, haut lieu de pèlerinage, à Jérusalem. Ce groupe de nobles vivait alors sous la protection et l'autorité des chanoines du Saint-Sépulcre. [Il était vraisemblablement hébergé à l'hôpital Saint-Jean de Jérusalem.

    C'est en 1099 que naît l'idée de créer une milice indépendante appelée « militia Christi » à l'origine de l'ordre du Temple fondé en 1118 en la cathédrale de Troyes. Hugues de Payens dirigea l'ordre du Temple pendant près de vingt ans, jusqu'à sa mort en Palestine en 1136. Il était âgé de 66 ans. Il n'existe apparemment aucun portrait de lui.

    • Geoffroy de St-Omer, originaire de Saint-Omer dans le comté de Flandre

    Geoffroi de Saint-Omer (aussi connu sous le nom de Godefroy de Saint-Omer) était un chevalier flamand et l'un des membres fondateurs de l'Ordre du Temple en 1118. Il est présenté aussi comme issu de la famille des châtelains de Saint-Omer : Guillaume 1er, seigneur de Saint-Omer, et son fils Hugues, participèrent à la première croisade en tant que vassaux de Robert II de Flandre. Hugues de Saint-Omer y aurait été alors remarqué comme étant un des meilleurs chevaliers du royaume de Jérusalem. Chronologiquement, Godefroy a été présenté comme le frère d’Hugues, mais il a été cité également comme étant son fils. Sur la liste des croisés un Gauthier de Saint-Omer est cité, ce qui pourrait être une erreur concernant Godefroy (car Gauthier de Saint-Omer n'était pas encore né).

    Cela voudrait donc dire que Godefroy vint probablement à Jérusalem en 1099 avec Guillaume I et Hugues. Il a été dit qu’Hugues de Payens – le premier maître de l'Ordre du Temple – et Godefroy de Saint-Omer étaient si pauvres qu'ils n'avaient qu'une seule monture pour deux. De là viendrait le symbole des templiers[1] que l'on peut apercevoir sur nombre de leurs sceaux.

    • André de Montbard, originaire de la Bourgogne

    André de Montbard (1103 - 1156) issu de la famille des comtes de Montbard, bourguignon, fut le cinquième Maître de l'ordre du Temple, fonction qu'il exerça de 1153 au 17 janvier 1156. Quand il fut élu, il était l’un des plus vieux membres de l'ordre puisqu'il faisait partie des neufs fondateurs.

    Sénéchal de l'Ordre de 1148 à 1151, il fut sans doute élu en opposition à un autre candidat soutenu par le roi de France Louis VII. La date de son élection est incertaine mais intervient sans doute à la fin de 1154, bien que la première mention de sa nouvelle fonction soit datée du 27 mai 1155 dans un acte du roi de Jérusalem Baudouin III. Bertrand de Blanquefort lui succéda la même année.

    André de Montbard était l'oncle de Bernard de Clairvaux – qui deviendra Saint-Bernard – et qui régnera sur la pensée chrétienne durant tout le 12ème siècle, et un autre vassal Hugues de Champagne.

    • Payen de Montdidier, originaire de la Somme en Picardie

    Payen de Montdidier est aussi connu dans certains actes sous le nom de Nivard. Homme d'action de l'Ordre naissant, il exerça dans sa propre province une influence importante. II en fit une terre privilégiée de recrutement. Payen, que quelques biographes prétendent originaire de la Champagne, et d'autres d'Italie, aurait vu le jour à Montdidier. Par un rapprochement singulier, le prédicateur des croisades, Pierre l'Ermite, et Payen, un des neuf fondateurs de l'institution appelée à défendre les conquêtes qui en furent le résultat, seraient nés l'un et l'autre en Picardie.

    Geoffroy (ou Godefroy) de Saint-Omer, Archambaud de Saint-Amand et Payen de Montdidier relèvent de la mouvance des Princes de Flandres, héros de la première Croisade et premiers rois du Royaume de Jérusalem.

    Les autres fondateurs, pour la plupart connus uniquement par leur prénom, sont difficiles à situer. Ils sont le plus souvent considérés comme les écuyers des précédents. Des thèses intéressantes les présentent soit comme des moines, soit comme des compagnons bâtisseurs.

