• * 42 - La Résurrection du Christ

    220418 (Lundi de Pâques)

    Rubrique « Regards sur la liturgie » – 42

     Le Mystère de la Résurrection de Jésus 

     * 42 - Le Mystère de la Résurrection du Christ

    1. La foi en la Résurrection est-elle possible aujourd'hui ?

    Qu'est-ce qu'un corps humain ?

    Qu'est-ce qu'un corps ? La réalité des corps peut être étudiée selon toute une échelle de points de vue scientifiques. Il y a les corps minéraux, dont on analyse la composition moléculaire et atomique. Il y a les corps vivants avec la double série du végétal et de l'animal, qui sont étudiés selon leurs composants biologiques. On enregistre déjà une différence de seuil entre le végétal et l'animal. La série animale, des protozoaires jusqu'aux singes supérieurs, telle qu'elle est expliquée dans l'interprétation de l'évolution, présente une série ascendante dans le domaine de la conscience et de la communication.

    Un seuil nouveau et radical est franchi avec le corps humain. Sans doute celui-ci assume-t-il tous les « étages » inférieurs de l'être corporel. Nous sommes faits d'atomes, de molécules, de cellules, de systèmes végétatifs et nerveux. Notre corps obéit à toutes les lois de la biologie. Pourtant, il dépasse celles-ci de manière décisive par sa conscience réflexive, par sa raison, par la capacité de son langage. On ne peut ici séparer trop facilement le corps et l'âme. Car tout ce que nous vivons est indissociable de notre corps.

    C'est par lui que nous travaillons et pouvons agir sur la nature et transformer le monde. C'est par lui que nous pensons et parlons, entrant ainsi en relation avec les autres. Notre parole est immatérielle quant à son sens mais très matérielle, puisque notre bouche articule des sons avec notre souffle. Quand nous écrivons, c'est encore par la médiation de notre corps que nous formons les lettres sur le papier ou que nous tapons sur les touches d'un ordinateur et l'écriture de quelqu'un est jugée suffisamment révélatrice de sa personnalité pour donner lieu à des investigations graphologiques. C'est avec notre corps que nous aimons. Les gestes de l'amour passent par lui, tout en exprimant un sentiment qui va bien au-delà du corporel. Plus généralement, c'est dans notre corps que nous éprouvons joie et plaisir. Notre visage a une mobilité constante qui nous permet de manifester toute une palette de sentiments délicats par le sourire ou le rire, les pleurs ou la joie. Pensons aussi à la beauté spirituelle du corps humain quand tous ses membres sont expressifs, en particulier dans certaines danses, ou certains exploits sportifs, où le corps apparaît comme transcendé.

    Notre corps est aussi le lieu de notre souffrance, non seulement physique mais morale. Où est d'ailleurs la frontière exacte entre les deux ? L'angoisse intérieure, un grave échec sentimental ou professionnel ont des incidences corporelles. De son côté, l'épreuve de la maladie, qui est celle de tel ou tel organe ou fonction, est une souffrance authentiquement humaine, surtout quand elle met en cause notre espérance de vie. C'est pourquoi la mort, qui délie la relation intime que nous avons avec notre corps, est perçue comme une destruction de nous-mêmes.

    A mesure que nous avançons en âge notre corps devient histoire. Il porte les traces des blessures physiques ou morales reçues. Bref, tout en notre corps est typiquement humain. Comme disait Péguy, le spirituel en nous est charnel et le charnel est spirituel. En vérité, nous n'avons pas un corps, mais nous sommes notre propre corps. Notre corps est un corps humain et donc un corps spirituel. L'anthropologie contemporaine parle volontiers de « corps-parlant » ou de « corps-signifiant ». Elle souligne ainsi le fait que celui-ci est avant tout le lieu d'une existence personnelle, faite de langage et de communication. Le corps, c'est nous-mêmes.

