• * La naissance de Jésus

    La naissance de Jésus

     * La naissance de Jésus

    Vue par les historiens

    La naissance de Jésus de Nazareth est fêtée par les chrétiens le jour de Noël, le 25 décembre. Pour l'Église russe et les anciennes Églises d'Orient qui utilisent toujours le calendrier julien, le 25 décembre julien correspond au 7 janvier du calendrier grégorien. Elle marque en principe le début de l'ère chrétienne. Ni le jour ni l'année ne sont connus avec précision, et la date du 25 décembre précédant l'an 1 a été fixée au début du 6ème siècle par le moine Denys le Petit. Les seules sources sont les récits de l'enfance de Jésus, que l'on trouve au début des évangiles selon Matthieu et Luc et dont l'historicité est douteuse. Compte tenu des incertitudes, les historiens situent en général la naissance de Jésus dans les dernières années du règne d'Hérode Ier le Grand, mort en 4 av. J.- C.

    Lien vers « Le sens de la fête de Noël »

    Sources

    Les seules sources sont les récits de l'enfance de Jésus, que l'on trouve au début des évangiles selon Matthieu et Luc, qui « posent de nombreux problèmes littéraires et historiques, tant leur écriture apparaît tardive, relevant plutôt du merveilleux à la manière des récits d'enfance du monde judéo-hellénistique ». Les évangiles de Marc (le plus ancien, composé vers 65 - 75, et qui selon la théorie des deux sources est une des deux principales sources de Matthieu et Luc), et de Jean (le plus tardif, vers 90-95) commencent avec la prédication de Jean le Baptiste et le baptême de Jésus. La composition de Matthieu et de Luc est en général datée des années 70 - 80.

    Sur l'enfance de Jésus, Matthieu et Luc diffèrent radicalement dans leurs structures narratives et dans leurs récits. La plupart des historiens estiment que ces deux textes ont été rédigés indépendamment l'un de l'autre. Les récits de l'enfance seraient la dernière partie de la tradition évangélique à se développer (après les récits de la Passion et du ministère de Jésus), tendance qui aboutit par la suite à la rédaction d'autres évangiles de l'enfance comme le Protévangile de Jacques et l'Évangile de l'enfance selon Thomas.

    S'ils sont construits sur le modèle d'autres traditions (celle de la naissance de Moïse pour Matthieu, celles de la naissance de Jean le Baptiste et de l'enfance de Samuel dans l'Ancien Testament pour Luc), ils semblent utiliser des détails remontant à des traditions chrétiennes antérieures, et certains de ces détails sont communs aux deux évangiles. C'est dans ces détails communs que les historiens recherchent des éléments historiques, sur la base du critère d'historicité d'attestation multiple dans des sources littérairement indépendantes, et de leur cohérence.

    Les autres textes du Nouveau Testament ne fournissent pas d'indication sur la naissance de Jésus. Les textes chrétiens plus tardifs, que ce soient les écrits des Pères de l'Église ou les textes dits apocryphes, sont fondés sur les évangiles canoniques et ne fournissent pas d'éléments indépendants.

    Les historiens soulignent le peu d'importance que les évangélistes accordent à cette date de naissance, les récits édifiants de l'enfance des personnalités ne relevant pas de la « biographie » au sens où nous l'entendons aujourd'hui. On ignore la date de naissance de nombre de personnages de l'Antiquité.

    Cependant au 6ème siècle, sur des calculs erronés du moine Denys le Petit, le calendrier julien en vigueur prit une nouvelle origine. De l'an 247 du règne de Dioclétien, on passa à l'an 532 de l'ère chrétienne, tout en conservant le 1er janvier comme Nouvel An. La date de Noël, marquant la naissance de Jésus, fut fixée pour des raisons symboliques au 25 décembre, afin de fixer sa circoncision (le 8ème jour) au 1er jour de l'an 1.

    Cette question de la date de naissance de Jésus semble toutefois assez importante pour que le pape Benoît XVI revienne en 2012 sur le sujet dans son ouvrage L'Enfance de Jésus : Le moine Dionysius Exiguus « s'est à l'évidence trompé de quelques années dans ses calculs. » [...] « La date historique de la naissance de Jésus est donc à fixer quelques années auparavant ».

