• * La Pierre d'angle

    231008 – Liturgie du dimanche 8 octobre 2023

     La pierre d’angle 

    27ème dimanche du temps ordinaire

     * La Pierre d'angle

    Introduction :

    La pierre angulaire d'un édifice architectural n'est autre qu'une pierre qui fait l'angle. Le terme est utilisé dans une symbolique de construction, par une métaphore biblique qui en fait une pierre qui serait la pierre maîtresse de l'édifice, et qui devrait soutenir la bâtisse.

    La pierre d'angle se dégage des Évangiles. Jésus est considéré comme l’élément fondamental de la fondation de l’Église chrétienne. Il est la Pierre d'Angle qui nous donne de vivre le passage de notre état mortel à celui de l'Éternité.

    Groupe Siloé, source de Lumière

    Un appel à la coresponsabilité

    Le vigneron aime sa vigne et il fait beaucoup pour qu’elle donne de bons fruits. C’est l’attitude du Seigneur pour le peuple élu et pour nous. Mais il ne fait pas tout : il confie les vendanges à des serviteurs et s’attend à ce qu’ils soient responsables et honnêtes.

    Vie liturgique, revue de pastorale liturgique publiée par Novalis

    Entre espoir et déception : Dieu et sa vigne

    « La vigne du Seigneur de l’univers, c’est la maison d’Israël ». Malgré tout ce que Dieu a fait pour elle, elle n’a produit que de mauvais fruits. Dieu réitère ses attentes les plus chères : qu’elle produise enfin les fruits du droit et de la justice !

    La Croix – Questions de vie – Questions de foi

     * La Pierre d'angle

    Le Seigneur est déçu par sa vigne bien-aimée.

    1ère lecture : « La vigne du Seigneur de l’univers, c’est la maison d’Israël » (Is 5, 1-7)

    Lecture du Livre d'Isaïe (Is 5, 1-7)

    Je chanterai pour mon ami le chant du bien-aimé à sa vigne.

    Mon ami avait une vigne sur un coteau plantureux. Il en retourna la terre et en retira les pierres, pour y mettre un plant de qualité. Au milieu, il bâtit une tour de garde et creusa aussi un pressoir. Il en attendait de beaux raisins, mais elle en donna de mauvais.

    Et maintenant, habitants de Jérusalem, hommes de Juda, soyez donc juges entre moi et ma vigne ! Pouvais-je faire pour ma vigne plus que je n'ai fait ? J'attendais de beaux raisins, pourquoi en a-t-elle donné de mauvais ? Eh bien, je vais vous apprendre ce que je vais faire de ma vigne : enlever sa clôture pour qu'elle soit dévorée par les animaux, ouvrir une brèche dans son mur pour qu'elle soit piétinée. J'en ferai une pente désolée ; elle ne sera ni taillée ni sarclée, il y poussera des épines et des ronces ; j'interdirai aux nuages d'y faire tomber la pluie.

    La vigne du Seigneur de l'univers, c'est la maison d'Israël. Le plant qu'il chérissait, ce sont les hommes de Juda. Il en attendait le droit, et voici l'iniquité ; il en attendait la justice, et voici les cris de détresse.

    – Parole du Seigneur –

    Texte fourni par l’Association Épiscopale Liturgique pour les pays francophones

     * La Pierre d'angle

    Commentaire 1 a :

    Une parabole touchante illustre les soins de l'Éternel envers son peuple. Israël est la vigne du bien-aimé de Dieu. Plantée, puis aménagée et entretenue avec la plus tendre sollicitude, elle n'a en définitive produit que du raisin sauvage, immangeable et sans valeur. Dans sa parabole des méchants cultivateurs, le Seigneur exprimera la déception totale éprouvée dans sa vigne d'Israël, par le Bien-aimé qui avait tous les droits sur elle (Luc 20:9-16 lc 20.9-19).

    Mais ces versets nous font aussi toucher du doigt notre propre ingratitude. C'est comme si le Seigneur, après nous avoir fait faire le compte de toutes les grâces reçues depuis notre enfance, demandait avec tristesse à l'un ou l'autre d'entre nous : « Qu'y avait-il encore à faire pour toi que je n'aie pas fait ? N'étais-je pas en droit d'attendre quelque bon fruit de ta part ? Et pourtant tu n'as rien produit pour moi ! »

    Nous connaissons le moyen de porter du fruit. C'est de rester attachés au «vrai cep». Maintenant qu'Israël, vigne improductive, a été ôtée, Christ est devenu ce vrai cep et son Père en est le cultivateur (Jean 15:1… j 15.1-8).

    Au v. 8, Isaïe commence une série de « malheurs… ». Ils nous montrent les tristes conséquences du refus d'obéir à Dieu, tant pour Israël que pour l'homme en général.

    Commentaire extrait de « BibleEnLigne.com »

     * La Pierre d'angle

    Commentaire 1 b :

    Cela commence comme une chanson de vendanges : « Je chanterai pour mon ami le chant du bien-aimé à sa vigne. Mon ami avait une vigne sur un coteau plantureux. Il en retourna la terre et en retira les pierres, pour y mettre un plant de qualité ».

    La vigne, en Israël, est chose précieuse ! Entendons-nous bien, quand on pense à la vigne, il ne s'agit pas d'un seul pied, mais d'un carré de vigne : ce qui veut dire déjà un lopin de terre bien à soi. Puisqu'elle exige des soins constants, elle signifie culture, installation. Tout le monde se souvient de Noé, le premier vigneron. La vigne est le premier arbre cultivé, premier signe de civilisation après le déluge : Gn 9, 20-22. Cela veut dire aussi période de paix, où l'on est assuré de pouvoir travailler sa terre encore le lendemain.

    Pendant toute la traversée du désert, évidemment, il ne sera plus question de vigne et c'est l'un des reproches que l'on fait à Moïse, justement, quand on perd le moral : « Pourquoi nous avez-vous fait monter d'Égypte et nous avez-vous amenés en ce triste lieu ? Ce n'est pas un lieu pour les semailles ni pour le figuier, la vigne ou le grenadier ; il n'y a même pas d'eau à boire » (Nb 20, 5).