    De la mort à la sépulture

    Après la mort de l'homme son corps devient cadavre et il est l'objet d'une sépulture. Ce changement de nom, mais aussi le respect qui lui est manifesté, traduisent qu'il ne s'agit plus et pourtant qu'il s'agit encore d'un corps humain. Le cadavre n'est plus corps du simple fait qu'il n'est plus parlant et signifiant. Demeure désormais inhabitée, il n'est plus le centre de relations d'une personne humaine. Il demeure cependant corps humain pour ceux qui ont connu et aimé l'être décédé. Il est pour eux le signe récapitulant toute son histoire et toutes les rencontres qu'ils ont eues avec lui. C'est pourquoi il reçoit une sépulture destinée à le respecter et à maintenir sa mémoire. L'homme est l'animal qui enterre ses morts, l'animal qui se souvient de ceux avec lesquels il a vécu et se rapporte à eux comme à des êtres qui existent encore de quelque façon.

    Car si la mort de l'être cher apparaît comme une séparation absolue et définitive, l'ensevelissement respectueux trahit cependant l'espérance que tout n'est pas fini. Suivant les traditions religieuses, les survivants se laissent aller à penser que le défunt vit toujours, même s'il s'agit d'une existence diminuée. Ils essaient de préserver au maximum son corps de la désintégration (embaumements, momification). Ou bien ils estiment qu'il continue à vivre dans la conscience de sa famille ou de son peuple par les traces que son action a laissées.

    Quel corps ressuscite ?

    Parler de la résurrection des corps, ce n'est porter aucun jugement sur le sort des atomes, des molécules et des cellules. Autrefois, un apologiste chrétien du IIème  siècle, Athénagore d'Athènes, s'était laissé aller à répondre à des objections ridicules par leur matérialisme. Il évoquait le cas suivant. Il arrive à des poissons de manger des corps humains de naufragés. Mais les hommes mangent à leur tour les poissons. Supposons qu'un homme ait mangé la chair d'un poisson qui avait lui-même mangé la chair d'un homme. A la résurrection à qui cette chair appartiendrait-elle ? La question est ridicule. L'attitude de l'Église vis-à-vis de la crémation montre bien que la résurrection n'a rien à voir avec l'état de conservation d'un cadavre.

    Mais la tentation de rendre compte de la résurrection au plan matériel nous guette toujours. Il y a peu, un homme de science posa dans des conférences la question suivante : « Les données de la science moderne permettent-elles de croire à la résurrection suivant le dogme catholique ? » L'auteur entend ramener la résurrection à un phénomène comme un autre, en l'abordant sous l'angle scientifique et en la considérant comme un phénomène, au même titre que la cristallisation ou la dilatation des métaux. La faille radicale d'une telle position est que la résurrection est ici pensée à l'intérieur de notre continuum spatio-temporel, sans doute comme un passage à une nouvelle perfection corporelle, mais qui conduit finalement à une vie du même ordre que la précédente. Or la résurrection n'est précisément pas un phénomène. La science n'a pas plus à dire que l'histoire sur la discontinuité radicale qui demeure entre notre monde et ce que le bon sens populaire appelle « l'autre monde », c'est-à-dire le monde de la vie en Dieu. Aucune discipline scientifique n'a de pertinence pour « prouver » la possibilité de la résurrection.

    La discontinuité du ressuscité n'est en effet pas représentable. Nous n'avons aucune image de ce que peut être un corps ressuscité dans un univers qui est au-delà du temps et de l'espace. Nous pouvons seulement percevoir quelques signes donnés de cette discontinuité à partir des récits évangéliques sur Jésus ressuscité. Encore, ceux-ci sont-ils des « pédagogies » adaptées à des hommes non ressuscités.

    Selon la foi chrétienne, affirmer une résurrection du corps, c'est maintenir une forme de continuité à travers la discontinuité radicale entre corps mortel et corps ressuscité. Cette continuité concerne le corps humain en tant qu'il est humain, en tant qu'il a été inséparable de notre condition humaine et qu'il est la récapitulation de toute une histoire et l'expression d'une personnalité complète.

    Il nous est dit en même temps que ce corps sera désormais un « corps spirituel », « un corps glorieux » et incorruptible, par opposition à notre « corps animé » et « corruptible ». Cela peut paraître une contradiction dans les termes : ce qui est esprit n'est pas corps et ce qui est corps n'est pas esprit, comme ce qui est vers n'était point prose pour monsieur Jourdain. Mais toute l'analyse proposée ci-dessus a montré que notre corps charnel est déjà spirituel à plus d'un titre. Il le sera alors complètement. Mais nul ne peut en dire plus, tout simplement parce que nul sur terre n'est encore ressuscité. Mais nous affirmons ainsi une réalité d'espérance et de foi qui va bien au-delà de la notion de l'immortalité de l'âme.