    • Geoffroy Bisol est originaire de Frameries dans le comté de Hainaut.
    • Rossal, (ou Roral ou Rolland). Selon certaines sources, il serait originaire du marquisat de Provence. Mais il pourrait aussi s’agir de Robert de Craon et, dans ce cas, il serait angevin.
    • Archambault de Saint-Amand.
    • Gondemare ou Gondernar serait originaire du Portugal.
    • Godefroy. Une question revient souvent à son sujet : serait-il Godefroy de Bouillon ?

    La mission de l’Ordre du Temple

    C’est en 1118 que naquit, encore invisible aux yeux du monde, une communauté qui va pendant trois siècles gérer une grande partie des richesses de l’Europe : ce sont les Chevaliers de l’Ordre du Temple que l’expression populaire désignera plus tard comme « Templiers ».

    Quelle était donc cette mission confiée par Bernard de Clairvaux à l’Ordre du Temple ?

    De 1118 à 1128, les Chevaliers de l’Ordre du Temple ne participent à aucun combat ! Ils occupent l’emplacement du temple de Salomon. La clé de ce mystère ne réside-t-elle pas dans le fait qu’ils ne sont là que dans le but de trouver, de garder et d’emporter en Occident quelque chose de très important qui se trouve en ce lieu : l’Arche d’Alliance et/ou les pierres (ou Tables) de la Loi ?

    Certains pensent que les « Pierres de Loi » sont une formule de l’univers et qu’elles ont été en la possession des constructeurs de cathédrales. Suivant la genèse, ces « Pierres de Loi » étaient enfermées dans un coffre d’or appelé « l’Arche d’Alliance ».

    Le Graal ayant toujours été considéré comme « la coupe de connaissance », les neuf envoyés de Bernard de Clairvaux sont bien partis à la conquête du Graal. De plus, Saint Bernard avait donné à l’Ordre du Temple la mission de laïciser et de diffuser ce qui jusque là était resté un domaine purement monacal, et ce dans les trois entreprises humaines suivantes : la culture, le commerce, la construction religieuse. Il s’agissait donc d’une mission sociale : nourrir les hommes, les protéger, développer leur commerce et leurs relations et enfin leur construire l’instrument d’évolution spirituelle.

    C’est peut-être ces constructions religieuses qui vont nous donner la clé des origines du Temple et pourquoi le bâton de commandement du Grand-Maître de l’Ordre est un « abacus » de magister constructeur.

    L’Ordre du Temple prit donc sa source à Cîteaux, abbaye fondée par le bénédictin Robert de Molesme. Les Bénédictins ont été créés par Benoît de Murcie, un sabin né en 480 qui se fit ermite et se livra seul à la méditation dans une époque de grands désordres et d’invasions.

    Ensuite, réunissant ses disciples, il organisa une communauté axée sur le travail, tant manuel qu’intellectuel, et les offices religieux. Benoît de Murcie entreprit aussi de réunir tous les manuscrits classiques que l’Eglise avait tendance à supprimer comme hérétiques. Ceci est la base de la tradition savante bénédictine.

    C’est par eux que la chrétienté assimila la tradition grecque. Ils construisirent des abbayes dont celles de Cluny ou de Jumièges.

    Ce n’est qu’actuellement que l’on se rend compte qu’elles ont été construites selon des données scientifiques, pas encore toutes repérées, voire astronomiques et telluriques. Benoît de Murcie est mort en 547, soit sept ans après Saint Colomban qui révéla à la chrétienté le trésor celtique.

    Voilà donc le fil conducteur qui nous explique la façon dont furent maintenues les connaissances. Ainsi comprenons-nous mieux que tant d’ouvriers qualifiés et maîtres d’œuvres aient pu être trouvés au 11ème et 12ème siècle pour construire tant de cathédrales.

    On peut donc dire que le Temple est issu de Cîteaux issu lui-même de Cluny, qui est l’aboutissement d’une convergence bénédictine et du christianisme celtique. Cette somme de connaissances, l’Ordre du Temple allait la décupler par l’apport des renseignements venus d’Orient et par sa protection vis-à-vis des constructeurs de cathédrales.

