• * Le Prologue de Jean

    Rubrique « La Saint-Jean à la Commanderie de Saint-Léger »…

    … à l’occasion de la Saint-Jean, ce 27 décembre 2021

    Le tout premier chapitre de l’Évangile selon saint Jean s’appelle le « Prologue ». Il est important aussi de retenir que c’est à la première page du Prologue de Jean que nous ouvrons la Bible au début de chacun de nos chapitres et que c’est sur la Bible ouverte à cette page-là que nous prêtons tous nos engagements de Novice, d’Écuyer, de Chevalier ou de Dame du Temple.

     Le Prologue de l’Évangile de Jean 

    Que penser du Prologue de Jean ? Pourquoi cet écrit est-il si important ?

     * Le Prologue de Jean

    Notre Frère Axel va nous expliquer toute l’importance que nous accordons au Prologue de l’Évangile de Jean :

     Le Prologue de Jean et son importance 

    Ce que l’on appelle « Prologue de Jean » est le tout début de l’Évangile de Jean, texte magnifique, dans un style très différent du reste des évangiles : poétique, beau, profond, théologique et aussi un peu mystérieux, c’est l’un des textes qui soulèvent le plus grand nombre de questions théologiques et qui comportent de multiples enjeux.

     * Le Prologue de Jean

     Dieu est Parole et Lumière  

    Une première remarque est que Jean ne parle pas du tout de la question de la naissance de Jésus, tout comme Marc d’ailleurs et pas plus que Paul. Jean est là fort avisé : il va au-delà d’une expression mythologique de naissance plus ou moins miraculeuse pour s’intéresser au sens de la venue du Christ dans le monde d’un point de vue spirituel, c’est-à-dire théologique : qui est Jésus par rapport à Dieu, que nous révèle-t-il de lui, qui est Dieu et comment agit-il dans le monde ?

    Et puis Jean présente une théologie particulièrement moderne et crédible. Ce qu’il dit, c’est que Dieu est à la fois parole et lumière. Nous sommes ainsi au-delà d’une vision enfantine d’un Dieu qui serait une personne toute-puissante régnant sur le monde du haut du ciel, pour présenter un Dieu qui est un dynamisme créateur à l’œuvre dans le monde.

    Si Dieu est parole, alors il n’est pas tout-puissant, la parole est une chose essentielle, mais elle ne peut pas contraindre et rien imposer. La parole, c’est une puissance de persuasion, c’est un appel, une instruction, pas une force d’action concrète. Dieu est ainsi montré comme œuvrant dans le monde en apportant une information créatrice, pas en agissant concrètement hors des lois de la nature.

    Ensuite dire que Dieu est Lumière, est une affirmation essentielle, parce que la lumière n’impose rien, elle ouvre juste un chemin et permet à chacun de trouver sa propre route avec intelligence. Cela va dans le sens du Psaume 119 (v. 105) qui dit à Dieu : « ta parole est une lampe à mes pieds, une lumière sur mon sentier ». Le psaume ne dit pas « ta parole est le sentier que je dois suivre », mais il montre que la Parole de Dieu peut éclairer notre route. Ainsi chacun a une route qui est la sienne, et cette Parole n’est pas pour nous mettre dans un rapport de soumission passive où il faudrait croire et faire tout ce qu’elle dit, mais elle éclaire, elle ouvre des horizons et nous permet de choisir notre propre route avec intelligence.

     * Le Prologue de Jean

    « Au commencement… ». C’est ainsi que débute l'Évangile de Jean, page à laquelle la Bible est ouverte au début de nos travaux. Tous, nous prenons nos obligations la main posée sur cette page, qui contient un indice supplémentaire à propos de la transcendance. Certains prétendent que Jean-le-Baptiste et Jean l'Évangéliste ne feraient qu'un même personnage et font un rapprochement - au nom d'une similitude de prononciation - avec le dieu romain biface Janus. Tout cela n'a pas une importance décisive, si ce n'est de montrer l'intérêt que les Frères portent à l'auteur supposé du quatrième Évangile. Or, il faut reconnaître que les recherches les plus récentes nous rendent modestes : il nous est impossible d'identifier clairement l'auteur de l'Évangile dit « de saint Jean » ou « selon saint Jean ». Tout au plus, pouvons-nous dire qu'il est issu d'une tradition, qui avait, certes, un maître spirituel mais qui n'est pas pour autant à coup sûr le rédacteur. Il faut convenir sans doute que le texte est non seulement constitué de plusieurs sources orales mises en forme par « une personnalité puissante et autorisée » à qui, en guise d'hommage, on en aurait attribué la paternité, mais qu'il aurait subi au cours d'éditions successives des modifications dues aux copistes. L'Évangile de Jean, né dans une autre culture que la nôtre, obéit à d'autres lois... Le Prologue constitue donc une entité littéraire spécifique et homogène qu'il vaut la peine d'étudier dans le détail. Ce poème est construit selon un procédé littéraire assez usité à l'époque de sa création, le procédé du chiasme.