    Tel est le contenu du message de la Résurrection de Jésus. Celui-ci se manifeste à ses apôtres comme le même, celui qu'ils ont connu mais qu'ils « reconnaissent » sous une forme tout autre, puisque le mode de communication qu'ils ont avec lui a complètement changé. Jésus n'est plus soumis aux limites de l'espace et du temps : il les transcende et les domine complètement. Sa présence vient désormais d'ailleurs, elle vient du monde divin de Dieu.

    Dès les origines, ce message a fait difficulté, en particulier aux païens comme on le voit dans la scène des Actes des apôtres, où Paul annonce la Résurrection devant l'Aréopage d'Athènes : (Ac 17, 32). Bien entendu, le message de la Résurrection fut souvent à travers les siècles une pierre d'achoppement pour la foi chrétienne. Mais il fut aussi son levier le plus puissant.

    La foi en la Résurrection est-elle aujourd'hui possible ?

    L'homme moderne garde-t-il encore la capacité de croire en la Résurrection ? Une telle idée fait-elle partie du « croyable disponible » de notre temps ? Le concept de résurrection n'apparaît plus, à première analyse, culturellement porteur de l'espérance humaine. La perspective rationaliste de notre modernité relègue volontiers cette idée au grenier des projections mythologiques du désir humain. Mais tout est-il dit par-là ?

    Des analyses récentes de l'espérance humaine arrivent en effet à de tout autres conclusions. Le théologien luthérien allemand Wolfhart Pannenberg, développant des réflexions du philosophe d'inspiration marxiste Ernst Bloch, estime que, selon une constatation universelle, la destinée naturelle de l'homme ne trouve pas son achèvement définitif dans la finitude de sa vie terrestre. La facilité étonnante, avec laquelle l'homme d'aujourd'hui semble vivre sans s'inquiéter de la question de la mort risque d'être trompeuse : « La superficialité n'est pas à elle seule une libération. Et l'étouffement ne donne pas à lui seul le sentiment d'une victoire ». Plus précisément : la phénoménologie de l'espérance montre qu'il appartient à la nature de l'être humain conscient d'espérer par-delà la mort. [...] Cette interrogation sans fin de l'homme sur lui-même se traduit par les espérances portant sur l'au-delà de la mort et dont font partie aussi bien l'idée de l'immortalité de l'âme que celle d'une résurrection des morts. [...] La « vie par-delà la mort » ne peut plus être conçue sous la forme de l'immortalité de l'âme, mais seulement comme un autre mode d'existence de l'homme tout entier. Or c'est ce que contient l'image d'une résurrection des morts.

    Ces analyses partent de l'expérience humaine la plus profonde. L'homme sait qu'il va mourir et il vit son existence comme une contradiction tragique entre son destin inéluctable et son désir de vivre de manière absolue. Dans cette situation il ressent un besoin radical de salut que l'on peut définir ainsi : être sauvé, c'est vivre, vivre tout entier, vivre absolument, vivre heureux dans l'amour, vivre toujours dans une réconciliation définitive avec soi-même, avec les autres, avec l'univers et avec Dieu. La parenté sémantique du terme de salut avec celui de santé traduit bien cette donnée. On dit d'un homme revenu d'une maladie à risque mortel qu'il est sauvé !

    On peut donc dire que tout homme est habité par une espérance de sa propre résurrection, présente au fond de lui-même de manière incoercible. Elle est liée à notre « être-homme ». Cette espérance est un trait de l'expérience décrite au début de ce livre. C'est elle qui nous permet de comprendre la Résurrection de Jésus et d'y adhérer par la foi, puisque nous n'avons à notre disposition aucune expérience comparable. Il n'y a en effet pas de foi sans espérance, comme il n'y a pas d'espérance sans un minimum de foi.

    Père Bernard Sesboüé, jésuite et théologien, le 28 avril 2015.

     * 42 - Le Mystère de la Résurrection du Christ

      Détail du vitrail de « la Résurrection », église Sainte-Trinité (Longwy-Bas).

    Le Christ ressuscité porte la bannière de sa victoire sur la mort.