    A l'inverse, lorsque Moïse organisa une première mission de reconnaissance dans la terre de Canaan que Dieu lui avait promise, les explorateurs furent aussitôt impressionnés par la richesse des vignobles. C'était la saison des premiers raisins. « Ils arrivèrent jusqu'à la vallée d'Eshkol (au Nord d'Hébron) où ils coupèrent une branche de vigne avec une grappe de raisin qu'ils portèrent à deux au moyen d'une perche. Ils y prirent aussi des grenades et des figues ». (Nb 13, 23). Désormais, quand on veut parler d'une période de bonheur et de prospérité, on dit « Juda et Israël habitèrent en paix, chacun sous sa vigne et sous son figuier, pendant toute la vie du roi Salomon » (1 R 5, 5). De même, quand on parle du règne de Dieu dans l'avenir, le règne de la paix et de la justice, on dit : « On ne brandira plus l'épée nation contre nation, on n'apprendra plus à se battre. Ils demeureront chacun sous sa vigne et sous son figuier » (Mi 4, 4).

    Le prophète Isaïe a donc peut-être bien repris quelques phrases d'une mélodie connue pour amorcer son propos. Mais ses auditeurs ne s'y tromperont pas, il ne s'agit pas d'une simple chanson de vendanges ! Ce qu'il leur propose, c'est une véritable parabole et comme dans toute parabole, il faut aller jusqu'au bout pour en tirer la leçon. Ici d'ailleurs, c'est le prophète lui-même qui déchiffre la parabole. « La vigne du Seigneur de l'univers, c'est la maison d'Israël. Le plan qu'il chérissait, ce sont les hommes de Juda ». Quant aux fruits, Isaïe est tout aussi clair : le bon raisin attendu, c'est le droit et la justice. Le mauvais raisin, c'est ce qu'il appelle « l'iniquité, et les cris de détresse ». Dans la suite de ce chapitre, il précise ses reproches : «Malheur ! Ceux-ci joignent maison à maison, champ à champ, jusqu'à prendre toute la place et à demeurer seuls au milieu du pays»... C'est la recherche égoïste de l'argent et de la propriété qui est visée ici. Et cette insouciance des riches pour le malheur des pauvres qui caractérise souvent les périodes prospères : « Levés de bon matin, ils courent après les boissons fortes, et jusque tard dans la soirée, ils s'échauffent avec le vin. La harpe et la lyre, le tambourin et la flûte accompagnent leurs beuveries, mais ils ne regardent pas ce que fait le Seigneur et ne voient pas ce que ses mains accomplissent » (Is 5, 8-12).

    Il y a pire encore, c'est la perversion de la justice : « Malheur ! Ils déclarent BIEN le mal et MAL le bien. Ils font de l'obscurité la lumière et de la lumière l'obscurité. Ils font passer pour amer ce qui est doux et pour doux ce qui est amer... Ils justifient le coupable pour un présent (autrement dit, les juges se font acheter) et ils refusent à l'innocent sa justification » (Is 5, 20).

    Que fait le vigneron mal récompensé de ses efforts ? Il finit par admettre que la terre est trop mauvaise et il abandonne l'entreprise. Le beau carré bien ordonnancé sera vite redevenu un terrain vague où pousseront des épines et des ronces, comme dit Isaïe. Un peu plus loin, il reprend la même expression : « Il adviendra, en ce jour-là, que tout lieu où il y avait mille ceps de vigne, valant mille pièces d'argent, deviendra épines et ronces. On y viendra avec des flèches et un arc, car tout le pays deviendra épines et ronces ». (Isaïe 7, 23-24). Si bien qu'on ne peut pas s'empêcher de penser aux épines et aux chardons qui envahissent le sol après la faute d'Adam. (Gn 3, 18).

    C'est toujours la même leçon : dès qu'on s'éloigne de la fidélité aux commandements, on fait fausse route et le peuple créé pour que tous ses membres soient heureux et libres, devient le règne de tous les égoïsmes et de tous les vices. Et cela se termine toujours mal. Tout comme un beau carré de vigne laissé à l'abandon devient la proie des bêtes sauvages.

    Ce qui est troublant, une fois de plus, dans ce message du prophète c'est qu'Isaïe attribue à Dieu lui-même l'exercice du châtiment : le vigneron de la parabole d'Isaïe ne se contente pas de laisser faire le cours des choses. C'est lui-même qui enlève la clôture et ouvre une brèche dans le mur pour que la vigne soit piétinée et dévorée par les animaux... En réalité, comme dimanche dernier, avec le prophète Ezéchiel, nous sommes à une étape de la pédagogie de Dieu. Avec Isaïe, nous sommes même avant Ezéchiel, donc à une époque où l'on dit volontiers que Dieu punit nos mauvaises actions. A une époque surtout où on n'est pas débarrassé de l'idolâtrie : et donc pour le prophète, il s'agit avant tout d'affirmer qu'il n'existe qu'une puissance au monde. Aucune autre divinité n'est à craindre. Dans tout ce qui nous arrive, c'est vers le Dieu d'Israël qu'il faut se tourner. Lui, le Saint d'Israël, est totalement étranger à toutes les bassesses et les injustices des hommes. Ceux-ci n'ont donc aucune chance de survie s'ils ne changent pas de vie.

    Là Isaïe fait la grosse voix, pourrait-on dire, mais n'oublions pas que le même Isaïe, plus tard, quand il faudra remonter le moral des troupes, reprendra son chant de la vigne avec d'autres couplets : « Ce jour-là chantez la vigne délicieuse. Moi, le Seigneur, j'en suis le gardien, à intervalles réguliers je l'arrose. De peur qu'on y fasse irruption, je la garde nuit et jour. Je ne suis plus en colère... » (Is 27, 2-4a).

    Notre chance à nous, deux mille cinq cents ans plus tard, c'est de savoir que Dieu n'est jamais en colère !

    Complément :

    En Israël, la métaphore de la vigne va très loin : le pressoir est présenté comme une image du jugement.

    Commentaires de Marie-Noëlle Thabut

     * La Pierre d'angle

    Psaume : 79, 9-10, 13-14, 15-16a, 19-20

    R/ La vigne du Seigneur de l’univers, c’est la maison d’Israël.

    La vigne que tu as prise à l’Égypte, tu la replantes en chassant des nations.
    Elle étendait ses sarments jusqu’à la mer, et ses rejets, jusqu’au Fleuve.

    Pourquoi as-tu percé sa clôture ? Tous les passants y grappillent en chemin ;

    le sanglier des forêts la ravage et les bêtes des champs la broutent.