    En 1128, la Fratrie Militaire des « Pauvres Chevaliers du Christ », dite « du Temple de Salomon », fut reconnue comme institution religieuse et dotée d’une règle originale par Saint Bernard, abbé de Clairvaux, et affiliée à l’Ordre monacal des Cisterciens.

    Son but immédiat était la protection des pèlerins, leur sécurité, leur transport, leur retour au foyer,…  ce qui signifiait des obligations auto-imposées, des sacrifices de temps, d’argent, de commodités, et bien des périls ! Peu à peu, l’Ordre du Temple fut amené à formuler sa propre politique – résultat de ses expériences sur le terrain – et sa stratégie. Celles-ci furent d’ailleurs en accord avec celles de la Papauté et des souverains occidentaux.

    La défense de Gaza (1171), la bataille de Tibériade (1187), le sacrifice de Damiette (1219), l’épopée de Mansourah (1250) et le martyre de Saphet (1262) sont les fleurons de cette milice sacrée.

    Pendant les premières années, l’Ordre fut placé sous la protection du Patriarche de Jérusalem de l’Eglise d’Orient. Il fut finalement reconnu en 1139 par Sa Sainteté le Pape. L’Ordre est donc né de la volonté de chevaliers et non d’un roi, d’une puissance ou d’une autorité religieuse. Il était œcuménique et poursuivait des buts universels. Il constituait une véritable police armée du royaume de Jérusalem qui en était dépourvu.

    Près de ses maisons que l’on appelle des « commanderies », les pèlerins, les commerçants, les indigènes, les juifs et même les musulmans, se sentaient en sécurité. Ainsi, leurs implantations devinrent rapidement des lieux de prospérité, de savoir et de sciences, de commerce, etc. La fréquentation de personnes de culture, de religions et d’horizons divers ne put, dans de telles conditions avantageuses, qu’être bénéfique aux Templiers.

    De 1275 à 1312, la politique de l’Ordre se maintint dans la ligne traditionnelle, et sa participation en 1299 à la campagne victorieuse du Khan des Mongols contre le Sultan d’Egypte Malek-Naser, en est une preuve.

    Evolution de l’Ordre

    L'Ordre, purement militaire, comptait 15 000 membres, tous revêtus du fameux manteau blanc frappé de la croix rouge sang, chargés de la défense des places fortes.

    Les « Templiers » se sont rapidement révélés en avance sur leur temps, au plan financier notamment. En ces époques troublées, les routes étaient peu sures. Quiconque s'aventurait avec son or n'était pas assuré d'arriver à destination sans être dévalisé. Les « Templiers » révolutionnèrent leur époque en instituant la lettre de change. Dans les régions où ils étaient implantés, il suffisait au voyageur de se rendre dans une commanderie, d'y déposer son argent contre un reçu.

    Au passage un pourcentage était prélevé, mais les conséquences d'une mauvaise rencontre considérablement atténuées. Remarquables cambistes, dont les méthodes s'appliqueront encore cinq siècles après leur « disparition », ils étaient également des comptables de premier plan puisqu'ils ont inventé la comptabilité en partie double et ont tenu pour la première fois dans l'histoire un véritable « grand livre ».

    L'Ordre du Temple était riche, très riche... Il payait des mercenaires ou turcopoles (Les turcopoles, ou turcoples, étaient des archers montant des chevaux arabes, équipés légèrement et habillés à la turque.), édifiait ou entretenait des forteresses en Terre Sainte, bâtissait des églises et des Commanderies en métropole, gérait des exploitations agricoles, pratiquait des activités de banque… Il est même possible que le Temple ait financé, au moins en partie, l'édification des cathédrales gothiques en France.

    Pendant près de deux siècles, les « Templiers » vont accroître leur aura pour revenir en Occident en 1291, quelques temps après la chute de Saint-Jean d'Acre. Leur mission de protection des pèlerins avait bien évolué dans le sens de l’amélioration des conditions sociales des gens de l’époque.

    Par suite de la prise de Jérusalem (1187), les Templiers se retirèrent à Saint Jean d’Acre. Après la chute de cette ville, le 18 mai 1275, l’Ordre se retira dans ses possessions en Europe, avec deux centres principaux : Chypre, d’où il préparait le retour offensif en Terre sainte, et Paris, où il possédait une importante seigneurie.

