• * Représentations de Jean dans l’art

    Chapitre XII : Représentations de Jean dans l’art

    Jean de Patmos

    « Jean de Patmos », parfois « Jean le visionnaire », est le nom donné à l'auteur de l’Apocalypse qui s'identifie sous le nom de « Jean » par quatre fois dans ce texte écrit vers 95. L'auteur de l'Apocalypse n'a pas laissé de traces historiques et les traditions à son sujet s'opposent dès les premiers temps du christianisme.

    En se fondant sur l'analyse exégétique et textuelle, il est vraisemblable que sa langue fût l'araméen voire l'hébreu, ce qui rend possible la thèse des chercheurs qui en font un prophète apocalyptique judéo-chrétien qui aurait fui la Palestine à la suite de la révolte juive des années 60 et se serait réfugié en Asie Mineure — peut-être à Éphèse — avant de s'exiler sur l'île de Patmos, peut-être sous la pression de ce que la tradition chrétienne appelle persécution de Domitien mais dont la réalité est largement mise en question par les historiens. Il a pu s'agir d'un personnage important des communautés judéo-chrétiennes d'Asie Mineure aux sept Églises desquelles il s'adresse et dont le texte peut laisser penser qu'il était un prophète itinérant.

    Les relations de cet auteur avec la tradition et l'école johanniques sont débattues. Mais une majorité de chercheurs incline à ne pas associer Jean de Patmos aux courants johanniques, même si des contacts ont pu avoir lieu.

    L'assimilation par la tradition du rédacteur de l'Apocalypse à l'Évangéliste Jean voire à l'Apôtre Jean – qui s'est vu parfois surnommé l'« Aigle de Patmos » – a donné lieu à la production d’œuvres d'art qui lui sont consacrées.

    De nombreuses représentations de la Cène le montrent au côté de Jésus, écoutant attentivement les paroles du Seigneur, les yeux quelquefois fermés pour mieux écouter (Cf. « La Cène » peinte par Dirk Bouts). En effet dans l'Évangile que l'on attribue à Jean, il rapporte avec beaucoup de précisions les paroles prononcées par Jésus au cours de la Cène (Discours de la Cène, chapitres 14 à 17), et en particulier l'envoi de l'Esprit-Saint ou Paraclet[1] par le Père.

    Dans de nombreuses représentations de « la Crucifixion », Jean figure avec Marie au pied de la Croix.

    Plusieurs représentations de Jean le montrent tenant à la main un calice d'où émerge la tête d'un serpent, en référence au « thème johannique du serpent ». Mais il peut s'agir aussi de « la légende de la coupe de poison d'Aristodème ».

    Son symbole en tant qu'Évangéliste dans la tradition du Tétramorphe est l'aigle, d'où le surnom « l'aigle de Patmos ». Il est souvent représenté avec une coupe surmontée d’un serpent ou avec une chaudière remplie d’huile.

    Peintures représentant saint Jean

    • Saint Jean l'Évangéliste à Patmos

     * Chapitre XII : Représentations de Jean dans l’art

    « Saint Jean l'Évangéliste à Patmos », parfois appelé « Saint Jean à Patmos », est un tableau du peintre néerlandais Jérôme Bosch. Il est exposé à la Gemäldegalerie, à Berlin, en Allemagne.

    L'œuvre représente un épisode de la vie de saint Jean l'Evangéliste. Selon la tradition, celui-ci s'est exilé à Patmos pour échapper à la persécution de Domitien. Mais les historiens remettent en cause cette explication. Ce serait en tout cas à Patmos que l'apôtre aurait eu la révélation de l'Apocalypse après avoir vu une apparition du Christ. Jérôme Bosch illustre ici la vision de Jean, et la rédaction du livre des Révélations.

    Il s’agit d’une peinture à l’huile sur panneau mesurant 63 sur 43,3 cm.

    Le revers est également peint, et cette scène est intitulée « Scènes de la Passion du Christ » et, au centre, « le Pélican avec ses petits ».

      * Chapitre XII : Représentations de Jean dans l’art   * Chapitre XII : Représentations de Jean dans l’art

    Jheronimus van Aken, dit Jérôme Bosch ou Jheronimus Bosch ± 1450 – ± 1516), est un peintre néerlandais, du mouvement Primitif flamand et membre de l'Illustre Confrérie de Notre-Dame.

    • Saint Jean à Patmos

     * Chapitre XII : Représentations de Jean dans l’art

    Diego Vélasquez représente Jean l'Évangéliste sur l'île de Patmos où il a eu d'admirables révélations et où il a écrit « l'Apocalypse ».

    Il apparaît assis avec, posé sur les genoux, le livre dans lequel il écrit le contenu de la révélation.