    Le chiasme (du grec khiasmós – disposition en croix, croisement – provenant de la lettre grecque khi en forme de croix (prononcer « kjasm»), est une figure de style qui consiste en un croisement d'éléments dans une phrase ou dans un ensemble de phrases sur un modèle AB/BA et qui a pour effet de donner du rythme à une phrase ou d'établir des parallèles. Le chiasme peut aussi souligner l'union de deux réalités ou renforcer une antithèse dans une phrase qui dispose les éléments selon une symétrie en miroir.

    Il nous faut donc d'abord repérer ces éléments et décrypter comment ils se font écho les uns aux autres. Ainsi, en « réduisant » le texte à sept unités de sens, se révèle la structure du texte. Les paragraphes 1, 2 et 3 ont leur symétrique respectivement dans les paragraphes 7, 6 et 5 : Le Logos était Dieu (§ 1) mais le Fils a fait connaître le Père (§ 7). Jean-Baptiste apparaît (§ 2) puis Jean-Baptiste se retire (§ 6). Le Logos était dans le monde (§ 3) et il devint chair pour habiter parmi nous (§ 5). Comme une évidence apparaît alors le cœur du texte. Il s'agit du quatrième paragraphe puisqu'il est le seul à ne pas avoir son correspondant dans le chiasme. Ce paragraphe fonctionne comme un axe.

    Pour faciliter la compréhension, il est possible de donner un titre aux paragraphes, titre qui doit rendre compte le mieux possible du contenu :

    1. Dieu seul détient la Connaissance : « Au commencement ». Il faut comprendre en fait « Dès avant le commencement ». Cette expression est une forte allusion au premier chapitre de la Genèse : «Au commencement Dieu créa le ciel et la terre» puis sépara la lumière des ténèbres. Cette opposition lumière-ténèbres est le sujet du premier paragraphe du Prologue : dans un échange entre Dieu et le Logos, entre la permanence silencieuse et le Verbe créateur naît la Lumière. Nous pouvons traduire « Lumière » par « Connaissance » car ces mots font partie des manières de dire que Dieu se révèle.

    2. Jean-Baptiste apparaît pour rendre témoignage.

     * Le Prologue de Jean

    3. La Connaissance est venue dans le monde : la Vraie Lumière, la Connaissance, est venue dans le monde puisqu’elle est «par qui le monde a été fait».

    4. Ils sont nés de Dieu : à ceux qui accueillent la lumière, il est donné d'être des enfants de Dieu.

    5. La Connaissance est venue chez l'Homme : « Il a habité parmi nous » et nous avons pu « voir sa gloire ».

    6. Jean-Baptiste se retire : il laisse passer devant lui le Logos.

    7. Les Hommes ont accès à la Connaissance : tous ont eu « part à sa plénitude » et c'est le Fils « qui a conduit à connaître » Dieu.

    Nous pouvons aller encore plus loin et montrer comment le Prologue de l'Évangile de Jean indique clairement la fonction de l’initiation par rapport à la quête de la Connaissance.

    Au fil du texte, se réalise comme une substitution. L'homme prend, dans l'intimité de Dieu, la place du Logos. En tous cas ce qui est strictement réservé au Logos peut être partagé par tout homme. « Le Verbe fait chair est le mystère d'une rencontre : celle de la vie transcendante de Dieu et de la vie désirante de l'homme ». Les spécialistes les plus réputés divergent sur la traduction du mot « Logos » : Parole, Verbe, …

    Certains proposent même de ne pas le traduire puisque le texte original du quatrième Évangile est en grec et que le mot est passé, en l'état, dans la langue française. Ils ne sont pas non plus d'accord sur la question de savoir qui est le Logos et si, au cours du Prologue, il s'agit bien toujours de la même personne : est-ce dès le début du texte, de Jésus dont on parle ? D'une part Dieu, qui se tient dans la permanence, dans le silence. Le Logos porte Dieu comme on porte un message. Il met en œuvre de manière sensible ce que Dieu est. Mais alors, puisque nous avons noté que ce qu'il en est du Logos est partagé par tout homme grâce au jeu des intimités, nous pouvons dire que tout homme est, lui aussi, révélation de Dieu.