    Le Maître de l’Ordre établit la « maison chevêtaine » au Temple de Paris où le roi de France déposa alors le trésor royal et dont il confia la gestion aux Templiers.

    En 1295, Jacques de Molay succéda à Thibaud Gaudin comme Maître de l'Ordre du Temple. Il était de la maison des sires de Longvic et de Raon, dans le comté de Bourgogne.

    Jacques de Molay eut à faire face à des propositions de fusion des Ordres Militaires de Palestine. De cette idée, à la rigueur défendable, on passa, vu l’opposition du Grand maître et de tout l’Ordre, qui auraient ainsi renié leur filiation cistercienne, à l’idée de suppression de l’Ordre pour appliquer ses biens et ses personnes au nouvel Ordre Religieux Militaire Unique qui résulterait de la fusion !

    Par ailleurs, des politiciens mus par l’intérêt des Etats Nationaux naissants, préconisèrent également sa suppression, premier pas vers la suppression de tous les ordres militaires religieux, puis des ordres monacaux eux-mêmes. Et ce dans le cadre de la rivalité opposant en France la puissance royale à celle du sacerdoce.

    Réfugié à Chypre, après la chute de St-Jean d’Acre, le Grand Maître, Jacques de Molay, avait pris conscience du nombre élevé de Templiers et de dignitaires morts aux combats ou des suites de leurs blessures. Pour lui succéder dans les fonctions magistrales, il aurait désigné Jean-Marc Larmenius.

    De 1296 à 1303, l'Ordre du Temple fut partagé entre le pouvoir spirituel du pape Boniface VIII qui souhaitait reconquérir Jérusalem et le pouvoir temporel des rois (surtout du roi de France). Philippe le Bel voulait rétablir l'empire de Charlemagne.

    Banquiers des pèlerins, les Templiers avaient amassé une véritable fortune qui en avait fait une puissance aussi importante que celle de la royauté. Ils prêtèrent même des sommes fabuleuses au roi Philippe le Bel qui s'endetta ainsi considérablement.

    Touché dans son orgueil et sa puissance surtout, Philippe le Bel, qui ne pouvait arriver à ses fins sans la coopération de l’Eglise, se servit de tous les moyens de l’intrigue, de la violence et du mensonge. Les Templiers furent accusés de crimes invraisemblables. Philippe le Bel reprit les mêmes accusations qui avaient été dirigées contre les ordres religieux et même contre le Pape Boniface VIII, dont, en particulier celles de sodomie et d’hérésie.

    Le Pape Clément V, premier pape d’Avignon, surnommé « l’Instable » par les historiens, publia d’abord la Bulle du 12 août 1308 ordonnant la procédure contre l’Ordre, puis celle du 3 avril 1312 qui abolit et cassa l’Ordre du temple, son habit et son nom, comme institution religieuse dépendant de sa juridiction. Enfin, par la Bulle du 2 mai 1312, il attribua les biens du Temple à l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, et, par celle du 6 mai 1312, il régla le sort individuel des Frères.

    Commentaires à propos des Bulles papales

    Les Bulles pontificales furent manifestement rédigées en même temps. On peut en déduire :

    • que le Pape désira laisser un témoignage inéluctable de ce que sa liberté avait été forcée ;
    • que les Bulles montrent une intention de permettre une révision de la « décision », et donc,
    • que ce que Clément V avait aboli par voie de provision, et non par sentence définitive, pourrait être rétabli par lui ou ses successeurs,
    • que les intérêts particuliers de ceux qui s’étaient partagé les dépouilles de l’Ordre (et de leurs successeurs) expliquent assez qu’on n’ait pas jugé opportune une restauration officielle,
    • que Jean XXII, successeur immédiat de Clément V, sauva les langues de Portugal et d’Aragon par la création des deux ordres déjà cités, mais permit toutes les formes de survivance.