    À ses pieds, deux autres livres, posés l'un sur l'autre, évoquent probablement l'Évangile de Jean et les trois épîtres dont il est l'auteur.

    En haut et à gauche apparaît le contenu de la vision qu'a eue le saint, tirée de l'Apocalypse (12, 1-4) et interprétée comme l'Immaculée Conception, dont la définition dogmatique controversée avait d'ardents défenseurs à Séville :

    « Un grand signe parut dans le ciel : une femme enveloppée du soleil, la lune sous ses pieds, et une couronne de douze étoiles sur sa tête. (...) Un autre signe parut encore dans le ciel ; et voici, c’était un grand dragon rouge, ayant sept têtes et dix cornes, et sur ses têtes sept diadèmes. (...) Le dragon se tint devant la femme qui allait enfanter, afin de dévorer son enfant, lorsqu’elle aurait enfanté ».

    Dans la conception, Vélasquez suit des modèles iconographiques connus : une gravure de Jan Sadeler, à partir d'un tableau de Martin de Vos pour le schéma général et la figure du dragon, et une autre de Juan de Jáuregui publiée dans le livre de Luis del Alcázar « Vestigatio arcani sensu Apocalypsi » (Anvers, 1614), pour l'image de la Vierge. Également pour la figure de saint Jean, on a repéré les influences, bien que plus cachées et interprétées de manière naturaliste, de la gravure de Durero sur le même thème. Pacheco reproche à Durero d'avoir peint saint Jean jeune, comme le fait aussi Vélasquez, alors qu'au moment d'écrire l'Apocalypse, il était un vieillard de quatre-vingt ans. En le dessinant ainsi, sans doute, Vélasquez a pu transposer sur la toile un des conseils iconographiques de son maître, qui recommandait de le peindre « jeune homme, à cause de sa virginité et pour proposer à chacun un modèle de pureté, attaché à consacrer au Christ la fleur de sa jeunesse ».

    La tête du saint a été peinte d'après nature, et il s'agit probablement du même modèle que celui qui a été utilisé pour l'étude d'une tête de profil du Musée de l'Ermitage.

    La lumière est celle qui est utilisée dans les écoles naturalistes. Issue d'un point situé hors du cadre, elle se reflète intensément sur les habits blancs et détache par des ombres intenses les traits durs du jeune apôtre. L'effet des volumes créé de cette manière, et l'intérêt apporté dans le traitement des textures des matériaux, comme l'a signalé Fernando Marías, éloigne Vélasquez de son maître déjà dans ces œuvres de jeunesse.

    Dans la semi-pénombre se tient l'aigle, symbole de l'Évangéliste. Sa présence se laisse à peine deviner grâce à une des serres sortant de l'ombre, ainsi qu'à quelques touches blanches qui reflètent la lumière sur la tête et le bec. Le plumage reste confondu avec le fond terreux du paysage.

    À la droite du tronc de l'arbre, la claire-voie est brouillée par quelques touches fortuites, comme a l'habitude de le faire Vélasquez, touches destinées à nettoyer le pinceau.

    L'étude très poussée de la lumière sur le personnage de saint Jean, et l'aspect rude de sa figure, font ressortir encore plus le caractère surnaturel de la vision, enveloppée dans une aura de lumière diffuse. La taille réduite de la vision, différente de celle que l'on trouve dans les gravures qui ont servi de modèle, s'explique par la position de l'œuvre à côte du tableau de l'Immaculée Conception.

     * Chapitre XII : Représentations de Jean dans l’art

    Dans ce dernier tableau, la vision de la femme de l'Apocalypse vient se personnifier dans la Vierge, mère de Dieu, conçue sans péchés.

    Le rapprochement des deux tableaux souligne ainsi l'origine conforme aux textes de cette iconographie mariale, soulignant la matérialisation d'une vision, connue par les mots écrits par saint Jean.

    Saint Jean à Patmos est une huile de Diego Vélasquez, appartenant à sa première période et peinte à Séville vers 1618. Elle est exposée à la National Gallery de Londres en compagnie de « l'Immaculée Conception », autre œuvre faisant partie d'un ensemble de même inspiration.

    Histoire du tableau

    En 1800, Ceán Bermúdez mentionne ce tableau avec « l'Immaculée Conception », de dimensions identiques, dans la salle capitulaire du couvent du Carmen Calzadode Séville, pour lequel il a probablement été peint. Les deux tableaux ont été vendus en 1809, par l'intermédiaire du chanoine López Cepero, à l'ambassadeur de Grande Bretagne, Barthélémy Frere. En 1956, il a été acquis par le musée où il était déposé sous forme de prêt depuis 1946. La critique est, depuis Ceán, unanime à reconnaître son authenticité.