     * 42 - La Résurrection du Christ

    Vitrail de « la Résurrection », église Sainte-Trinité (Longwy-Bas).

    Le troisième jour suivant la mort de Jésus, des femmes qui l’accompagnaient à Jérusalem découvrent son tombeau vide

    et rencontrent des anges qui annoncent sa Résurrection.

     * 42 - Le Mystère de la Résurrection du Christ

    2. La Résurrection, ce mystère

    La Résurrection de Jésus est le fondement de la foi chrétienne. Mais comment est apparue cette notion ?

    Alors que, lors de la mise en croix de Jésus le Nazaréen, les proches avaient été foudroyés, profondément consternés et désemparés, les fidèles ont réagi dans les jours qui ont suivi. Quelque chose d’inouï s’est en effet produit avec ce tombeau vide. Très vite, la rumeur a dû se propager : « Dieu l’a réveillé » ou « Dieu l’a élevé », lit-on dans les Lettres aux Thessaloniciens. Il est à noter le flou des verbes employés puisque c’est plus tard, c’est-à-dire au XIIème siècle, qu’on forgera le terme de « Résurrection ».

    À propos de ces événements, nous disposons de deux types de récit évangélique : les récits de l’ouverture du tombeau et ceux des apparitions, même si ce dernier terme convient assez mal.

    Chronologiquement, le tombeau ouvert est découvert au matin du dimanche de Pâques. Les premiers récits en sont peu nombreux et sobres avec la visite de deux ou trois femmes trouvant la pierre déplacée (Marc 16, 1-8 et Luc 24, 1-11), puis l’arrivée d’autres disciples qui constatent également l’absence du corps (Luc 24, 12 et Jean 20, 2-10).

    Quatorze autres textes sont plus explicites. En revenant du tombeau, des femmes dont Marie de Magdala sont mises en présence du Ressuscité lui-même (Matthieu 28, 9-10 et Jean 20, 11-18). Nombre de témoins vont alors affirmer avoir vu Jésus vivant après sa mort et ils garantissent qu’il s’agit bien de la même personne que celle crucifiée le vendredi précédant la Pâque. Citons-en quelques-uns : au cours d’un repas, onze apôtres, Thomas étant absent (Jean 20, 19-29), deux disciples sur un chemin vers Emmaüs (Luc 24, 13-35), au bord du lac de Galilée lors d’une pêche ( Jean 21, 1-23) et sur une montagne pour l’envoi en mission (Matthieu 28, 16-20).

    Ainsi se sont formés peu à peu les premiers éléments du Credo chrétien, transmis par Paul (1. Corinthiens 15, 3-5) : « Je vous ai enseigné en premier lieu ce que j’avais reçu moi-même. Christ est mort pour nos péchés selon les Écritures ; il a été enseveli. Il a été réveillé le troisième jour selon les Écritures ; il est apparu à Céphas (Pierre), puis aux Douze. » La suite est tout aussi intéressante : « Ensuite il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois, dont la plupart sont encore vivants et dont quelques-uns sont morts. Ensuite il est apparu à Jacques, puis à tous les apôtres. Après eux tous il m’est aussi apparu, à moi l’avorton. ».

    Signalons au passage que la vie retrouvée par Jésus est différente de celle qu’il a vécue. Il s’agit d’une vie glorieuse et éternelle. « Christ réveillé des morts ne meurt plus, sur lui la mort n’a plus d’empire » (Paul, Romains, 6, 9).

    De cet exposé, il ressort nettement que l’affirmation de la Résurrection comme fondement même de la foi est constante depuis les débuts du christianisme. Chez nos contemporains, sa croyance nécessite assurément une démarche spirituelle exigeante, voire dérangeante. Malgré tout, on peut de manière fort légitime se demander comment qualifier sa foi de catholique et simultanément être convaincu que Jésus pourrit au séjour des morts ou s’est évaporé dans le néant. Rappelons les propos de saint Paul aux Corinthiens : « Si Christ n’est pas ressuscité, notre prédication est vaine et vaine aussi votre foi » (15, 1-26).

