• * La grande Bible de Clairvaux

    220820 – Saint-Bernard de Clairvaux

    Rubrique « Bibliographie » - La Grande Bible de Clairvaux

    A l’occasion de la fête de Saint-Bernard de Clairvaux, notre protecteur spirituel, ce sujet vous est proposé par notre Frère Jean-Paul, Visiteur prieural de Belgique.

     La Grande Bible de Clairvaux 

    Introduction

     * La grande Bible de Clairvaux

    En ce 20 août 2022, jour de la fête de saint Bernard de Clairvaux, plutôt que d’évoquer comme les années précédentes, la vie, la pensée et l’action religieuse de notre illustre protecteur spirituel, nous vous proposons de découvrir la Grande Bible qu’il a fait réaliser à l'abbaye de Clairvaux.

    C'est au Val d'Absinthe que ce jeune père abbé, le futur Bernard de Clairvaux, et quelques moines venus de Cîteaux, vinrent défricher, il y a neuf siècles, une clairière de terre aride au cœur de la vieille forêt gauloise qui couvre les collines et les vallées des confins de la Champagne et de la Bourgogne. Cette terre de silence et de pauvreté va devenir pour la postérité la grande abbaye de la « claire vallée », Clara vallis.

    L’Abbaye de Clairvaux

    L’abbaye cistercienne de Clairvaux fut fondée en 1115 par Bernard de Fontaines, le futur Bernard de Clairvaux, qui la dirigea jusqu’à sa mort en 1153. Elle fut la troisième fille de Cîteaux, l’un des grands centres monastiques de la chrétienté dont dépendaient, à la fin du Moyen Âge 530 autres abbayes, fondées dans toute l’Europe.

    L'abbaye fut bientôt à la tête d'un riche patrimoine foncier planté de vignes et animée de granges, forges, moulins, champs, mines de sel et forêts. Loin de fonctionner en autarcie, son emplacement le long de la route des foires de Champagne la mettait au cœur des circuits commerciaux de son temps.

    Mais tous les moines de Clairvaux ne coupent pas des arbres en forêt et ne se rendent pas tous aux champs faire la moisson. D’autres travaillent au sein de l’abbaye, dans le « scriptorium », non loin de l’abbatiale où ils doivent se rendre sept fois par jour pour chanter les psaumes. Ils y copient et recopient inlassablement les livres saints et les grandes œuvres de la littérature grecque et latine.

    Si la tradition bénédictine veut que la calligraphie soit riche d’or, de dessins et de couleurs, Bernard de Clairvaux va intervenir pour proposer un nouveau style, en demandant que les manuscrits traduisent l’ascèse de la condition monastique.

    Numérisée depuis 2015, cette Bible est à plus d'un titre exceptionnelle, car elle représente l'exemple même d'un style « monochrome » et décoratif unique en son genre.

     * La grande Bible de Clairvaux

    En parcourant les fines pages de la Grande Bible de Clairvaux ornées de ses élégantes lettrines, comment ne pas songer, le temps d’un instant, aux moines s’attelant de longues heures durant à la copie des Écritures saintes ? Comment ne pas se plonger dans la formidable aventure que fut celle des abbayes cisterciennes ?

    Une Bible en six volumes, soit 2400 pages

    C’est dans ce contexte qu’a été réalisé vers 1160 le livre le plus beau et le plus monumental de Clairvaux : la Grande Bible. Composée de six volumes et de 2400 pages, il a fallu pour la réaliser près de 600 peaux de moutons. Mais son originalité ne s’arrête pas à sa taille, car conformément aux prescriptions de saint Bernard et en rupture avec l’enluminure romane traditionnelle, elle est un pur exemple du style monochrome.

     * La grande Bible de Clairvaux

    Réalisée selon le « style monochrome » cistercien, cette bible au format monumental présente la particularité de ne présenter aucune figuration humaine, et de présenter le texte à nu, seulement agrémenté de lettrines aux motifs géométriques et végétaux, chacune étant peinte en camaïeu unicolore.

     * La grande Bible de Clairvaux

    En effet, saint Bernard proscrivait toute figuration d’animal, d’être humain ou de monstre, et interdisait de peindre les initiales en plus d’une couleur ou d’utiliser la dorure. Ces proscriptions incitaient les moines, véritables artistes, à inventer une grande variété de décors géométriques et floraux et à créer des dégradés très étudiés et subtilement appliqués. Ces lettres peintes constituent de véritables œuvres d’art.

     * La grande Bible de Clairvaux

    Point d’or donc dans ces pages, ni de représentation figurative (humaine, animale ou monstrueuse). Ici sont privilégiés les motifs géométriques, végétaux et surtout monochromes. Ainsi, les 160 grandes lettres qui introduisent les textes sont peintes d’une seule couleur : en rouge, en vert ou en bleu principalement.  

     * La grande Bible de Clairvaux

    Après la mort de saint Bernard, en 1153, ses successeurs vont continuer son œuvre en faisant de la bibliothèque de Clairvaux, en moins d’un siècle, une des plus grandes d’Occident. Mais ils reviendront peu à peu à une décoration plus riche de leurs manuscrits.