    La célébration de la fête de l’Incarnation — connue aussi sous le nom de fête de la Théophanie — apparait sous deux formes : d'une part, pour l'Orient, l’« Épiphanie » est plutôt centrée sur la « naissance spirituelle » (le baptême) de Jésus ; d'autre part, en Occident, et plus tardivement, « Noël », davantage centrée sur la « naissance historique » (la nativité) du Christ. En ce sens, il semble plus pertinent d'utiliser le terme « Nativité » pour l'Orient et le terme « Noël », propre à la conception occidentale de la célébration.

    Sous le règne d'Hérode

    Les deux récits de l'enfance de Matthieu et Luc indiquent que la naissance de Jésus eut lieu sous le règne du roi Hérode le Grand : « Jésus étant né à Bethléem en Judée, au temps du roi Hérode » (Mt 2, 1) ; « Du temps d'Hérode, roi de Judée, [...] l'ange lui dit : Ne crains point, Zacharie ; car ta prière a été exaucée. Ta femme Élisabeth t'enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jean. [...] Quelque temps après, Élisabeth, sa femme, devint enceinte. [...] Au sixième mois, l'ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée, appelée Nazareth, auprès d'une vierge fiancée à un homme de la maison de David, nommé Joseph. Le nom de la vierge était Marie. [...] L'ange lui dit: Ne crains point, Marie ; car tu as trouvé grâce devant Dieu. Et voici, tu deviendras enceinte, et tu enfanteras un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus. » (Lc 1,5-31). Dans Matthieu, cet élément se place dans le récit de la venue des rois mages, du massacre des Innocents, et de la fuite en Égypte, qui situe l'action à la fin du règne d'Hérode, le retour d'Égypte se faisant après l'accession au pouvoir d'Archélaos, son successeur. Chez Luc, il se place dans le cadre d'un parallélisme entre les annonces miraculeuses des naissances, à six mois d'intervalle, de Jean le Baptiste et de Jésus.

    La date de la mort d'Hérode peut être déterminée en utilisant les informations données à la fin du 1er siècle par l'historien juif Flavius Josèphe, les annales romaines, et des données astronomiques. Selon Flavius Josèphe, Hérode est nommé roi par les Romains sous le consulat de Calvinus et Pollio en - 40, et élimine son rival Antigone II Mattathiah sous celui de Agrippa et Gallus14 en - 37. Il règne pendant 37 années après sa nomination par les Romains, et 24 après la mort d'Antigone II Mattathiah. Suivant la façon dont Josèphe compte les années, entières ou pas, cela mène à - 4 ou - 3. Mais Josèphe mentionne une éclipse de Lune peu avant la mort d'Hérode. Il y en a eu qui étaient visibles depuis la Palestine le 15 septembre - 5, et le 13 mars - 4, mais aucune en - 3 ni en - 2. Schürer conclut qu'Hérode est mort un peu après l'éclipse du 13 mars - 4. En 1966, W. E. Filmer contesta cette date, sur la base du décompte des années et d'erreurs de Josèphe sur les dates de consulat, et détermina que la mort d'Hérode aurait eu lieu en -1, peu après l'éclipse du 9 janvier. Le calcul de Filmer a été depuis réfuté par Barnes en 1968, et Bernegger en 198517, et la date de - 4 est celle qui est aujourd'hui retenue.

    L'Évangile selon Matthieu, chap. 2, versets 16-18 relate que le roi Hérode 1er, ayant appris la naissance à Bethléem du roi des Juifs « envoya tuer tous les enfants de deux ans et au-dessous qui étaient à Bethléem et dans tout son territoire, selon la date dont il s’était soigneusement enquis auprès des mages ». Selon ce texte, Joseph se serait enfui avant ce massacre avec l'enfant Jésus et sa mère en Égypte où ils restèrent jusqu'à la mort d'Hérode.

    Recensement de Quirinius

    Au début du chapitre 2, Luc donne une indication précise : « En ce temps-là parut un édit de César Auguste, ordonnant un recensement de toute la terre. Ce premier recensement eut lieu pendant que Quirinius était gouverneur de Syrie. » C'est ce qui explique selon cet évangile le déplacement de Joseph et Marie de Nazareth à Bethléem où naît Jésus. Le règne d'Auguste commence en janvier ou en août - 43, (sauf en Égypte où il commence en août - 30 avec la prise d'Alexandrie et la mort d'Antoine et Cléopâtre), et se termine à sa mort en août 14.

    Selon Tacite et Flavius Josèphe, Publius Sulpicius Quirinius devient gouverneur (legatus Augusti propraetore) de Syrie en l'an 6 de notre ère, après l'expulsion d'Archélaos. Josèphe nous apprend en outre qu'il fit un recensement en Judée en 6 -7, qui déclencha la révolte de Judas de Gamala.