    Il convient aussi de noter que ce fut seulement en France que les Templiers furent traités avec rigueur et que, partout ailleurs, malgré parfois les plus minutieuses inquisitions, comme au Portugal et en Espagne, pas une seule des accusations ne fut prouvée. Les prélats de ces deux pays, réunis à Salamanque, sous la présidence de l’Archevêque de Tolède, durent toutefois obéir aux Bulles de Clément V, et l’Ordre des Templiers servit à fonder deux nouveaux ordres : l’Ordre du Christ (en 1319) et l’Ordre de Montesa (en 1317).

    Philippe le Bel avait donc trouvé le moyen de briser l'Ordre en faisant arrêter tous les Templiers le 13 octobre 1307.  Il espérait de la sorte mettre la main sur le soi-disant trésor du Temple. Ce fut un fiasco. Prévenus, les Templiers avaient transféré toutes leurs richesses dans diverses commanderies à l'étranger.

    En quelques années, qui alimentent encore aujourd'hui le mystère des Templiers, leur réputation et leur richesse étaient devenues immenses. La fortune et la puissance de l’Ordre avaient fini par rendre Philippe le Bel jaloux. Les Templiers étaient devenus trop puissants et constituaient une menace de dépasser les rois en fonction. 

    Envieux vis-à-vis des Templiers, du fait de leurs richesses et de leur puissance, Philippe le Bel avait même cherché par plusieurs moyens à en devenir le Grand Maître tout en restant roi de France. Il joua un jeu de trahison qui finit par l'arrestation de tous les Templiers du royaume.

    Le vendredi 13 octobre 1307 au matin, le roi fit arrêter le Maître du Temple ainsi que les 140 Templiers qui étaient à Paris. Le même jour, tous les Templiers furent également arrêtés dans toutes les provinces du royaume. Tous leurs biens furent saisis et mis sous séquestre, sous la garde des gens du roi.

    En 1308, Jacques de Molay et les dignitaires de l'Ordre du Temple qui devaient être conduits à Poitiers pour être interrogés par Clément V furent arrêtés à Chinon, sous prétexte de maladie et questionnés sous le contrôle de Nogaret.

    Les Dominicains chargés de l'interrogatoire firent avouer sous la torture aux frères toutes sortes d'ignominies mais plusieurs se rétractèrent ensuite. Un procès inique suivit cette arrestation bien orchestrée.

    Le 3 avril 1312, près de deux cents ans après la fondation de l’ordre, le Pape Clément V prononçait, sous la pression du roi de France Philippe le Bel, l’abolition de l’Ordre. En vérité, dans sa bulle « VOX CLAMANTIS », il précisait : « Non de façon de sentence, parce que pour cela nous n’avons pas le droit, mais comme disposition provisoire ou d’ordonnance apostolique… ».

    En réalité, le Pape désirait laisser un témoignage inéluctable de ce que sa liberté avait été forcée. Les Bulles pontificales montrent en effet une intention de permettre une révision de la décision d’abolir l’Ordre. Ce que Clément V avait aboli par voie de provision, et non par sentence définitive, pourrait être rétabli par lui ou ses successeurs. Les intérêts particuliers de ceux qui s’étaient partagé les dépouilles de l’Ordre (et de leurs successeurs) expliquent assez qu’on n’ait pas jugé opportune une restauration officielle.

    C’est Jean XXII, successeur immédiat de Clément V, qui permit toutes les formes de survivance. Du moment que fut respectée la lettre des Bulles, toute forme de survie de l’Ordre fut tolérée. La seule chose vraiment défendue était la perpétuation de l’Ordre du Temple comme ordre religieux, avec son nom et son habit.

    Le 18 mars 1314, le Grand Maître et les autres accusés furent amenés sur le parvis de Notre-Dame pour faire amende honorable après la lecture de la sentence. Le Grand Maître Jacques de Molay et ses principaux acolytes furent condamnés à périr sur le bûcher. Jacques de Molay se rétracta, tout comme Geoffroy de Charnay. Ils clamèrent jusqu’au bout leur innocence, ainsi que celle de l’Ordre.

    Jacques de Molay, 22ème Grand Maître ainsi que Geoffroy de Charnay, Précepteur de Normandie, et 37 autres chevaliers furent brûlés le soir même sur l’île aux juifs à Paris et cela contre l’avis même du Saint Père.