    Dieu de l’univers, reviens ! Du haut des cieux, regarde et vois : visite cette vigne, protège-la, celle qu’a plantée ta main puissante.

    Jamais plus nous n’irons loin de toi : fais-nous vivre et invoquer ton nom !
    Seigneur, Dieu de l’univers, fais-nous revenir ; que ton visage s’éclaire, et nous serons sauvés.

    Texte fourni par l’Association Épiscopale Liturgique pour les pays francophones

     * La Pierre d'angle

    Commentaire 2 :

    Pour qui a entendu le chant de la vigne d'Isaïe, dans la première lecture, ce psaume en est l'écho parfait. Le thème est le même : Israël est comparé à une vigne dont Dieu est le vigneron. Celui-ci a fait pour sa vigne tout ce qu'un vigneron peut faire. Il l'a soignée, protégée, gardée... hélas, la vigne n'a rien donné : « Mon ami avait une vigne sur un coteau plantureux. Il en retourna la terre et en retira les pierres, pour y mettre un plant de qualité. Au milieu, il bâtit une tour de garde et creusa aussi un pressoir. Il en attendait de beaux raisins, mais elle en donna de mauvais » (Is 5, 1-2).

    On connaît la fin de la chanson : le vigneron se met en colère : « Je vais vous apprendre ce que je vais faire de ma vigne : enlever sa clôture pour qu'elle soit dévorée par les animaux, ouvrir une brèche dans son mur pour qu'elle soit piétinée. J'en ferai une pente désolée ; elle ne sera ni taillée ni sarclée, il y poussera des épines et des ronces ; j'interdirai aux nuages d'y faire tomber la pluie » (Is 5, 5-6).

    Apparemment, si l'on en croit le psaume 79/80, le vigneron a mis ses menaces à exécution : visiblement aussi la métaphore de la vigne était parfaitement comprise quand on chantait ce psaume au Temple de Jérusalem, car les malheurs d'Israël sont exprimés avec les mêmes images. Par exemple, on dit à Dieu : « Pourquoi as-tu percé sa clôture ? Tous les passants y grappillent en chemin ; le sanglier des forêts la ravage et les bêtes des champs la broutent ». Traduisez, nous sommes en période d'occupation étrangère. Les bêtes féroces, ce sont les ennemis du moment. Dans un autre verset, on dit encore « La voici détruite, incendiée » et aussi : « Tu fais de nous la cible des voisins : nos ennemis ont vraiment de quoi rire ! ».

    De quels ennemis s'agit-il précisément ? On ne peut pas le dire. Malheureusement, toutes les guerres et toutes les occupations étrangères, où que ce soit à la surface du globe, apportent avec elles le même cortège d'atrocités et de malheur. Une autre phrase dit encore : « Vas-tu longtemps encore opposer ta colère aux prières de ton peuple, le nourrir du pain de ses larmes, l'abreuver de larmes sans mesure ? » Cela ne suffit pas pour situer les circonstances concrètes qui ont inspiré cette supplication. Il est donc impossible de savoir quand ce psaume a été écrit. Est-ce au moment où la grande puissance assyrienne envahissait toute la région, en commençant par le royaume du Nord ? Cela nous reporterait bien avant l'Exil à Babylone, entre le neuvième et le septième siècle av. J.C. (puisque la capitale du royaume du Nord, Samarie, a été écrasée en 721). Est-ce bien plus tard, après la prise de Jérusalem par Babylone, c'est-à-dire au sixième siècle ? Et il y a encore d'autres hypothèses possibles. De toutes manières, quelles que soient les circonstances concrètes dans lesquelles est né ce psaume, le peuple d'Israël a pu le redire à nouveau à plusieurs reprises. (Et, aujourd'hui, à la surface du globe, nous connaissons plusieurs peuples qui pourraient le réinventer pour leur propre compte).

    Lorsqu'on lit ce psaume en entier, il se présente comme un cantique composé de quatre couplets et quatre refrains. Les couplets disent l'histoire d'Israël : vigne choisie par Dieu, et prise à l'Égypte. Autrement dit le peuple que Dieu s'est choisi, qu'il a rassemblé, libéré de l'esclavage en Égypte et fait entrer dans la Terre Promise : « La vigne que tu as prise à l'Égypte, tu la replantes en chassant des nations. Tu déblaies le sol devant elle, tu l'enracines pour qu'elle emplisse le pays »... Et maintenant c'est la désolation, le pain des larmes.

    Le refrain c'est la phrase : « Dieu de l'univers, fais-nous revenir ; que ton visage s'éclaire et nous serons sauvés ». L'expression « fais-nous revenir » est typique des célébrations pénitentielles : le mot « revenir » signifie « se convertir », faire demi-tour. Car on sait bien que si la vigne a donné de mauvais fruits, ce n'est pas de la faute du vigneron. Les prophètes l'avaient assez dit, Isaïe entre autres ! Les bons fruits que Dieu attendait, c'était le droit et la justice. Comme le dit Michée dans une phrase superbe : « On t'a fait savoir, ô homme, ce qui est bien, ce que le Seigneur attend de toi : rien d'autre que de respecter le droit, aimer la fidélité et marcher humblement avec ton Dieu » (Mi 6, 8). Ils avaient beau être prévenus, les croyants, libérés par le Dieu qui veut l'homme libre, ils ont pourtant écrasé le pauvre et réduit le frère à l'esclavage. Ils n'ont pas cultivé la justice, ils ont cultivé la richesse égoïste.

    Le refrain est donc une demande de pardon. Ce qui est remarquable, c'est que la formule oscille entre « Dieu de l'univers, reviens ! » et « Dieu de l'univers, fais-nous revenir ! » Quand on supplie Dieu de revenir en disant « Dieu, reviens », on sous-entend « reviens nous sauver » : évidemment, on sait bien qu'il ne s'est pas éloigné. Mais c'est un appel au secours. La deuxième formule « Dieu de l'univers, fais-nous revenir » dit bien que la conversion est à la fois œuvre de Dieu et œuvre de l'homme, c'est le demi-tour de l'homme retourné par l'Esprit de Dieu.