    Âge du début de prédication et de mort

    Le troisième chapitre de Luc indique que Jean le Baptiste commença sa prédication «la quinzième année du règne de Tibère». Il baptise ensuite Jésus qui commence alors sa prédication à « environ trente ans ». Tibère succède à Auguste en 14, ce qui placerait le début de la prédication de Jean le Baptiste en 28 – 29, et Jésus un peu après. Cependant, le début de règne peut aussi désigner l'année où Tibère a été associé au pouvoir en 12. Compte tenu de cette incertitude, et de celle sur le délai après le début de la prédication de Jean, Paul Mattei évoque la une fourchette située entre 26 et 30, optant pour sa part vers la fourchette plus restreinte de 26 - 28 tandis que Simon Claude Mimouni pense que la prédication a dû commencer « au meilleur cas » en l'an 28, se fondant sur le chapitre 2 de l'évangile selon Jean.

    De la même manière, Marie-Françoise Baslez, explique que ce chapitre 2 de l'Évangile selon Jean – qui situe la première montée de Jésus à Jérusalem par rapport aux quarante-six ans qu'il a fallu pour bâtir le Temple d'Hérode – constitue l'un des meilleurs repères chronologiques du Nouveau Testament. La date de pose de la première pierre du temple d'Hérode est située en 19 av. J. - C. par Flavius Josèphe. La première montée de Jésus à Jérusalem daterait ainsi de 27 ou 28.

    Les historiens placent généralement la date de la mort de Jésus pendant la fête juive de la Pâque, à Jérusalem, entre l'an 30 et l'an 33. Les Évangiles la placent unanimement sous l'administration du Romain Ponce Pilate, qui fut préfet de Judée entre 26 et 36.

    Datation

    Le principal problème est l'écart d'au moins 10 ans entre la fin du règne d'Hérode et le recensement de Quirinius.

    Des trésors d'ingéniosité ont été dépensés afin d'accorder les deux datations et de préserver l'historicité de Luc, dans le cadre de la doctrine de l'inerrance biblique.

    Raymond E. Brown résume les solutions possibles : « Premièrement on peut essayer de recaler la chronologie d'Hérode de Luc 1 pour qu'elle concorde avec le recensement de Quirinius (vers 6 - 7) de Luc 2. Deuxièmement, on peut essayer de recaler le recensement de Quirinius pour qu'il concorde avec la datation basée sur la mort d'Hérode (- 4 ou - 3). Troisièmement, on peut reconnaître que l'une ou les deux datations de Luc sont confuses, et qu'il n'y a ni besoin ni possibilité de les accorder ».

    Position majoritaire des historiens

    La majorité des historiens retiennent comme la plus vraisemblable la naissance à la fin du règne d'Hérode 1er le Grand (avant 4 av. J. - C.), tradition présente dans les deux évangiles de l'enfance considérés comme littérairement indépendants. Ils rejettent le récit du recensement de Quirinius en Luc 2, historiquement invraisemblable du fait de l'inexactitude chronologique concernant son unique mandat, mais également pour plusieurs autres raisons :

    • Si Auguste ordonna des recensements de tous les citoyens romains en - 28, - 8 et 14, il n'existe aucune trace d'un recensement qui aurait concerné tous les habitants de l'Empire, ni qui leur aurait demandé de retourner dans la ville de leurs ancêtres
    • Le seul recensement connu de Quirinius ne concernait que la Judée (où se trouve Bethléem), et non la Galilée (où se trouve Nazareth) qui n'était pas alors sous juridiction romaine directe, et avait son propre dirigeant, le tétrarque Hérode Antipas. Ce recensement régional par Quirinius s'est déroulé à fin d'imposition en Judée – et non en Galilée où aucun impôt ne fut levé par les Romains du vivant de Jésus – vers 6 ou 7 de notre ère. En outre, une autre tradition attribue d'ailleurs ce recensement local à Sentius Saturninus qui gouverne la région à partir de l'an 8, ce qui semble plus vraisemblable.

    Cette mention serait ainsi un motif littéraire permettant de justifier la naissance de Jésus à Bethléem, ville de David. Mais si l'auteur de l'Évangile selon Luc se plaît à situer son récit dans le contexte d'évènements de l'Antiquité, il le fait à plusieurs reprises erronément : pour l'historien Fergus Millar, l'usage que Luc fait du cens de Quirinius, pour expliquer comment Jésus est né à Bethléem, est « totalement trompeur et non historique ».