    Dominique Jacob sur le site « La Divine Providence » - Diocèse de Nancy et de Toul

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    Quand le Christ ressuscite… les autres

    De son vivant, Jésus a accompli trois miracles pour lesquels on parle communément de « résurrection ». La fille (12 ans) de Jaïre, notable juif, est ramenée à la vie par Jésus qui lui dit : « Jeune fille, lève-toi » (Marc, 5, 21-43, relaté également par Luc, 8,40-56 et Mathieu, 9, 18-26). Le fils unique de la veuve de Naïn, croisée avec le cortège funéraire près de cette ville est rappelé à la vie par un Jésus profondément ému (Luc, 7, 11-17). Enfin Lazare de Béthanie, frère de Marie et de Marthe, mort déjà depuis quatre jours (Jean, 11, 1-44), sort de son tombeau sur l’ordre de Jésus. La vie a été rendue à des personnes qui avaient toutes les apparences de la mort (maladie ou sommeil), et pourtant cela ne les a pas empêchées de mourir ultérieurement au terme de leur existence terrestre.

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    3. Le Mystère de la Résurrection

    L’évènement de la Résurrection dans sa matérialité de fait historique, mérite brutalement le nom de miracle et le même événement comme glorification du Christ, dans son sens religieux le plus profond, immense et ineffable, mérite le nom de Mystère.

    3.1. Le miracle historique de la Résurrection de Jésus

    Démonstration de la foi

    Écoutons le kérygme, c'est-à-dire l'annonce du fait du Christ par la première génération apostolique, celle des témoins : ce sont les Écritures. Nous suivons l'herméneutique, c'est-à-dire l'interprétation, la plus loyale, la plus constante, la plus autorisée, celle qui est née de la pensée même des hérauts de la foi, s'est répercutée dans celle de la communauté croyante et s'est maintenue sans changement substantiel jusqu'à nos jours. L'herméneutique, c'est la Tradition. Qui possède mieux l'Écriture de l'Église Apostolique que l'Église de la Tradition Apostolique ?

    1) Pierre, le jour de la Pentecôte, selon le Livre des Actes, atteste que Jésus est ressuscité : son corps est sorti vivant du tombeau. Tous les Apôtres l'ont vu. Il apporte pour justification de cet événement le texte prophétique du psaume 16 dont il adopte la version grecque, des Septante, parce qu'elle précise la matérialité du fait physique : le Saint de Dieu ne devait pas voir « la corruption ».

    Sans préjugé rationaliste ni idéaliste, nous entendons directement ce que Pierre atteste sans équivoque : ils ont vu Jésus corporellement ressuscité du tombeau, échappé à la corruption de la chair. Et l'appel aux Écritures prouve que le milieu contemporain était culturellement préparé à entendre ce langage nouveau dans sa pleine vérité. 

    2) Les récits des témoins ont pour fondement indiscutable ce qui a été à l'origine de leur foi : la découverte du tombeau vide. Cette constatation de l'ordre des évidences physiques demeure le point de départ d'une preuve encore aujourd'hui démonstrative. Et là-dessus s'exercera la raison la plus exigeante. Son corps n'est plus là. Nul ne l'a dérobé. Il est exclu qu'on se soit trompé de tombeau. Il est inconcevable que ce corps se soit volatilisé en 36 heures, car l'absurde n'existe pas ! Donc il faut croire qu'il a repris vie. La démonstration est solide et donne aux « apparitions » leur certitude historique.

    3) La raison, interprétant ces données, conclut qu'il est possible à l'homme de connaître, au-delà de la mort, une vie corporelle, individuelle, d'une condition encore inconnue. Ce n'est pas une simple « survie », ni la « réanimation d'un cadavre », mais une vie nouvelle d'une qualité plus parfaite, transfigurée sur laquelle nous savons et comprenons peu de choses, faute d'expériences autres que celle-ci, déjà importante, celle de Jésus ressuscité, se manifestant aux siens dans sa nouvelle forme de vie. Mais enfin, il suffit ! Il y a expérience du miracle.

    4) La foi à son tour entre en mouvement et c'est pour entendre, au-delà de ce message historique sur la « Résurrection » de Jésus-Christ, le message dogmatique de son « exaltation », de sa glorification, de son intronisation à la droite du Père. Loin d'exclure le fait corporel, le fait humain total du miracle de la Résurrection, le mystère de l'exaltation du Christ au rang de Seigneur de l'Univers et de Premier-Né de toutes créatures le suppose. Le fait fonde le dogme, la constatation scientifique achemine vers la foi, le miracle débouche sur le mystère. Inutile d'opposer l'idée au réel quand la vraie foi les tient liés indissolublement. 