     * Le Prologue de Jean

    Ainsi, grâce à une lecture attentive du Prologue de l'Évangile de Jean, se découvre un aspect de la transcendance : avant l'initiation, Dieu est derrière nous puisqu'au commencement était le Logos. Après l'initiation, il est présent puisque ce sont les vivants qui parlent de Dieu pour lui faire dire « Je suis ». Au moment de l'initiation, la transcendance change de temps. Elle quitte le passé pour habiter le présent. Avec Jean, on va vers le commencement. Car il n'est pas en arrière, dans le passé. Il est en avant et déjà dans le présent. Il est là où la vie se manifeste dans sa source et sa plénitude. Tout cela est bien compliqué.

    Néanmoins ce que l’on peut retenir, c’est que Dieu lui-même est Parole et Lumière. Parole, c’est-à-dire qu’il est information, vocation, il est une parole d’amour, une parole d’espérance. Il est aussi Lumière, c’est-à-dire qu’il est pour nous liberté, capacité de voir, de trouver, de choisir, d’avancer. C’est justement ce Dieu-là, qui est parole et lumière, qui nous a été révélé par Jésus-Christ qui est l’incarnation même d’une parole créatrice et d’une lumière libératrice. C’est en cela que l’on peut croire en Jésus-Christ comme étant le fils de Dieu, parce qu’il nous apporte la Parole créatrice et la Lumière de la liberté.

     * Le Prologue de Jean

    Messire Axel VDH, Chancelier de la Commanderie de St-Léger

     Conclusion 

    Le Prologue ne décrit pas les différents événements de la vie de Jésus : il laisse ce soin à l’Évangile.

    Dans ce Prologue de l’Évangile de Jean, nous n’entrons pas directement dans le récit évangélique par l’enfance de Jésus.

    Dès ses premiers mots, le Prologue nous situe avant la création du monde avec un solennel « Au commencement » (Jn 1,1) qui renvoie à la Genèse (Gn 1,1). Il se termine par l’affirmation de la possibilité de connaître Dieu grâce à la révélation ou au récit que fait de lui le Fils unique. C’est ainsi toute l’histoire du salut, depuis les origines jusqu’à l’Incarnation, en passant par le don de la Torah à Moïse au Sinaï, qui est décrite en quelques traits et nous aide à comprendre le Salut amené par Jésus.

    Le texte affirme que le Logos est Dieu. Dans un premier temps, le texte nous dit que le Logos est distinct de Dieu, puis il affirme qu'il lui est identique : il est Dieu ! Le Christ se distingue donc du Père, puisqu'ils sont deux personnes et cependant, ils ne font qu'un, ils sont un seul et même Etre.

    Le « Logos » est le centre des premiers versets. Son identité est précisée : il était « au commencement ». Il est « tourné vers Dieu ». Puis, on va apprendre que c’est par lui que tout a été créé et, finalement, qu’il « plante sa tente » parmi les hommes et s’incarne dans un être humain.

    Le « Logos » est vie et lumière.

    Jean est présenté comme un homme « envoyé de la part de Dieu ».

    Vous l’aurez bien compris, mes très chers Frères et Sœurs, pour désigner Jésus, l'Évangéliste Jean utilise le terme grec «Logos», que l'on peut aussi bien traduire par « Parole » que par « Verbe ». Ce terme a un fondement biblique et renvoie à la Parole de Dieu, présente dans la sagesse comme chez les prophètes. Jésus est bien la Parole de Dieu venue parmi les hommes, la sagesse personnifiée qui présidait à la création, la Torah qui fait vivre l'homme.

    Quand le Prologue dit que « le Logos est devenu chair », il signifie que le « « Logos » a assumé pleinement notre humanité. Il n’a pas pris l’apparence d’un homme. Il était homme de la naissance jusqu’à la mort à laquelle il n’a pas échappé.

    Le Frère Commandeur de St-Léger


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