    Mais l'association de la naissance de Jésus avec l'édit d'Auguste permet d'introduire une charge symbolique à travers un destin divin qui culminera dans les Actes des apôtres avec la prédication de Paul à Rome et une notion théologique universaliste et œcuménique. On trouve également une affirmation laïque du loyalisme qui intègre Jésus dès sa naissance dans le cadre des autorités romaines et l'affirmation religieuse qui situe le recensement dans une affirmation eschatologique et messianique.

    D'autres inexactitudes se trouvent dans les écrits lucaniens que « ceux qui ont une approche fondamentaliste des textes ont du mal à évacuer ». Par ailleurs avec les « environ trente ans » en l'an 15 du règne de Tibère fournis par Luc pour le début de prédication de Jésus sont cohérents avec la datation dans les dernières années d'Hérode indiquée par le récit de Matthieu. Si le récit du massacre des Innocents, dans lequel Hérode fait exécuter tous les enfants de deux ans et moins de la région de Bethléem, est généralement considéré comme un midrash faisant un parallèle avec la naissance de Moïse, certains historiens en tiennent compte comme Paul Mattei qui estime que la fuite en Égypte a donc eu lieu au moins plusieurs mois avant la mort d'Hérode, et la naissance à - 6 ou - 7.

    Un midrash : ce mot, qui signifie « étude », désigne l'ensemble des interprétations de la Bible hébraïque par les Rabbins.

    Autres datations

    Selon Craig A. Evans, s'il est classique de placer la naissance de Jésus en 4 av. J. - C. ou un peu avant, la référence au règne d'Hérode le Grand pourrait refléter un parallélisme Jésus / Moïse – Hérode / Pharaon, et compte tenu de la fiabilité historique de Luc, une datation en 6, à la fin du règne d'Hérode Archelaus et durant le recensement de Quirinius est possible, ce qui ferait commencer la prédication de Jésus vers 25 ans. Cette datation était précédemment défendue par l'archéologue français Gilbert Picard. Une datation entre 4 av. J. - C. et 6 est aussi défendue par Reza Aslan.

    Historiographie

    Auteurs antiques

    Justin Martyr (~100 - ~165) dans sa Première Apologie adressée à l'empereur Antonin et écrite entre 148 et 154 reprend l'idée du recensement de Quirinius : « le Christ naquit il y a 150 ans sous Quirinius » et : « Dans le pays des Juifs, il y a un village à 35 stades de Jérusalem où Jésus est né. Vous pouvez en avoir la preuve dans les registres du cens fait sous Cyrenius, votre premier procurateur en Judée ».

    Pour dater la naissance de Jésus, la plupart des auteurs antiques, et notamment les pères de l'Église, se basent uniquement sur le chapitre 3 de Luc, qu'ils interprètent en donnant à Jésus exactement 30 ans lors de la quinzième année du règne de Tibère, qu'ils font démarrer en 14. Ils situent donc sa naissance en l'an 41 du règne d'Auguste (Irénée de Lyon, Tertullien, Jérôme de Stridon) ou plus souvent 42 (Hippolyte de Rome, Eusèbe de Césarée, Épiphane de Salamine), ou en Égypte la 28ème année du règne d'Auguste (Clément d'Alexandrie), en 752 après la fondation de Rome (Orose, sous le consulat de Auguste et Plautius Silvanius) (Épiphane de Salamine, souvent repris), ou celui de Lentulus et Messala (Cassiodore) : dates correspondant toutes à - 3 ou - 2.

    Un autre critère de datation des auteurs antiques est la valeur symbolique des dates, qui prévaut parfois sur les données des évangiles. Ainsi, selon le chroniqueur chrétien Julien l'Africain dans sa Chronographie (221), dont nous n'avons que des fragments, il y aurait eu exactement 5500 ans entre la création d'Adam et l'incarnation et la naissance de Jésus, qui aurait donc eu lieu en l'année Anno Mundi 5501. Il la place par ailleurs en l'année 42 du règne d'Auguste.

    Au 5ème siècle, les chronographes alexandrins Annianos et Panodore ont l'idée d'accorder la naissance de Jésus avec le début d'un cycle pascal (cycle métonique de 19 ans du calendrier luni-solaire). Annianos d'Alexandrie reprend le nombre de 5500 années depuis la fondation du monde, et pour l'accorder avec le début d'un cycle pascal, il place la naissance de Jésus sous le consulat de Camerinus et Sabinus, en 9 (date la plus tardive des auteurs antiques).