    On peut être heurté dans ce psaume par l'image qu'il nous donne d'un Dieu qui punit : ici, comme dans le texte d'Isaïe, c'est bien le vigneron qui a volontairement livré la vigne aux bêtes sauvages. Mais il faut se rappeler que la découverte de Dieu est progressive au long de l'histoire biblique et que ce psaume reflète l'état de la réflexion théologique à l'époque où il a été écrit : à cette époque-là, on considère que tout vient de Dieu. Si on lui attribue le bonheur, il faut bien lui attribuer aussi le malheur. Le Livre de Job en est encore là : « Le Seigneur a donné, le Seigneur a ôté ; que le nom du Seigneur soit béni ! » (Job 1, 21)... « Nous acceptons le bonheur comme un don de Dieu. Et le malheur, pourquoi ne l'accepterions-nous pas aussi ? » (Job 2, 10). Ce n'est que très tardivement dans l'histoire de l'Ancien Testament que cette conception sera abandonnée1.

    1 Le milieu du Livre de Job reflète un état plus tardif de la réflexion d'Israël et l'abandon de la logique de punition (nos malheurs seraient des châtiments) ; mais on n'a pas encore, même à cette étape, abandonné l'idée que Dieu commande tous nos bonheurs et tous nos malheurs.

    Il a fallu encore bien des siècles pour découvrir que Dieu respecte tellement la liberté humaine qu'il ne tire pas toutes les ficelles de l'histoire !

    Commentaires de Marie-Noëlle Thabut

     * La Pierre d'angle

    Dieu donne sa paix à ceux qui sont fidèles.

    Épître : « Mettez cela en pratique. Et le Dieu de la paix sera avec vous » (Ph 4, 6-9)

    Lecture de la Lettre de saint Paul Apôtre aux Philippiens (Ph 4, 6-9)

    Frères, ne soyez inquiets de rien, mais, en toute circonstance, dans l'action de grâce priez et suppliez pour faire connaître à Dieu vos demandes. Et la paix de Dieu, qui dépasse tout ce qu'on peut imaginer, gardera votre cœur et votre intelligence dans le Christ Jésus.

    Enfin, mes frères, tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est juste et pur, tout ce qui est digne d'être aimé et honoré, tout ce qui s'appelle vertu et qui mérite des éloges, tout cela, prenez-le à votre compte. Ce que vous avez appris et reçu, ce que vous avez vu et entendu de moi, mettez-le en pratique. Et le Dieu de la paix sera avec vous.

    – Parole du Seigneur –

    Texte fourni par l’Association Épiscopale Liturgique pour les pays francophones

     * La Pierre d'angle

    Commentaire 3 a :

    Le Seigneur est proche, ce sont les derniers mots du verset précédent (non cité notre dimanche). Ces mots sont importants, car ils éclairent ce Ne soyez inquiets de rien. Oui, le Seigneur est proche de nous. Tout l'Ancien Testament souligne cette proximité constante de Dieu, même au sein des multiples moments de peur de son peuple. Et le Nouveau Testament nous dit que, en Jésus, le Royaume de Dieu est présent au milieu de vous (Luc 17,21). On dit que ce n'ayez pas peur se trouve 365 fois dans la Bible ! Une façon imagée de dire que Dieu nous réconforte tous les jours.

    Pas de peur, pas de crainte, pas d'inquiétude ! Dans l'Évangile de Mathieu : Ne vous inquiétez donc pas pour le lendemain : le lendemain s’inquiétera de lui-même. A chaque jour suffit sa peine (Mt 6,25-34). Ce n'est pas de l'insouciance, mais de la confiance, de l'abandon au Seigneur. Pas facile parfois à vivre ! Le Seigneur nous a déjà tout donné, il nous a enveloppés de tout le nécessaire, nous n'avons plus qu'à nous servir ! Et ma prière sera alors un ensemble mêlé d'actions de grâces et de mercis, de demandes et de supplications, pour moi et pour d'autres : en toute circonstance, priez et suppliez, tout en rendant grâce… Nous sommes dans les « derniers temps » depuis Jésus, les temps actuels d'une présence de Dieu Père, en Jésus incarné et vivant en nous par leur Esprit commun. En toute circonstance, toujours, en peine et en joie.

    Le fruit de tout cela s'appellera la paix de Dieu. Paul encadre une partie de son texte par la mention deux fois de cette paix. Cette paix, c'est une sorte de sérénité plongeant en Dieu dont Paul donne quelques contours : vérité, noblesse, justesse, pureté, dignité, vertu…

    Paul ajoute qu'il a voulu apporter tout cela à ses fidèles de Philippes : ce que vous avez vu et entendu de moi. Et il lance un vigoureux « Mettez-le en pratique ». Paul est en train de terminer sa lettre à ses Philippiens. Ce qu'il leur a dit vise souvent leur vie communautaire (dimanche dernier, nous avons lu ceci : « Ayez les mêmes dispositions, le même amour, les mêmes sentiments ; recherchez l’unité »).

    J'essaie de m'approprier la lecture, de me pénétrer de son sens, de m'en nourrir. Je sais que j'y contemple le Seigneur qui me parle dans les mots de l'apôtre. Comment cette Parole de Dieu résonne-t-elle concrètement en moi ? Qu'est-ce que je vais en dire au Seigneur dans la grâce de cette Parole ? Comment vais-je vivre dans la grâce de cette Parole ?

    Les autres textes de ce dimanche présentent le peuple de Dieu sous l'image de la vigne. Une vigne souvent bousculée par l'infidélité, qui n'a pas toujours donné de beaux et bons fruits, qui a même persécuté ses serviteurs les plus fidèles, et en particulier, Jésus le Fils bien-aimé du Père propriétaire de la vigne. Paul m'invite à l'espérance malgré tout cela : Ne soyez inquiets de rien. Notre monde pourtant est source d'angoisse et ma vie personnelle n'est pas toujours à la hauteur. Seigneur, tu sais ce dont le monde a besoin, ce dont j'ai besoin. Mais je te le dis, je te le demande, je t'en remercie. Car ma prière ouvre mon cœur à tout recevoir, de Toi, à faire fructifier ce que Tu me donnes dans ta vigne.