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    3.2. Le monde mystérieux de la Résurrection

    La Résurrection de Jésus, devenu Seigneur de l'Univers, est la clef de l'histoire universelle, le signe du salut cosmique. La grande révolution historique est qu'un homme est sorti vivant du tombeau, immortel et glorieux ! Tel est le fait, éclatant et prodigieux qui nous ouvre un monde inconnu et merveilleux.

    Comment cela et pourquoi cela a-t-il pu et dû se faire ?

    La 1ère Épître aux Corinthiens, chapitre 15, traite de la Résurrection de la chair et de son mode, précisément, en opposant le « corps terrestre » au « corps céleste » ou encore le « psychique » au « pneumatique ». Une telle mentalité insiste fortement, exagérément peut-être, sur la réalité du Corps dans sa condition de nature actuelle, fixe, figée, sans modification radicale.

    Cette mentalité est naturelle au vrai chrétien, elle est conforme au réalisme de la foi en Jésus Ressuscité, avant toute réflexion. Elle se fonde sur le fait vrai et assure la continuité de l'humanité du Christ et sa parfaite restauration à travers la mort.

    Il a des propriétés nouvelles et surprenantes. Il passe à travers les murs ? Mais ce n'est pas difficile à concevoir pour un physicien moderne ! Il se rend d'un lieu à un autre en un instant, il paraît et disparaît à volonté ? Cela non plus ne soulève guère de difficulté. C'est lui cependant, dans sa vie ordinaire. Il parle, se laisse toucher ; il mange... Les problèmes commencent là. Mange-t-il par besoin ? Certainement non. Il respire et son cœur bat ? Par nécessité ? Non plus. Saint Paul affirme que le corps ressuscité est incorruptible, glorieux, fort, spirituel (42-44). La « Vie » n'est plus pour lui une incessante « lutte contre la mort ».

    La vie végétative et animale cesse donc. Jésus lui-même disait que, « fils de la résurrection », les élus « seront comme des anges dans le ciel » (Mt 20, 30).

    3.3. Le même Jésus est autre

    Prenons appui sur la doctrine la plus sûre, celle qui tient pour indubitable et principal le fait de la Résurrection, le miracle historique du corps revenu de la mort. Faute de cette affirmation, toute spéculation sur le Christ relèverait de l'imagination, du mythe, de la gnose. Mais nous ne nous laissons pas enfermer dans l'étroitesse de pensée et d'imagination qui souvent l'accompagne. Brisons ce cadre étroit pour embrasser, dans toute son éblouissante richesse, le kérygme du Christ Seigneur de l'Univers. Seul cet élargissement de nos conceptions traditionnelles peut nous mettre en présence du mystère total de l'immense Christ-Jésus, ecclésial et cosmique, objet de nos adorations et de notre dévouement, qui achève en son Corps la construction de son Royaume éternel...

     * 42 - Le Mystère de la Résurrection du Christ

    Jésus de Nazareth, ressuscité, transfiguré

    C'est le roc de notre foi. Jésus est la Personne divine du Verbe Incarné. La chair individuelle qu'il s'est donnée pour corps est personnalisée par son union à la divinité : le Verbe est Jésus de Nazareth, pour toujours. C'est lui, et non un autre, qui est ressuscité, c'est-à-dire sorti du tombeau vivant. Le même, Jésus ressuscité, entre cependant déjà aux yeux de ses Apôtres dans une autre condition. Sa victoire sur la mort lui confère une autre vie, qui ne consiste plus à manger, boire et dormir pour subsister. Il ne retient de la vie corporelle que son intention la plus haute. Ainsi, il n'a pas besoin de manger. Cependant il peut encore le faire et il lui arrive précisément de manger pour se faire reconnaître des siens, leur prouver la réalité de son corps ressuscité, leur donner la joie bien humaine du repas fraternel. Au « ciel », nous pourrons manger ainsi !

    C'est donc le même Jésus de Nazareth dans toute son individualité concrète : son visage, ses stigmates, sa place dans l'histoire, ses relations à son entourage, qui revient pour continuer sa mission d'instauration du Royaume des Cieux. Sa condition nouvelle le libère des servitudes de jadis et lui donne une liberté spirituelle où son corps est l'instrument plus parfait de ses volontés de présence et d'action décuplée. Et tel sera l'état des hommes à la résurrection de la chair, en bien ou en mal.