    Jour de naissance

     * La naissance de Jésus

    La détermination du jour de la naissance a également une importance symbolique, et le 25 mars, jour de l'équinoxe de printemps, souvent considéré comme le jour de la création du monde, est envisagé comme celui de la conception, de la mort ou de la résurrection de Jésus).

    Cependant dès la première attestation qui témoigne d'une recherche de la fixation de la date de naissance de Jésus, il apparait une disparité selon les communautés chrétiennes. Ce premier témoignage vient de Clément d'Alexandrie qui rapporte la situation à Alexandrie où, à la fin du 2ème ou au début du 3ème siècle, certains évoquent le vingt-cinquième jour de Pachon (20 mai) ou le vingt-quatrième ou vingt-cinquième jour de Pharmouti (19 ou 20 avril) tandis que les Basilidiens célèbrent, eux, le baptême de Jésus correspondant à une naissance symbolique, le quinzième jours du mois de Tybi, ou encore le onzième (10 ou 6 janvier). Clément lui-même avance une date qui correspond au 18 novembre – 3.

    Une tradition également ancienne, rapportée un peu plus tard par Hippolyte de Rome situe la naissance de Jésus mercredi au début du mois d'avril, précisément un mercredi 2 avril. Cette date plaçant la naissance de Jésus au printemps fait peut-être écho à une tradition judéo-chrétienne d'origine sacerdotale basée sur le calendrier du Livre des Jubilés dont Hippolyte aurait connaissance.

    Par ailleurs, suivant un passage du De Pascha Computus, rédigé en Afrique en 243, Jésus est né le mercredi V des calendes d'avril, soit le 28 mars : cela correspond au quatrième jour après Pascha – date que l'auteur retient pour dater la Passion et premier jour de la création correspondant à l'équinoxe de printemps – et cela coïncide avec la création du soleil, permettant une assimilation du Christ au « Soleil de justice » une prophétie de Malachie. Ce texte montre l'existence d'une natalis solis iustitiae plus de trente ans avant la natalis solis invicti romaine.

    D'après le Chronographe de 354, la célébration d'une fête de l'incarnation du Sauveur se déroulant le 25 décembre est attestée à Rome, sous le pontificat de l'évêque Libère à l'occasion de laquelle l'évêque rassemble les chrétiens dans la basilique nouvellement construite au Vatican, achevée en 354. Le choix de la date semble le fruit d'un calcul autonome fait au cours du 3ème siècle mais il s'insère dans un cadre plus général de la constitution d'un calendrier liturgique, probablement destiné à concurrencer, à Rome, les réjouissances païennes. Cette tradition sera reprise par le martyrologe hiéronymien une compilation datant probablement du 6ème siècle, reprenant des documents plus anciens.

    Denys le Petit

    Au 6ème siècle, Denys le Petit, un moine historien, a cherché à savoir quand exactement le temps des chrétiens a commencé. Pour lui, le début de l'ère chrétienne, c'est l'année où Jésus est né. Denys le Petit a fait ses calculs et a fixé ainsi l'an 1. Un nouveau calendrier a été adopté. Désormais, il y a les siècles avant Jésus-Christ, et les siècles après.

    Aujourd'hui on pense que le moine a fait une erreur, et que Jésus a dû naître 6 ou 7 ans avant ce fameux an 1.

    Quant au 25 décembre, ce n'est sûrement pas le jour exact où Jésus est né. Cette date a été choisie par des chrétiens du 4ème siècle. Avant même la période chrétienne, de nombreuses fêtes populaires étaient célébrées au mois de décembre, au moment du solstice d'hiver, comme pour conjurer le froid et la nuit, et peut-être la mort de la nature. A Rome, du 17 au 24 décembre, on fêtait ainsi les Saturnales, en l'honneur de Saturne, le dieu des semailles et de la fertilité. En Orient, le culte de Mithra, divinité de la lumière, voulait que l'on sacrifiât, le 25 décembre, un jeune taureau, pour célébrer la naissance du dieu solaire. Et l'on trouve des traces de fêtes similaires chez les Teutons, les Celtes et les scandinaves, dans les pays nordiques.

    Le jour du solstice d'hiver en effet, si l'on entre véritablement dans l'hiver, c'est aussi le moment où les jours commencent à rallonger, le soleil renaît... Et les hommes ont toujours voulu célébrer ce temps. Peut-être pour mieux espérer le retour du printemps, de la lumière et de la vie.