    Commentaires publiés le 6 octobre 2017 par Paul C. – Paroisse Colomiers

     * La Pierre d'angle

    Commentaire 3 b :

    « Ne soyez inquiets de rien », dit Paul et nous avons envie de lui répondre que ce n'est pas toujours facile ! Mais il faut relire le verset précédent : « Le Seigneur est proche ». Voilà pour Paul la meilleure, et même la seule raison de rester sereins, quoi qu'il arrive. Derrière cette petite phrase (« Le Seigneur est proche »), il me semble qu'on peut entendre deux choses :

    • Premièrement, le Seigneur est proche de nous, cela on le sait depuis bien longtemps en Israël, depuis l'épisode du buisson ardent : Dieu est proche de nous parce qu'il nous aime.
    • Deuxièmement, le Seigneur est proche parce que les temps sont accomplis, parce que le Royaume de Dieu est déjà inauguré et que nous sommes dans les derniers temps. On connaît cette autre phrase de Paul, empruntée au vocabulaire nautique : « Le temps a cargué ses voiles » : comme un bateau près d'entrer au port replie ses voiles (c'est le sens du mot « carguer »), de la même façon, l'histoire humaine est tout près du port. Pierre dit de la même manière « La fin de toutes choses est proche ».

    Etre croyant, c'est être tendu vers cet accomplissement de l'histoire. Non seulement le Royaume s'est approché de nous en Jésus-Christ, (parce que le Royaume, c'est Jésus-Christ présent en tous) mais mieux encore, il nous attire comme un aimant. Rappelez-vous cette autre phrase de Paul : « Mon seul souci : oubliant le chemin parcouru et tout tendu en avant, je m'élance vers le but, en vue du prix attaché à l'appel d'en-haut que Dieu nous adresse en Jésus-Christ » (Phi 3, 13-14). Et je crois bien que quand Paul dit « imitez-moi », c'est de cela qu'il parle. Il veut dire : courez avec moi vers le même but.

    Le reste du texte en découle : puisque le Seigneur est proche, nous ne sommes inquiétés par rien. « Notre cité à nous est dans les cieux, d'où nous attendons comme sauveur le Seigneur Jésus-Christ » (Phi 3, 20). On croit entendre ici l'écho de cette parole si fréquente de Jésus « Pourquoi craignez-vous, hommes de peu de foi ? » Ou encore cette superbe leçon sur la prière chez saint Matthieu : « Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps de quoi vous le vêtirez. La vie n'est-elle pas plus que la nourriture, et le corps plus que le vêtement ?... Ne vous inquiétez pas en disant : Qu'allons-nous manger ? Qu'allons-nous boire ? De quoi allons-nous nous vêtir ? Tout cela les païens le recherchent sans répit -, il sait bien, votre Père céleste, que vous avez besoin de toutes ces choses. Cherchez d'abord le royaume et la justice de Dieu, et tout cela vous sera donné par surcroît. Ne vous inquiétez donc pas pour le lendemain : le lendemain s'inquiétera de lui-même. A chaque jour suffit sa peine » (Mt 6, 25-34).

    Ce n'est pas de l'insouciance, c'est de la confiance, de la sérénité. « Ne soyez inquiets de rien »... puisque tout est déjà donné, il n'y a qu'à puiser : nous n'avons qu'à nous laisser emporter dans le torrent de la grâce. « Je vous le déclare : tout ce que vous demandez en priant, croyez que vous l'avez reçu et cela vous sera accordé » (Mc 11, 24). Prier, au fond, c'est se plonger dans le don de Dieu.

    Alors nous comprenons pourquoi, dans la prière, supplication et action de grâce sont toujours liées. C'est une caractéristique de la prière juive qui dit toujours en même temps « Tu es béni, Seigneur, toi qui nous donnes... s'il te plaît, donne-nous ». C'est logique d'ailleurs : si l'on prie Dieu c'est parce qu'on sait qu'il peut et qu'il veut notre bonheur... et qu'il y travaille sans cesse. Lui demander quelque chose, c'est, implicitement au moins, lui rendre grâce. D'ailleurs, dans le début de cette lettre aux Philippiens, Paul nous en donne l'exemple : « Je rends grâces à mon Dieu chaque fois que j'évoque votre souvenir ; toujours, en chaque prière pour vous tous, c'est avec joie que je prie ... » (1, 3). Ici, il nous dit : « Frères, ne soyez inquiets de rien, mais, en toute circonstance, dans l'action de grâce, priez et suppliez pour faire connaître à Dieu vos demandes ».

    Mais, comme disait Jésus, « il ne suffit pas de dire Seigneur, Seigneur, il faut encore faire la volonté du Père ». Paul fait la même recommandation : « tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est juste et pur... mettez-le en pratique ». Il attache certainement une grande importance à cette pratique d'une vie droite puisqu'il la met exactement en parallèle avec la prière. Il commence par parler de la prière et il conclut « la paix de Dieu, qui dépasse tout ce qu'on peut imaginer, gardera votre cœur et votre intelligence dans le Christ Jésus ». Puis il parle du comportement des chrétiens pour terminer par la phrase « le Dieu de la paix sera avec vous ». Il me semble que ce parallélisme, certainement voulu, signifie qu'aux yeux de Paul, prière rime avec vie communautaire. En cela, d'ailleurs, il ne fait que reprendre la prédication des prophètes de l'Ancien Testament.

    Pour revenir au Nouveau Testament, dans l'Évangile de Marc, Jésus poursuit sa phrase sur la prière (citée plus haut) en la liant aussitôt à l'attitude envers les frères « quand vous êtes debout en prière, si vous avez quelque chose contre quelqu'un, pardonnez... ». Et saint Pierre fait les mêmes rapprochements : « La fin de toutes choses est proche. Montrez donc de la sagesse et soyez sobres afin de pouvoir prier. Ayez avant tout un amour constant les uns pour les autres » (1 Pi 4, 7-8).

    A en croire Paul, la paix est donc au bout de ce chemin où vie de prière et valeurs communautaires marchent de pair : « Ne soyez inquiets de rien... dans l'action de grâce, priez et suppliez pour faire connaître à Dieu vos demandes... et la paix de Dieu gardera votre cœur et votre intelligence »... « tout ce qui est vrai et noble, tout ce qui est juste et pur... mettez-le en pratique et le Dieu de la paix sera avec vous ».

    Si nous prenons au sérieux cette insistance des Écritures sur le lien nécessaire entre la prière et l'amour fraternel, il y a là sans aucun doute une leçon pour nous : non seulement nos inquiétudes nous font oublier que Dieu nous aime, mais elles nous ferment le cœur... Si nous nous préoccupions moins de notre pain du lendemain, il y aurait du pain aujourd'hui pour beaucoup d'autres.