    Les biens de l'Ordre des Templiers saisis furent remis à l'Ordre des Hospitaliers. Philippe le Bel saisit la tour du Temple où se trouvaient leurs archives, leur trésor et leur comptabilité.

    Entretemps, pour échapper au massacre, beaucoup de Chevaliers Templiers étaient partis de France pour se réfugier au Portugal, en Espagne, en Allemagne, en Angleterre et en Ecosse, pays où ils n’étaient pas poursuivis.

    D’ailleurs, en 1312, les prélats de la Péninsule Ibérique, réunis à Salamanca sous la présidence de l’archevêque de Toledo, déclarèrent que les accusations étaient fausses et qu’il fallait fonder de nouveaux Ordres au profit des Templiers.

    En 1318, le successeur de Clément V, le Pape Jean XXII, remit en cause les jugements portés contre les Templiers.

    L'œuvre accomplie par l'Ordre du Christ au Portugal le fut en Espagne par celui de Montesa, qui se constitua parallèlement à lui, et à peu près dans les mêmes conditions, avec les débris de la Milice du Temple, sous les auspices du roi Jacques II d'Aragon.

    L'une et l'autre de ces organisations militaires, rapidement sécularisées, avaient perdu tout caractère international. Elles servirent uniquement leurs pays respectifs, et jamais ne furent assimilées, à quelque égard que ce soit, à des sociétés secrètes.

    L’ordre du Temple aux temps modernes

    Après la mort cruelle du Grand Maître, Jean-Marc Larmenius rassembla les Frères dispersés de l’Ordre (Rassembler les Templiers survivants en 1324 ne fut certes pas aisé, mais non impossible. En effet, seuls les Templiers de France furent poursuivis et le Pape Jean XXII, en décembre 1318 révoqua les sentences portées contre les Templiers anglais. Par ailleurs, il permit de créer en Espagne et au Portugal des Ordres similaires à celui du Temple.) et fut reconnu, à l’unanimité.

    Le 13 février 1324, il rédigea lui-même la Charte dite de Larmenius, revêtue de son sceau. Cette « Charte de Transmission » sera authentifiée par tous les autres Grands Maîtres qui lui ont succédé. La liste des Grands Maîtres de ce que l’on a appelé le « Temps Moderne » existe.

    La Charte de Larmenius, rédigée en caractères secrets, fut découverte et déchiffrée par un certain F. Crowe. Elle portait le nom et la signature de tous les Grands Maîtres depuis Jacques de Molay en 1313 jusqu’à Bernard Raymond Fabré – Palaprat en 1804.

    D’après ladite Charte, les deux premiers successeurs de Jacques de Molay, à savoir Jean-Marc Larmenius et Th. d’Alexandrie, établirent le siège magistral à Chypre. Puis, en 1340, Arnaud de Braque le ramènera à Paris avec les archives de l’Ordre.

    Une autre version voudrait qu’avant d’être conduit au bûcher, Jacques de Molay aurait désigné le Précepteur d’Auvergne, Pierre d’Aumont. Mais pour les historiens la première version reste la plus certaine : quelques temps avant sa mort, Jacques de Molay aurait investi de sa puissance le frère Jean-Marc Larmenius, un vénérable chevalier « ne sachant ni lire ni écrire » comme Jacques de Molay lui-même. Mais n’est-ce pas là une expression un peu tardive montrant l’humilité de l’être ?

    Au 17ème siècle, il y eut une réorganisation en profondeur de l’Ordre en France. Il parut à nouveau au grand jour. A la fin du siècle, le doyen des maréchaux de France, Jacques de Durfort, fut élu Grand Maître.

    Cette filiation a donné une suite impressionnante de noms célèbres comme Bertrand Du Guesclin, les d’Armagnac, Montmorency, Bourbon, Philippe d’Orléans, le duc de Cossé – Brissac, pour aboutir à Bernard Raymond Fabré – Palaprat (1773 – 1838) ancien prêtre, médecin, qui rénova l’Ordre du Temple et fonda une église chrétienne se référant à saint Jean, dont la doctrine des chrétiens primitifs est imprimée en 1831 sous le titre « Lévitikon ».