    Le scriptorium de Clairvaux était organisé de telle sorte que l’abbaye dispose toujours d’un fonds de 1800 ouvrages. Après le 16ème siècle, l’abbaye développa sa bibliothèque par achats de fonds de bibliophiles. À la Révolution, elle comportait plus de 40 000 ouvrages. Par mesure de sécurité, les autorités locales les firent transporter à Troyes.

    Confisqués à l’abbaye lors de la Révolution française, cinq des six volumes originels de la Grande Bible ont depuis subsisté et les archives et la bibliothèque de Clairvaux ont pu les numériser en 2015 dans le cadre des 900 ans de la fondation de l’abbaye. Ils peuvent ainsi être découverts de tous sur le site de la bibliothèque virtuelle. Une belle occasion de découvrir ce chef-d’œuvre, et l’incroyable créativité des moines copistes.

     * La grande Bible de Clairvaux

    À la tête de plus de 330 abbayes en Europe, l’Abbaye de Clairvaux fut supprimée lors de la Révolution française.

    Haut-lieu de l'histoire religieuse, forte de centaines de filiations à travers l'Europe, définitivement imprégnée de la spiritualité cistercienne, Clairvaux restera une abbaye puissante jusqu'à la Révolution qui la confisqua.

    En 1789, l’abbaye fut vendue comme bien national à la suite du décret du 2 novembre 1789 qui mettait les biens de l’Église à la disposition de la Nation. En 1792, des industriels achetèrent le site pour y installer leurs ateliers. Une verrerie fut ainsi installée dans l'abbatiale. Ces industriels firent banqueroute et le site fut finalement racheté par l'État pour en faire une prison en 1808.

    Depuis 1808, les bâtiments de l'abbaye, rachetés par l'État, ont été occupés par une institution pénitentiaire française, la maison centrale de Clairvaux qui deviendra le plus grand bâtiment carcéral de France.

    La transformation d'abbayes en prisons au 19ème siècle était courante (Cf. l’abbaye du Mont-Saint-Michel, celle de Fontevraud, etc.) et était liée à la réforme du système pénal qui instituait une nouvelle peine, la privation de liberté instituée par Napoléon 1er en 1808. Les abbayes, avec leurs murs d'enceinte et leurs cellules, semblaient alors idéales. De plus, les populations locales trouvaient ainsi un substitut à la communauté religieuse qui leur avait procuré jusque-là une certaine aisance économique.

    Cet établissement qui fut autrefois un haut lieu de spiritualité a fait l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis le 26 octobre 1981. Différentes parties de l'abbaye ont aussi bénéficié de protections supplémentaires aux monuments historiques : inscription en 1994 et 1997, classement en 1999. Le bâtiment des convers appartient au Ministère de la Culture depuis 2003. À ce titre, il est l'objet de restaurations depuis les années 1970, mais surtout entre 2003 et 2013.

    L’abbaye de Clairvaux a fêté ses 900 ans en 2015.

    Pour les admirateurs de beaux livres

    On peut toujours aller admirer la cathédrale de livres reconstituée à la Médiathèque du Grand Troyes. Ce fonds Clairvaux est la plus importante collection médiévale française. On peut notamment y admirer la Grande Bible de saint Bernard, en six tomes, terminée en 1151.

    La bibliothèque médiévale de Clairvaux est connue en particulier par un catalogue réalisé en 1472. Il en subsiste 1121 volumes manuscrits, dont 1021 sont conservés à la Médiathèque du Grand Troyes.

    Les archives et la Bibliothèque de Clairvaux ont mené une campagne de numérisation de l'ensemble des manuscrits.

    Le projet « Bibliothèque virtuelle de Clairvaux — 1472 » donne accès à l'ensemble des manuscrits subsistants de la bibliothèque médiévale de Clairvaux telle qu'elle était en 1472, via une bibliothèque numérique performante, destinée principalement aux chercheurs, et un site grand public. Ce dernier a été mis en ligne en juin 2015, lors de la commémoration des 900 ans de Clairvaux.

    La « Bibliothèque virtuelle de Clairvaux » permet la consultation des manuscrits intégralement numérisés en couleur, et propose des articles et dossiers d’auto-formation qui s’adressent principalement à un public d’étudiants et de chercheurs.


    Synthèse de recherches effectuées par les Frères Jean-Paul VS et André B.

    Chevaliers & Grands Officiers de l’Ordre de la Sainte-Croix de Jérusalem


    Sitographie :

    https://fr.aleteia.org/2020/08/19/la-surprenante-histoire-de-la-grande-bible-de-clairvaux/

    https://fr.aleteia.org/2016/05/11/labbaye-de-clairvaux-renait-en-3d/

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Grande_Bible_de_Clairvaux

    https://www.abbayedeclairvaux.com/presentation-de-clairvaux/histoire-de-clairvaux/

    https://projet.biblissima.fr/fr/appels-a-projets/projets-retenus/bibliotheque-virtuelle-clairvaux-1472

     

    Bibliographie :

    Jacques Verger & Jean Jolivet

    Le siècle de saint Bernard et Abélard

    Fayard-Mame, Paris, 1982

    Perrin, coll. « Tempus », 2006, pages 178 – 179

     

    Jean Leclercq

    Recueil d'études sur saint Bernard et ses écrits

    Editions di Storia e Letteratura, 1962, page 310

     


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