    Commentaires de Marie-Noëlle Thabut

    Alléluia. Alléluia.
    C’est moi qui vous ai choisis,
    afin que vous alliez, que vous portiez du fruit,
    et que votre fruit demeure, dit le Seigneur.
    Alléluia.

     * La Pierre d'angle

    Parabole des vignerons meurtriers

    Évangile : « Il louera la vigne à d’autres vignerons ».

    Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu (Mt 21, 33-43)

    Jésus disait aux chefs des prêtres et aux pharisiens : « Écoutez une autre parabole : Un homme était propriétaire d'un domaine ; il planta une vigne, l'entoura d'une clôture, y creusa un pressoir et y bâtit une tour de garde. Puis il la donna en fermage à des vignerons, et partit en voyage. Quand arriva le moment de la vendange, il envoya ses serviteurs auprès des vignerons pour se faire remettre le produit de la vigne. Mais les vignerons se saisirent des serviteurs, frappèrent l'un, tuèrent l'autre, lapidèrent le troisième. De nouveau, le propriétaire envoya d'autres serviteurs plus nombreux que les premiers ; mais ils furent traités de la même façon. Finalement, il leur envoya son fils, en se disant : ‘’Ils respecteront mon fils’’. Mais, voyant le fils, les vignerons se dirent entre eux : ‘’Voici l'héritier : allons-y ! Tuons-le, nous aurons l'héritage !’’ Ils se saisirent de lui, le jetèrent hors de la vigne et le tuèrent. Eh bien, quand le maître de la vigne viendra, que fera-t-il à ces vignerons ? ».

    On lui répond : « Ces misérables, il les fera périr misérablement. Il donnera la vigne en fermage à d'autres vignerons, qui en remettront le produit en temps voulu ».

    Jésus leur dit : « N'avez-vous jamais lu dans les Écritures : La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre angulaire. C'est là l'œuvre du Seigneur, une merveille sous nos yeux ! Aussi, je vous le dis : Le royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à un peuple qui lui fera produire son fruit ».

    – Acclamons la Parole de Dieu –

    Texte fourni par l’Association Épiscopale Liturgique pour les pays francophones

     * La Pierre d'angle

    Commentaire 4 a :

    Voilà un texte dur, un texte où notre première réaction est de juger ces pharisiens qui veulent tuer Jésus. Cependant ce texte s’adresse aussi à nous, car lorsque nous péchons, lorsque nous faisons du mal aux autres c’est à Jésus que nous faisons mal aussi !

    Certes les pharisiens ont, en leur temps, condamné Jésus, et ils ont pensé être les plus forts. Cependant ils se sont trompés car Jésus, en fait, leur a offert sa vie, par amour ... il nous l'a offerte aussi. Les pharisiens ne l'ont pas compris et n'ont pas su recevoir ce cadeau merveilleux de Dieu. Mais nous aussi, avec nos péchés, avec nos refus de conversion, nous faisons la même chose que les pharisiens ! 

    Jésus est ce Fils que le Père nous envoie ! Allons-nous, nous aussi, le rejeter et continuer à le faire souffrir par nos refus, nos rejets, nos révoltes…

    Jésus nous appelle aujourd’hui à le contempler dans son offrande d’amour pour nous, il nous appelle à recevoir pleinement, de tout notre cœur : « l'œuvre du Seigneur, une merveille sous nos yeux ».  Et contempler, c’est le premier pas pour accepter, pour aimer et pour nous offrir nous-mêmes à l’amour de Dieu au travers de tous les gestes de notre vie.

    Voulons-nous vraiment recevoir Jésus comme notre Seigneur ? Notre sauveur ? Et vivre avec lui chaque jour de notre vie ?

    Commentaires de Myriam de Gemma – Passionistes de Polynésie – Octobre 2014

     * La Pierre d'angle

    Commentaire 4 b :

    On reconnaît tout de suite dans cette parabole de Jésus les emprunts qu'il fait au chant de la vigne d'Isaïe : « Un homme était propriétaire d'un domaine ; il planta une vigne, l'entoura d'une clôture, y creusa un pressoir et y bâtit une tour de garde ». Le propriétaire entoure sa vigne des mêmes soins que le vigneron d'Isaïe. Mais les similitudes s'arrêtent là. Dans l'Évangile, la parabole prend un tour nouveau et propose donc une leçon nouvelle.

    Chez Isaïe, le propriétaire est en même temps le vigneron. La vigne représente le peuple d'Israël, une vigne entourée de soins, mais décevante et qui ne donnait que des mauvais fruits.

    Dans la parabole de Jésus, le propriétaire n'est pas le vigneron, il n'exploite pas directement sa vigne, il la confie à d'autres vignerons. Ecoutons saint Matthieu : « Il la donna en fermage à des vignerons et partit en voyage ». Quant à savoir qui est la vigne, et qui sont les vignerons, ce n'est pas clair. De deux choses l'une : première hypothèse, la vigne représente Israël, comme chez Isaïe, et les vignerons sont les chefs des prêtres et les pharisiens. Ils avaient la charge de la vigne, le peuple d'Israël, et ils l'ont mal guidé puisqu'ils ont maltraité tous les prophètes et, en définitive, ils sont en train de rejeter le Fils Bien-Aimé du Père.

    Deuxième hypothèse, la vigne représente le Royaume de Dieu et les vignerons, c'est le peuple d'Israël tout entier, qui en avait reçu la charge. C'est cette deuxième hypothèse qui est probablement la bonne1 puisque Jésus termine en disant : « Le Royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à un peuple qui lui fera produire son fruit ».

    1 Cela veut dire que Jésus a bien repris le thème de la parabole de la vigne chez Isaïe, mais en a modifié le symbolisme, ce qui est une manière très habituelle chez les auteurs bibliques. Il suffit de voir comment les métaphores bibliques (comme celle de la pierre angulaire, par exemple) évoluent d'un auteur à l'autre.

    Le jugement que Jérémie portait déjà sur le peuple d'Israël peut d'ailleurs nous éclairer : Quand j'ai fait sortir vos pères du pays d'Égypte... je ne leur ai demandé que ceci : « Ecoutez ma voix, et je deviendrai Dieu pour vous, et vous, vous deviendrez un peuple pour moi, suivez bien la route que je vous trace et vous serez heureux. Mais ils n'ont pas écouté ; mais ils n'ont pas tendu l'oreille, ils ont agi à leur guise dans leur entêtement exécrable, ils m'ont tourné le dos, au lieu de tourner vers moi leur visage... Depuis que leurs pères sortirent du pays d'Égypte jusqu'à ce jour, je n'ai cessé de leur envoyer tous mes serviteurs les prophètes, chaque jour, inlassablement. Mais ils ne m'ont pas écouté ; mais ils n'ont pas tendu l'oreille : ils ont raidi leur nuque, ils ont été plus méchants que leurs pères » (Jr 7, 22-28).