    D'après les Évangiles, Jésus serait mort un vendredi au moment des fêtes de la pâque juive. Selon leurs calculs, la plupart des historiens ont conclu que cela a dû arriver le vendredi 7 avril de l'an 30. Jésus avait alors environ 36 ans.

    C'est sur ces bases qu'au début du 6ème siècle, le moine Denys le Petit a placé l'annonciation le 25 mars et la naissance de Jésus neuf mois plus tard, le 25 décembre de l’année 753 de Rome (c'est-à-dire l'année - 1 du calendrier actuel), principalement pour qu'elle coïncide avec le début d'un cycle pascal. C'est sur ce calcul que se fondent aujourd'hui les calendriers de l'ère chrétienne.

     * La naissance de Jésus

    Denys le Petit est un moine scythe (470-537 ou 555 ?). Ses travaux pour tenter de fixer la date de naissance de Jésus sont à l'origine de notre calendrier.

    L’ « Étoile de Bethléem »

    Dans la Nativité racontée dans l'évangile selon Matthieu, des rois mages se rendent à Bethléem, guidés par une étoile. Depuis Johannes Kepler au 17ème siècle, de nombreuses tentatives ont été faites pour identifier ce phénomène astronomique et dater la naissance de Jésus. Les historiens et astronomes modernes considèrent que « du fait de la nature légendaire du récit, il est douteux que l'étoile de Bethléem puisse fournir une quelconque indication sur l'année de naissance de Jésus ».

    Vue par les quatre Évangélistes

     * La naissance de Jésus

    Ce que les apôtres ont d’abord annoncé - et qui, depuis bientôt 2000 ans, est au cœur de la foi des chrétiens -, ce n’est pas la naissance de Jésus mais sa mort et sa résurrection. Puis, remontant dans le temps, ils ont tenu à rappeler - très sommairement d’ailleurs - son activité à travers toute la Galilée et la Judée.

    Ce n’est que dans un troisième moment que les chrétiens se sont interrogés sur ce que tout cela impliquait quant à l’enfance de Jésus (Marc, le plus ancien Évangéliste, n’en dit rien), avant d’en venir même (à l’époque de l’Évangile de Jean) à entrevoir que Jésus était Fils de Dieu avant même de naître de Marie (Cf. le Prologue du 4ème Évangile).

    On le voit, dans le calendrier chrétien, Pâques est la fête des fêtes, bien plus importante que Noël... et c’est à la lumière de Pâques qu’il convient de lire ce que les Évangélistes nous disent de la naissance de Jésus. Sur les quatre d’ailleurs, seuls Matthieu et Luc nous parlent explicitement de la naissance et de l’enfance de Jésus. Encore ne le font-ils pas de la même manière, car ils n’écrivent pas pour les mêmes communautés et soulignent des aspects différents de la Bonne Nouvelle de Jésus.

    Matthieu parle des mages (ni rois, ni trois), mais pas des bergers... d’une étoile mais pas des anges... Luc parle des bergers, mais pas des mages... des anges qui chantent la gloire de Dieu, mais pas de l’étoile au-dessus de la grotte... Aucun ne mentionne de bœuf ni d’âne...

    La crèche de Matthieu

     * La naissance de Jésus

    Elle nous présente Jésus comme l’Emmanuel, c’est-à-dire « Dieu-avec-nous » et nous prépare déjà à accueillir la dernière promesse de Jésus dans cet évangile : « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps ». (Mt 28,20).

    L’étoile qui guide les mages est la métaphore du roi-messie, selon la prophétie du livre des Nombres (Nb 24,17). Quant aux mages eux-mêmes, ils symbolisent les nations païennes à qui l'Évangile de Jésus est offert. D’un bout à l’autre de son récit, Matthieu se plait à rappeler que ceux qui accueillent avec joie la parole de Jésus ne sont pas toujours ceux auxquels on aurait pu s’attendre... La tradition a voulu qu’ils soient de races différentes (belle image de l’universalité du salut) et s’appellent Melchior, Gaspard et Balthazar.

    En ce sens, une manière de retrouver le sens profond de Noël sera peut-être pour les baptisés de s’ouvrir avec émerveillement à toutes les richesses humaines, culturelles et spirituelles que Dieu met dans le cœur des hommes, quelles que soient leurs religions, leurs cultures, leurs convictions.