    Evolution de l’Ordre

    Nous pouvons raisonnablement supposer que du moment que fut respectée la lettre des Bulles, toute forme de survie de l’Ordre fut tolérée. Ainsi, la survivance d’un Ordre purement chevaleresque et laïc n’est pas à rejeter puisque la chose vraiment défendue était la perpétuation de l’Ordre du Temple comme ordre religieux, avec son nom et son habit.

    Si l’Ordre resta secret pendant de nombreuses années, il n’en est pas moins vrai que seuls les « survivants » ont pu assurer la permanence de l’esprit templier, ces « Templiers » cachés et secrets, secondés par les lignages templiers, les donats (Les donats étaient au service des pèlerins. Ils étaient soumis à trois vœux : obéissance au prieur, pauvreté par le fait qu’ils ne pouvaient désigner leurs héritiers et chasteté par le fait qu’ils ne pouvaient pas se remarier.) de l’Ordre, les « nouveaux » Ordres et le Compagnonnage.

    Mais reste aussi la perpétuation de l’Ordre dans sa Grande Maîtrise, via la Charte de Transmission, souscrite par chaque Grand Maître et mieux connue sous le nom de Charte de Larmenius.

    En 1478, c’est l’Archevêque de Reims, Robert de Lenoncourt, qui en fut le Grand Maître. Faut-il y voir une tentative de rapprochement avec Rome ?

    L’Ordre du Temple, du 17ème au 20ème siècle

    Au 17ème siècle, l’Ordre parut à nouveau au grand jour en France, et à la fin du siècle, le Grand Maître J. de Durfort, Duc de Duras, Doyen des Maréchaux de France convoqua un Convent général qui se réunit à Versailles le 11 avril 1705 et décréta de nouveaux statuts. Ceux-ci furent confirmés par le 41e Grand Maître, Philippe II, duc d’Orléans. C’est lui qui décida de rendre à l’Ordre une vie publique, ce que conforta un peu plus tard le 44e Grand Maître, le Prince de Conti, élu en 1754, à Clermont et à qui succéda le Duc de Brissac.

    L’Ordre tomba dans la clandestinité pendant la révolution française pour se montrer à nouveau en 1808 avec l’appui de Napoléon 1er qui le reconnut officiellement. Le 28 mars 1808, à l’église Saint Paul à Paris, le coadjuteur général des « Templiers » prononça le panégyrique des martyrs de l’Ordre et, en 1825, Guizot, imprimeur de la Milice du Temple à Paris publia le Manuel des Chevaliers de l’Ordre du Temple, où il prouvait :

    • que l’Ordre n’avait rien de commun et s’était toujours tenu à l’écart de la Franc-maçonnerie, quoi que celle-ci s’en affilie ;
    • que l’Ordre n’avait pu être aboli par les bulles papales,
    • que Jacques de Molay avait nommé successeur
    • et que les Templiers présentaient la série continue, arrêtée et reconnue d’après des documents authentiques de leur Grand Maître, jusqu’au 46e, Bernard Raymond Fabre-Palaprat.

    Napoléon III et Louis XVIII ont reconnu Fabré – Palaprat comme Grand Maître de l’Ordre.

    Au cours de la grande maîtrise de B.R. Fabré Palaprat, il y eut un schisme. Mais la tradition fut rétablie en 1838 sous la maîtrise du Duc de Choisel.

    La Charte de Transmission du 29 mai 1838 du régent (comte de Moreton et de Chabrillan) et la déclaration du 8 juin 1839 rétablirent les traditions des templiers, et en 1841, à la mort du Grand Maître Bernard Raymond Fabré – Palaprat, vingt-cinq commanderies furent reconstituées et des légats envoyés à travers le monde.

    Le 18 mars 1845, une supplique fut adressée au Pape Grégoire XVI pour lui demander d’abroger la condamnation de Clément V et de considérer officiellement la pérennité de l’Ordre. Ce document, présenté par le Prince de Chimay, fut favorablement accueilli, mais le Pape exigea que le Temple fît à tous ses Chevaliers obligation de professer la foi catholique romaine.