    • L'épreuve de la coupe empoisonnée ou le triomphe de la foi

     * Chapitre XII : Représentations de Jean dans l’art

    Saint Jean l’Évangéliste bénit la coupe empoisonnée que lui a donnée un prêtre païen d'Éphèse pour le mettre à l'épreuve mais le venin s'échappe du calice sous la forme d'un petit dragon bicéphale, comme le raconte la Légende dorée de Jacques de Voragine (1228-1298).

    Cette toile a été exécutée par Alonso Cano pour le retable d'un couvent de Séville. Artiste le plus complet du siècle d'Or, Cano était également sculpteur, talent qui transparaît ici dans le volume donné au saint.

    Saint Jean est représenté tenant un calice qui fait allusion à sa mise à l'épreuve par le grand prêtre du temple de Diane à Éphèse. Celui-ci lui dit : « Si tu veux que je croie en ton dieu, je te donnerai du poison à boire et s'il ne te fait aucun mal, c'est que ton dieu sera le vrai Dieu ».

    Le tableau montre donc saint Jean neutralisant grâce à un geste de bénédiction le venin qui s'échappe du calice sous la forme d'un petit dragon bicéphale. La légende raconte que saint Jean put ensuite boire le breuvage.

    Ce récit, popularisé par la « Légende dorée » de Jacques de Voragine, s'inspire de phrases des Évangiles. Dans celui de saint Matthieu, Jésus dit à saint Jean et à son frère : « Il est vrai que vous boirez la coupe que je dois boire ». Et dans celui de saint Marc, Jésus ressuscité envoie les apôtres en mission et leur promet entre autres l'immunité contre le poison : « Voici les miracles qui accompagneront ceux qui auront cru : quand ils auront bu quelque breuvage mortel, il ne leur fera point de mal ».

    L'artiste le plus complet du « Siècle d'Or »

    Cette peinture faisait partie du retable consacré à saint Jean l'Évangéliste que le monastère des religieuses hiéronymites de Santa Paula à Séville commanda en 1635 à Alonso Cano. Le tableau du Louvre était placé avec un autre représentant le frère de saint Jean – saint Jacques le Majeur – de part et d'autre du tabernacle sur le soubassement du retable. Cano réalisa non seulement les peintures mais aussi l'architecture de ce retable. Il était une personnalité singulière, à la fois architecte, peintre et sculpteur.

    Il s'est formé comme peintre dans l'atelier de Francisco Pacheco (1564-1654) où il rencontra Diego Vélasquez (1599-1660) qui resta son ami toute sa vie. Il aurait appris la sculpture avec Juan Martinez Montañés. La commande du retable de Santa Paula de Séville fut la dernière reçue par Cano dans cette ville avant son départ pour Madrid en 1638. Comme d'autres peintres sévillans de la première moitié du 17ème siècle, notamment Vélasquez, il fut attiré par la capitale de l'Espagne mais finit sa vie en Andalousie dans sa ville natale de Grenade où il réalisa les dessins de la façade de la cathédrale juste avant de mourir.

    Le style de Cano est très différent de celui de ses contemporains : sa peinture se fait l'écho de son art de sculpteur. Cano suggère le volume de la figure en lui donnant une position oblique, un modelé dur et précis. Le saint, qui se détache sur un fond sombre, a devant le miracle un mouvement de surprise qu'a fort bien traduit l'artiste. L'Évangéliste est ainsi très différent des figures calmes de Francisco de Zurbarán (1598 - 1664). Par ailleurs, ses vêtements ont des couleurs claires et délicates qui évoquent celles des peintres classiques bolonais (Agostino  Les Carrachi ou Guido Reni). Plus tard, à Madrid, tous les aspects de son style traduiront une recherche semblable de beauté idéale.

    • Histoire du supplice de saint Jean l’Évangéliste

     * Chapitre XII : Représentations de Jean dans l’art

    Cette huile sur toile, œuvre de Martin Gomez le Vieux, est exposée au Musée Diocésain de la ville de Cuenca en Espagne.

    L’œuvre

    Ce tableau est la partie centrale d’un retable réalisé entre 1550 et 1553 pour le couvent Santo Domingo. Bien que Martin Gomez ait été influencé par la peinture de la renaissance italienne, cette œuvre reste très marquée par le gothique espagnol.

    Seul le haut du corps du saint, qui  ne se trouve pas exactement au centre de la composition, émerge du chaudron léché par les flammes. L’Empereur, assis sur son trône, muni de son bâton de justice, étonné par l’impassibilité du martyr, d’un doigt impérieux, demande à un soldat de vérifier si l’eau bout. Du côté de l’Empereur, des courtisans lèvent leur main d’étonnement devant ce miracle, tandis que de l’autre côté des hommes du peuple le commentent, mais discrètement, à l’oreille pour ne pas attirer l’attention de Domitien. Au premier plan, un enfant vêtu de bleu, couleur mariale, est une nette allusion à la virginité du saint.