     * 42 - La Résurrection du Christ

    Jésus transfiguré atteint tous et tout

    Au-delà de son Ascension, Jésus exalté à la droite de Dieu possède toujours sa pleine réalité corporelle, mais nul n'a le droit d'imposer des frontières à son Corps glorieux, des limites à sa puissance d'action. Le même est autre, au-delà de tout ce que nous pouvons imaginer et même concevoir. Sa victoire sur le péché lui a valu une élévation jusqu'aux bornes suprêmes de la nature humaine, et de ces bornes, cette plénitude, nous ne saurions même pas nous en faire une idée.

    Dans son état nouveau, le Corps du Christ reste cet instrument absolu de présence, de relations, d'appropriation, mais porté à une perfection inouïe... S'il entre en communication infiniment ouverte et parfaite avec toute l'humanité et l'univers même, Jésus le fait par son corps glorifié.

    Le Corps Glorieux de Jésus, récompensé de son Sacrifice, a franchi les limites que sa condition terrestre lui imposait et il est en mesure de répondre maintenant à toutes les attentes, les demandes et les impulsions de son Âme. Il est l'instrument parfait de communion avec ces milliers et ces millions d'êtres que son Cœur aime et veut toucher pour se les approprier et les sauver !

    En conservant la certitude de la réalité du Corps individuel de Jésus, il faut cesser de le limiter à son contour anatomique et à son rythme physiologique. De toute son âme, par le moyen infiniment perfectionné de son corps, Il se fait présent partout où les prêtres l'appellent : c'est l'Eucharistie et son ubiquité. Il garde des relations concrètes, vivantes, avec tous ceux qui le prient et qui l'aiment : c'est la formation, à partir de son corps physique, de son corps mystique et sa catholicité. Il se sert de toutes choses et se les approprie pour son usage comme un homme fait de ses habits, sa maison, son domaine : c'est sa seigneurie universelle et la sacramentalité de la matière.

    Ceux qui ne font plus qu'une chair avec Lui par la vie sacramentelle entrent déjà ici-bas dans le mystère de sa Résurrection et ils auront part à sa glorification bienheureuse, entraînant avec eux leur univers familier.

    Tel est le Mystère de la Résurrection. Mystère du corps. Dieu ne s'est nullement repenti de l'Incarnation. Jésus la poursuivra jusqu'à son terme quand, devenu tout en tous, il aura fait par son corps physique de tous les élus son corps mystique et de l'Univers sanctifié son corps cosmique.

    Nous verrons l'accomplissement de ce grand dessein...

    Abbé Georges de Nantes - Extraits de la CRC n° 71, août 1973, p. 3-14

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    4. Conclusions

    4.1. Comment vivre aujourd’hui le Mystère de la Résurrection ?

    Cette tâche n’est pas simple. En effet, la résurrection est le seul mot dont nous ne connaissions rien par définition. Il explose dans un silence qui ne peut s’entendre nulle part si ce n’est en Dieu. Par-là, nous découvrons que la résurrection est une simple affaire de confiance et d’espérance. L’espérance que notre vie se poursuivra ailleurs et autrement.

    Par la Résurrection du Fils de Dieu, nous sommes entrés dans une ère nouvelle, celle de la mort de la mort. La vie est si vivante que c’est la mort qui est devenue mortelle. La mort n’a donc plus d’emprise sur l’être humain, même si nous en ferons encore l’expérience à l’aube de notre vie éternelle. Par l’événement merveilleux de Pâques, dans la foi et dans la confiance, la mort est une traversée, de la vie terrestre à la vie céleste, où nous partagerons la vie de l’Éternel.