    La dernière phrase de Jésus est terrible : « Le Royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à un peuple qui lui fera produire son fruit ». Faut-il en conclure que le peuple d'Israël serait rejeté ? Grave question qui a empoisonné le dialogue entre juifs et chrétiens depuis vingt siècles… Et à laquelle s'affrontait déjà douloureusement saint Paul, le Juif, dans la lettre aux Romains. Sa conclusion était que, de manière mystérieuse, mais de manière certaine, Israël reste le peuple élu au service du monde parce que « Dieu ne peut pas se renier lui-même ».

    D'autre part, il ne faut pas oublier qu'une parabole n'est jamais un verdict, mais un appel à la conversion. Il est vrai que d'une parabole à l'autre, dans cette dernière étape de la vie de Jésus, le ton monte, mais c'est parce que l'urgence de la reconnaissance du Messie se fait pressante. Nous sommes à la veille de la Passion. Il ne faut jamais perdre de vue que le souhait constant de Jésus est de sauver les hommes, non de les condamner. Et que, s'il guérit les aveugles de naissance, il désire plus encore guérir ses compatriotes de leur aveuglement. On a donc là une ultime tentative de Jésus pour alerter les pharisiens. Ses paroles sont sévères, mais elles ne constituent pas un jugement définitif.

    Ensuite, Matthieu écrit son Évangile à la fin du premier siècle, à une époque où le refus des Juifs de reconnaître le Messie a favorisé l'entrée des païens dans l'Église. Il n'est donc pas étonnant de trouver dans des textes de cette période une pointe polémique contre ceux qui ont poussé le peuple juif à refuser le Christ. Mais il ne s'agit en aucun cas d'un jugement sans appel du peuple juif dans son ensemble ni même de ses chefs. Ce serait contraire à tout l'Évangile. D'ailleurs l'annonce la plus importante ce n'est pas que le Royaume leur soit enlevé : ce qui compte c'est que, malgré les obstacles dressés par les hommes, le Royaume produise son fruit. Ce n'est pas le vigneron qui compte, c'est le raisin.

    Mais surtout c'est le commentaire de Jésus qui nous donne la clé de la parabole : « N'avez-vous jamais lu dans les Écritures : ‘’La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre angulaire. C'est là l'œuvre du Seigneur, une merveille sous nos yeux !’’ ». Dieu est un habitué de ces renversements de situation. Déjà, dans le Livre de la Genèse, les fils de Jacob avaient dit à propos de leur frère Joseph « voilà le Bien-Aimé, tuons-le »... ils n'imaginaient pas que celui qu'ils voulaient supprimer était celui qui allait les sauver, eux et tout le peuple (Gn 37, 20). D'une certaine manière, Jésus annonce ici sa Résurrection : lui, la pierre rejetée deviendra la clé de voûte de l'édifice. Traduisez le nouveau peuple, ce seront tous ceux qui se rassembleront autour de lui, quelle que soit leur origine. Et nul n'en est exclu : tous les vignerons sont englobés dans la phrase de Jésus sur la croix « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu'ils font ».

    Commentaires de Marie-Noëlle Thabut

     * La Pierre d'angle

     La pierre qu’ont rejetée les bâtisseurs est devenue la pierre d’angle.

    Homélie :

    1. Jésus résume l’histoire de l’Alliance, la vigne de choix, c’est le Peuple d’Israël. Dieu a envoyé à maintes reprises des prophètes qui ont été mal reçus et maltraités. Puis, dans ces jours qui sont les derniers, dans une folle confiance, il envoie son Fils bien aimé. Jésus annonce le destin qui sera le sien : lui aussi sera jeté hors de la vigne, hors de la ville, et ses adversaires le tueront. Les chefs des prêtres et les Pharisiens ont bien compris que Jésus les visait : « La pierre rejetée des bâtisseurs est devenue la tête de l’angle ». Beaucoup des bâtisseurs du monde écartent la pierre qu’est Jésus, le Christ. On ne veut plus des valeurs qu’il apporte et on refuse les perspectives qu’il ouvre. Et pourtant, Dieu fait tout pour que la merveille de la création, ce que nous sommes, soit de plus en plus merveilleux. Nous pouvons toujours énoncer dans l’humilité : ‘’Merveille que je suis, merveille que tes œuvres’’. C’est le souci de Dieu de chacune de nos existences, la manière dont il prend soin de chacun de nous : « Pas un cheveu de votre tête ne tombe sans la permission de votre Père. Voyez les moineaux du ciel, votre Père s’en occupe, vous valez bien plus que tous les moineaux du ciel ».

    2. Scientifiquement, on ne peut plus nier la réalité de Jésus de Nazareth, ni les traces de son œuvre sur toute la terre. Mais on laisse de côté son message et on affaiblit son influence, on fait taire ses témoins en les privant de ressources ou de liberté. Ou bien encore on disqualifie l’Église par des campagnes de calomnie. Cependant, en dépit des entreprises de déstabilisation de la foi, Jésus, rejeté des bâtisseurs, demeure la pierre angulaire et l’avenir du monde. « C’est l’œuvre du Seigneur Dieu, surprenante, imprévisible, indiscutable, une merveille sous nos yeux ». Dieu est le « propriétaire du domaine », Jésus « son fils », en qui il a mis tout son amour, en est « l’héritier ». A chaque instant nous pouvons discerner et juger ce qui fait du bien ou ce qui fait du mal à l’humanité ! Dieu attend les beaux fruits de la charité fraternelle. Quand nous sommes situés dans un tel amour, dans une telle bienveillance de Dieu, nous nous aimons les uns les autres.