    Marc : une Bonne Nouvelle au présent

     * La naissance de Jésus

    Marc ne nous parle pas du « petit Jésus », mais d’une « bonne nouvelle » – c’est le sens du mot Évangile – pour les chrétiens de Rome à qui il s’adresse. Cette bonne nouvelle, c’est Jésus-Christ lui-même, le Fils de Dieu (Mc 1,1). La parole de Jésus est toujours d’actualité et les verbes que l’Évangéliste emploie dans son récit sont le plus souvent au présent.

    Bien des familles exprimeront à Noël cette certitude en installant leur crèche et n’hésiteront pas à compléter les traditionnels santons par des personnages ressemblant fort aux membres de la famille...

    La crèche de Luc

     * La naissance de Jésus

    La révélation de l’ange atteint le monde entier, du haut en bas, de la foule des anges aux bergers, c’est-à-dire l’une des catégories sociales les plus méprisées à l’époque. Né hors de son village, hors de l’hôtellerie, tel un exclu, Jésus fera la joie des petits et des pauvres et aura bien du mal à se faire entendre des riches (Lc 6,24 ; 14,13.21 ; 16,19-26 ; 19,8).

    Noël ne sera donc vraiment Noël que si nous savons les uns et les autres le vivre sous le signe du partage. A chacun de repérer ses vraies richesses et de voir s’il peut souscrire au constat fait par Jésus : Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir (Ac 20,35) !

    Jean : la Lumière et le Verbe

    On ignore le jour et l’heure de la naissance de Jésus, qui ne sont précisés dans aucun texte du Nouveau Testament. Mais, depuis le 4ème siècle, l’Église a pris l’habitude de fêter la naissance de Jésus le 25 décembre, au cœur de la nuit la plus longue (d’où la messe de minuit), christianisant ainsi la fête païenne de Natalis Invicti (la naissance du soleil) qui se célébrait à cette date (solstice d’hiver). C’était faire droit à la belle intuition de l’Évangéliste Jean selon laquelle, aux heures sombres de notre vie Jésus vient comme une lumière :

    « Le Verbe était la lumière véritable, qui éclaire tout homme » (Jn 1,9).

     * La naissance de Jésus

    Tout disciple de Jésus, à Noël, est appelé à se rappeler sa vocation qui est de mettre la vérité là où règne l’erreur, la joie là où règne la tristesse, l’espérance là où règne le désespoir, le pardon là où est l’offense.

    Que ce soit à l’école de Matthieu, Marc, Luc ou Jean, peu importe. L’essentiel est de faire de ce Noël autre chose qu’une simple quinzaine commerciale, en accueillant le joyeux message d’un Dieu dont la gloire dans les cieux est inséparable de la paix sur la terre pour les hommes qu’Il aime !

    Conclusion 1

    C'est désormais dans la pensée commune des historiens et des savants, que l'année de naissance de Jésus-Christ n’est pas été correctement calculée. Il s'agirait d'une erreur faite de la part du moine Denys le Petit, qui entre le 5ème et le 6ème siècle fut chargé par Rome de continuer la compilation de la table chronologique de la date de la Pâque préparée au temps de l’Évêque Cyrille. Le monarque prit comme point de départ la date de l'incarnation du Seigneur. L'erreur de Denys le Petit fut dans le fait que le monarque calcula la naissance de Jésus après la mort d'Hérode, soit 4 ou 6 ans après la date à laquelle elle serait vraiment advenue, et qui correspondrait à 748 après la fondation de Rome. Mais Flavius Joseph nous donne le témoignage que la mort d'Hérode 1er le Grand, advint après 37 années de son règne. En considérant qu'il monta sur le trône en 40 avant J. - C, l'année de sa mort serait donc en 4 avant J. - C.

    Un autre évènement astronomique avant la mort du monarque nous le confirme, à savoir celui de l'éclipse lunaire qui serait advenue entre le 11 et le 12 avril de l'an 4 avant J. - C. C'est pourquoi si la date de la mort d'Hérode est advenue en 4 avant J. - C., Jésus ne peut être né après cette année-là. En ce qui concerne le mois et le jour de la naissance en revanche, nous disposons de beaucoup d'éléments véridiques qui en confirment la date.