    Toutefois, la résurrection n’est pas une promesse pour demain. Elle est une invitation à vivre notre vie dès à présent. Dans le Fils, nous sommes devenus des êtres éternels et l’éternité commence ici-bas. La résurrection opère déjà en nous. Il suffit, pour ce faire, de laisser la Lumière de Dieu entrer en chacune et chacun de nous pour qu’à notre tour, nous puissions enflammer l’humanité entière du feu divin. L’espérance de Pâques s’inscrit dans cette perspective. Les êtres éternels que nous sommes devenus par la Résurrection du Fils, ont reçu une mission dans l’Esprit : embraser le monde par des actes d’amour, des gestes d’amitié, des paroles de tendresse et des regards de douceur. La Pâque du Christ vient nous offrir le don de sa Résurrection, c’est-à-dire l’espérance au-delà de toute espérance.

    Frère Philippe Cochinaux de l’Ordre des Prêcheurs - Site des Ursulines de l’Union romaine

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    4.2. « Il est ressuscité ! »

    « La seule réalité qui nous permettra un jour d'éclairer, de relativiser et de dépasser nos problèmes. » (Olivier Clément). Car évoquer la Résurrection, c'est évoquer l'amour plus fort que la mort. Dans notre monde, la mort triomphe le plus souvent de l'amour. Dans le Christ crucifié, dans le Christ ressuscité, l'amour triomphe toujours de la mort.

    Même à ceux qui l'ignorent ou en méconnaissent le sens, sa Résurrection offre la victoire de la vie totale et pas seulement celle de la fin de la vie terrestre. L'espace du monde déchu, l'espace qui sépare les uns des autres et même de Dieu, l'espace qui nous emprisonne en notre finitude, devient vie infinie dans un mystère que seule la foi nous permet d'approcher.

    Elle nous dit que le monde, même déchu, reste la création de Dieu, Dieu de tendresse et de beauté.

    Par son abaissement volontaire, par son humiliation, par sa mort de maudit, le Christ porte en Lui tout l'enfer de notre condition déchue. Mais l'angoisse, la haine, la séparation sont retournées en vie de lumière par sa plénitude de Fils de Dieu. Il les a assumées dans l'angoisse de Gethsémani et de la croix, dans la haine de ses juges, dans la séparation du Calvaire.

    Par sa Passion, sa Mort et sa Résurrection, Il en a fait des instruments de la transfiguration de notre déchéance, et cela même si nous n'en avons pas toujours conscience.

    La foi en la Résurrection devrait nous faire découvrir ce retournement, cette renaissance, cette communion en la divinité qui nous est accessible, alors que la faute originelle nous avait éloignés de la proximité de Dieu.

    Placer notre vie dans cette lumière de Pâques, c'est métamorphoser notre éloignement en présence. Nous découvrons ainsi que la véritable réalité de notre être et de tout homme est, selon la parole du Christ au soir du Jeudi-Saint, est « d'être sanctifiés par la Vérité » (Jean 17. 17 à 21).

    Dans le Christ ressuscité, je suis fondamentalement reconnu pour ce que je suis. Joie immense d'être pardonné, aimé, recréé. Emerveillement qui me libère, qui nous libère, par-delà les contraintes de notre monde de techniques rigides.

    C'est la fête de la vie, que chante la liturgie pascale, c'est la fête de la joie dont Dieu comble ses enfants comme il en a comblé le Christ. « La nuit même est lumière pour ma joie ... Nuit où le ciel s'unit à la terre, où l'homme rencontre Dieu ! » (Préface du feu nouveau dans la nuit pascale).

    Nous ne contemplerons jamais assez ce mystère. Nous n'en vivrons jamais assez l'enthousiasme qu'il doit susciter en nous (Jean 16. 22 à 24). Nous n'en vivrons jamais assez l'espérance et la certitude de cet amour.

    Jacques Fournier – Site « Vivre la foi.cef.fr »

    Synthèse de recherches mise en page par le Frère André, Chevalier de la Sainte-Croix de Jérusalem

    Références :

    https://croire.la-croix.com/Definitions/Lexique/Resurrection/Le-mystere-de-la-resurrection-de-Jesus

    https://www.catholique-nancy.fr/pres-de-chez-vous/etre-accueilli-en-paroisse/paroisses/pays-haut/la-divine-providence/actualites/la-resurrection-ce-mystere

    https://crc-resurrection.org/toute-notre-doctrine/renaissance-catholique/theologie-kerygmatique/le-mystere-de-la-resurrection.html

    https://ursulines.union.romaine.catholique.fr/Mystere-de-la-resurrection

    http://www.vivrelafoi.cef.fr/tps_dieu/p_mystresurrection.php


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