    3. Jésus vient au-devant de notre détresse, il nous faut toujours bâtir un monde meilleur. Nous nous sentons écartelés, rejetés, mais Jésus nous manifeste sa présence. Par son Esprit-Saint toujours à l’œuvre, il donne le royaume à son Peuple qui veut en porter les fruits. Là où le monde ne voit que ruines ou chantier à l’abandon, dans la lumière de la Parole de Dieu, nous apercevons une espérance. Le courage nous revient pour entrer nous-mêmes dans la construction de la maison de Dieu. Aujourd’hui, ce sont les pauvres qui se trouvent être « la pierre rejetée des bâtisseurs » ! Notre vie est un don étonnant que nous déployons dans l’Esprit-Saint, car Dieu en est le maître.

    Père Gilbert Adam

     * La Pierre d'angle

    Prières :

    1. Demandons la grâce de regarder l’humanité comme Dieu, avec un amour infini pour vivre ensemble dans l’action de grâce.

    Père Gilbert Adam

    2. Seigneur, Dieu de l’univers, fais que se réalisent nos prières en ce dimanche. Que ton Esprit fasse fructifier la grâce du baptême dans nos vies, par le Christ, ton Fils, notre Seigneur. Amen.

    Père Jean-Luc Fabre

    3. Dieu a planté sa vigne dans notre monde. Dans un esprit d’action de grâce, prions-le ensemble pour ce qu’il en a fait et pour ce qu’il en fera. Seigneur, entends la prière qui monte de nos cœurs :

    Dieu notre Père,

    toi qui ne cesses de faire grandir ta vigne par la bonté et dans l’amour,

    écoute nos prières et daigne les exaucer par le Christ, notre Seigneur. Amen.

    Vie liturgique, revue de pastorale liturgique publiée par Novalis

     * La Pierre d'angle

    « Tuons le Fils et nous aurons la vigne ! »

    Conclusion : 

    Chers Sœurs et Frères dans la foi,

    Suite à son entrée triomphale à Jérusalem (Matthieu 21, 1-9), Jésus a chassé les vendeurs du Temple. « De quelle autorité ? » protestent les grands-prêtres vexés. Alors Jésus leur raconte cette parabole composée à partir du chant de la vigne, d'Isaïe. C'est une autre parabole du jugement. On donne aussi comme titre à cette section : les paraboles d'avertissement. Leur but est d'étonner et d'ouvrir les yeux. Plusieurs appels à la vigilance précèdent le récit de la Passion.

    Nous avons parlé, depuis deux semaines, de l'étonnement des grands-prêtres face aux ouvriers de la dernière heure et aux prostituées qui les précéderont dans le Royaume.

    Au moment où ils lui demandent d'où vient son autorité, Jésus leur annonce qu'après sa mort, ils perdront eux-mêmes leur propre autorité. Même que le puissant parti des sadducéens disparaîtra. Avec la destruction du Temple par Titus, en l'an 70, les sadducéens et les fonctions sacerdotales qu'ils assuraient seront rayés de l'histoire.

    « Le Royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à un peuple qui lui fera produire son fruit ».

    Toute l'action est centrée sur la mise à mort prochaine du Fils unique par les grands-prêtres et les anciens, à qui la vigne est actuellement confiée. De nombreux serviteurs envoyés avant lui rappellent la longue lignée des prophètes malmenés par les chefs d'Israël. Le fils envoyé en dernier lieu est rejeté hors de la ville pour être brutalement assassiné par de vils criminels qui croient se rendre ainsi maîtres de la vigne. « De quelle autorité » l'ont-ils fait ?

    À la manière du prophète Nathan, qui amenait le roi David à se juger lui-même, Jésus invite les grands-prêtres et les anciens à prononcer leur propre jugement : « Que fera le maître à ces vignerons? » — « Ces misérables, répondent-ils sans hésiter, il les fera périr misérablement ! ».

    Ce serait faire fausse route que de tirer une application facile d'un détail secondaire de cette parabole. Les détails d'une parabole sont sans importance. Ici, on reprocherait avec raison au maître son imprudence : il continue d'envoyer tuer, à tour de rôle, ses serviteurs, et il apparaît encore plus naïf lorsqu'il se dit en lui-même, après tant de violence et de meurtres : « Ils respecteront mon fils ! ».

    Toute parabole doit être commentée dans son contexte, en insistant sur le point central de la comparaison. Que nous dit la parole de Dieu aujourd'hui ? De nous attacher d'abord à son Fils unique et de bien comprendre nos responsabilités au sein de son peuple.

    Bernard Lafrenière – Congrégation de la Sainte-Croix

    Synthèse de recherches mise en page par le Frère André B.

     * La Pierre d'angle

    Méditation proposée par notre Frère Chapelain Jean-Paul VS :

    Dieu éternel et tout-puissant, dans la tendresse inépuisable, tu combles ceux qui t’implorent, bien au-delà de leurs mérites et de leurs désirs ; répand sur nous ta miséricorde en délivrant notre conscience de ce qui l’inquiète et donnant plus que nous n’osons demander.

    Références :

    https://fr.wiktionary.org/wiki/pierre_angulaire#:~:text=%C3%89tymologie,pour%20la%20solidit%C3%A9%20dudit%20b%C3%A2timent.

    http://siloe37.over-blog.com/2018/08/la-pierre-d-angle-qu-est-ce-que-c-est.html

    http://www.vieliturgique.ca/index.php?option=com_content&task=view&id=80

    https://croire.la-croix.com/Paroisses/Textes-du-dimanche/27e-dimanche-ordinaire-annee-a

    https://www.vercalendario.info/fr/evenement/liturgie-catholique-4-octobre-2020.html

    http://www.bibleenligne.com/commentaire-simple/commentaire/es/881-esaie-5-1-17.html

    http://paroissecolomiers.com/philippiens-4-6-9-ne-vous-inquietez-de-rien.html

    http://passionistedepolynesie.e-monsite.com/pages/enseignement-myriam-de-gemma/reflexions-bibliques/matthieu/matthieu-21-33-43.html

    http://thierry.jallas.over-blog.com/article-commentaires-de-marie-noelle-thabut-annee-liturgique-a-27e-dimanche-du-temps-ordinaire-2-octobre-85318124.html

    http://www.pere-gilbert-adam.org/Vingt-septieme-Dimanche-ordinaire-Annee-A.html

    http://jardinierdedieu.fr/priere-universelle-27e-dimanche-du-temps-ordinaire.html

    http://www.vieliturgique.ca/index.php?option=com_content&task=view&id=52

    http://pages.videotron.com/homelie7/vingtseptordA+.htm

    Magnificat  du dimanche 8 octobre 2023 page 100


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