    Pour faire cette analyse, nous devons tenir compte de deux sources : l’Évangile de Luc et le calendrier solaire découvert à Qumran. Luc nous dit que l'Ange Gabriel annonça à Zacharie qu'Elisabeth était enceinte alors qu'il « remplissait devant Dieu les fonctions sacerdotales au tour de sa classe » (Luc 1,8). A partir de ces éléments il fut possible de calculer les 24 classes parmi lesquelles étaient répartis les familles sacerdotales et remonter à la huitième classe d'Abia à laquelle appartenait le prêtre Zacharie qui exerçait le service du 8ème au 14ème jour du troisième mois, et du 24ème au 30ème jour du huitième mois. Cette dernière date correspond à la fin du mois de septembre, soit 9 mois avant le 24 juin, date de la naissance de Jean Baptiste. Et de même, l'annonce à la Vierge Marie « au sixième mois » (Luc 1, 28) de la conception d'Elisabeth, correspondrait au 25 mars. Par conséquent il est possible de considérer comme historique également, la date de naissance de Jésus le 25 décembre.

    Malgré cela, est commune la pensée selon laquelle la tradition de l'Église a stabilisé cette date de la fête de la naissance de Jésus, en correspondance aux fêtes païennes du Dies natalis solis invicti, qui avaient lieu le 21 décembre, jour du solstice d'hiver. Et ceci très probablement pour remplacer le culte païen, et diffuser rapidement le culte chrétien. Mais il est aussi évident qu'une fête aussi centrale ne puisse avoir été mise en place seulement pour des questions de suprématie, et très certainement la tradition avait des racines historiques et réelles. Il est vrai que le passage de la fête païenne à celle chrétienne fut très facile, notamment grâce à la tradition biblique qui voit le Messie comme la lumière et le soleil, comme nous le rappelle le passage évangélique : « grâce aux sentiments de miséricorde de notre Dieu, dans lesquels nous a visités l'Astre d'en haut » (Luc 1, 78).

    Conclusion 2 : La Lumière du Seigneur

    Entre collègues, à l’école, chez les commerçants, entre amis, depuis quelques semaines, on échange des vœux. « Bonnes fêtes de fin d’année ! », s’exclame-t-on. Malgré les difficultés et les deuils, le temps est à la fête ! Et nous, chrétiens, nous avons partagé la fébrilité des préparatifs, décoré nos maisons, pensé à chacun. Nous nous sommes réjouis de la fête qui, souvent, réunira familles, amis et accueillera l’hôte de passage, le voisin isolé. Mais risquons-nous d’être éblouis, fascinés par les illuminations du monde ? Le Prologue de Jean, que nous lisons le jour de Noël, nous conduit à l’essentiel. Il ouvre notre cœur et notre intelligence à la parole créatrice.

     * La naissance de Jésus

    Nous redécouvrons que la lumière qui éclaire le chemin que nous avons choisi d’emprunter ne se confond ni avec les feux qui brillent dans les arbres de nos maisons, ni avec les projecteurs des devantures commerciales, ni avec les scintillements éphémères de nos réussites.

    Cette lumière est celle qui éclaire les pas du messager de la paix. Elle éclaire toute personne de bonne volonté qui cherche à s’orienter dans le monde et à participer à la recherche de la paix. Quitter la brillance du monde pour entrer dans la clarté de Dieu n’est donc pas le fruit d’un renoncement volontaire mais celui d’une révélation.

    C’est parce que Dieu nous éclaire et qu’ainsi il nous révèle ce qu’est la vie en plénitude que nous devenons vivants, appelés à éclairer et non à briller. La fin de l’année peut briller de mille feux, osons fêter Noël, accueillir le Prince de la paix avec tous ceux qui cherchent la lumière. Recevons la vie et osons crier de joie avec tous les lointains de la terre !

    Marie-Dominique Trébuchet, enseignante à l’Institut catholique de Paris

    Rappel : Lien vers « Le sens de la fête de Noël »

     * La naissance de Jésus

    Joyeuse et sainte fête de Noël à vous, cher lecteur, dans l'Amour et la Paix du Christ !

    Frère André B., Grand Chancelier prieural

    Références

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Date_de_naissance_de_J%C3%A9sus

    https://www.portstnicolas.org/phare/etudes-specialisees/article/la-naissance-de-jesus-vue-par-les-quatre-evangelistes

    http://croire.la-croix.com/Enfants/Questions-d-enfants/Dieu-Jesus/A-quelle-date-Jesus-est-il-ne

    http://www.bethleem.custodia.org/default.asp?id=314

    http://www.prionseneglise.fr/Dimanche-en-eglise/Dimanche-25-decembre-2016


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