    Vitraux représentant saint Jean

    1. Le vitrail 48 à Chartres

     * Chapitre XII : Représentations de Jean dans l’art

    Le vitrail évoquant saint Jean l’Évangéliste ne trouve pas ses sources scripturaires dans le Nouveau Testament, excepté en ce qui concerne le médaillon n° 5, qui montre saint Jean rédigeant l’Apocalypse.

     

    Les scènes de cette verrière sont inspirées de différentes légendes qui ont vu le jour dès le 2ème siècle. Le verrier a suivi les leçons liturgiques de la Saint-Jean, le 27 décembre. Il ne parle que du séjour de saint Jean à Patmos, puis à Éphèse, et de sa disparition mystérieuse.

     

    Ces textes ont été compilés, plus tard, dans la « Légende dorée » (récit légendaire très embelli de la vie des saints) écrite en 1255 par le dominicain Jacques de Voragine.

     

    La lecture de ce vitrail est un peu particulière et adopte le rythme d’une déambulation : on monte par la lecture des médaillons latéraux, de gauche à droite, puis on plonge vers le bas pour remonter par les médaillons axiaux.

     

    Le vitrail de Saint-Jean l’Évangéliste, de type narratif, fait partie du large ensemble prévu pour les fenêtres de la cathédrale gothique au début du 13ème siècle, et qui fut réalisé parallèlement au gros œuvre. Il semble en représenter l’ultime étape symbolique, vis-à-vis du vitrail de Noé consacré à la première alliance entre Dieu et la famille humaine : saint Jean est en effet l’auteur de l’Apocalypse.

     

    Le vitrail de Saint-Jean l’Évangéliste nous montre la vie du saint avec des épisodes extraordinaires comme les jeunes gens brisant des pierres précieuses que saint Jean reconstitue en enseignant la Charité.

     

    Dans le troisième médaillon central, l’apôtre boit la coupe empoisonnée devant Aristodème. A côté on peut voir la préparation du poison avec des serpents écrasés.

     

    Les armuriers sont les donateurs de ce vitrail.

     

    2. Détail d’un vitrail de la cathédrale Saint-Pierre de Beauvais

     * Chapitre XII : Représentations de Jean dans l’art

    Dans la chapelle Saint-Vincent, trois baies forment une  unité apparente puisque les scènes hagiographiques colorées se détachent sur des verres blancs dont les losanges sont décorés de motifs en grisaille, et que toutes les trois sont couronnées par une rose à huit oculi périphériques. Pourtant, les éléments centraux des deux verrières latérales, d'un bleu profond, datent du 13ème siècle et de la première campagne de vitrification du chœur, alors que la baie centrale, aux couleurs aérées par des plages blanches, date du 14ème siècle, lors de la  reconstruction.

    Nous avons de gauche à droite :

    • Baie n° 10 : verrière du martyre de saint Vincent (fin 13ème siècle)
    • Baie n° 12 : verrière de saint Jean l'évangéliste (1340 – 1350)
    • Baie n° 14 : verrière du martyre de saint Pierre (fin 13ème siècle)

    Description de la baie n° 12.

    La baie, qui mesure 7,30 m de haut et 2,20 m de large, se compose de deux lancettes juxtaposées et d'un oculus de réseau en forme de rose. L'ensemble est en verre soufflé polychrome et les détails peints à la grisaille et au jaune d'argent. Les scènes hagiographiques sont encadrées par des panneaux de grisaille décorative. Le panneau de la lancette gauche représente saint Jean l’Évangéliste à Patmos, et celui de droite saint Jean lors de la Crucifixion. La rose du tympan est consacrée au Couronnement de la Vierge.

    Ces vitraux datent des années 1340. La date de leur création correspond au règne de Philippe VI de Valois et à l'épiscopat de Jean de Marigny.

    3. Vitrail de la chapelle de Harthouse

     * Chapitre XII : Représentations de Jean dans l’artÀ la chapelle Saint-Wendelin de Harthouse, l'aigle est représenté comme attribut aux pieds de saint Jean, qui tient un calice d'où émerge un petit dragon pour rappeler que ce saint a échappé à l'empoisonnement.

    La chapelle Saint-Wendelin d'Harthouse se situe dans le hameau de Harthouse à 5 km au sud-ouest de la ville d’Haguenau (au Nord de Strasbourg) dont il dépend.

     

     

     

     

     

     

     

     

    Frère André B., Grand Chancelier Prieural

    [1] Le Paraclet est le nom donné au Saint-Esprit, troisième personne de la Trinité, signifiant « aide, protecteur, intercesseur, consolateur ». C’est aussi le Saint-Esprit sous la forme d'une colombe.


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