    Comme on ne pouvait raisonnablement demander cela à la plupart des ressortissants grecs, suédois, danois, anglais…, qui professaient une autre religion, ils auraient dû démissionner et l’affaire en resta là.

    Le 15 août 1871, le Régent, le Docteur Vernois, déposa abusivement, de son propre chef, les archives de l’Ordre entre les mains de M. Maury, Directeur des archives nationales de France (A.N. – A.B. XIX, Cart 125 à 128).

    Le Convent de Bruxelles en 1894

    Le 13 novembre 1894, un convent général, réuni à Bruxelles, prit la décision de remettre la Régence, avec tous les pouvoirs magistraux et la garde de l’Ordre, à un « Secrétariat international des Templiers ».

    Par décret du 01 octobre 1934, ce Secrétariat transmit tous ses pouvoirs à un « Conseil de Régence de l’Ordre » composé de six hauts Dignitaires siégeant désormais à Bruxelles.

    Le 07 mars 1935, ce Conseil délégua ses pouvoirs à Théodore Covias, Grand Croix et Chancelier. La même année, le 08 août, ce dernier remit ses pouvoirs à Emile Vandenberg, Grand Croix également et Président du Conseil de Régence, afin qu’il assume la Dignité de Régent et de Gardien de l’Ordre, avec tous les privilèges magistraux.

    Pendant la deuxième guerre mondiale, en novembre 1942, dans le but de protéger l’Ordre et en attendant des jours meilleurs, Emile Vandenberg confia l’Ordre au Prieur du Portugal. Ce transfert était nécessaire à cause de la pression qu’exerçaient les nazis.

    Par suite de la guerre et de l’occupation de la Belgique par les Allemands, et afin d’assurer la continuité de l’existence de l’Ordre, ce Régent fit remettre les archives à Antonio de Sousa-Fontes, Grand Prieur du Portugal. Par décret magistral du 23 décembre 1942, il lui fut transmis la Régence avec tous les pouvoirs, droits et prérogatives de la Grande Maîtrise.

    De 1942 jusqu’en 1992, l’Ordre fut gouverné exclusivement depuis le Portugal par la famille comtale Pinto de Sousa Fontes.

    Lorsque le Régent décéda à Porto, le 15 février 1960, son fils Dom Fernando de Sousa-Fontes, lui succéda en vertu de l’article 11 des statuts. Ce dernier convoqua un convent mondial à Paris en 1970, à Chicago en 1971-72 et à Tomar (haut-lieu templier et ancienne maison chevetaine du Portugal) en 1973.

    Appellation officielle de l’Ordre

    La seule dénomination officielle, exacte, complète et publique de notre Ordre est :

    ORDO SUPREMUS MILITARIS TEMPLI HIEROSOLYMITANI

    En abrégé : O.S.M.T.H.

    Bases et règles

    Le Grand Prieuré Magistral de Belgique francophone appartient à l’O.M.S.T.H. et est régi par les actes suivants :

    • la Règle édictée par le Concile de Troyes en 1128 ;
    • les bulles pontificales donnant juridiction souveraine au Grand Maître ;
    • la bulle papale « CUM DE VIRIS » donnée par le Pape Innocent III et répétée quatre fois entre 1198 et 1205 ;
    • l’acte de Louis VII, roi de France en 1154, reconnaissant l’autorité du Grand Maître de l’Ordre du Temple avec la mention « par la grâce de Dieu » ;
    • le Décret Impérial du 13 juin 1853 de Sa Majesté Napoléon III, Empereur des Français précisant que l’Ordre est une puissance souveraine et a droit au port de ses insignes et décorations sur le territoire de France ;
    • les bulles pontificales du pape Jean XXII, successeur de Clément V ;
    • la Charte de Transmission souscrite par les Grands Maîtres successeurs de Jacques de Molay dont Jean-Marc Larmenius (L’Arménien) 1324 ;
    • par les statuts « Règle Internationale de l’Ordre » édictée en 1947 qui ont subi plus tard quelques modifications.

    Devise

    La devise antique n’a pas été modifiée et reste :

    NON NOBIS DOMINE, NON NOBIS, SED NOMINI TUO DA GLORIAM

    Non pas pour Nous Seigneur, mais pour la gloire de ton nom.


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