• Au pied de la Croix

    Dans le cadre de ce séminaire préparatoire à la prochaine célébration de la Saint-Jean, je me propose de vous livrer le fruit de mes recherches à propos de ce personnage que nous nommons « Jean l’Évangéliste » et à propos de cette scène unique que l’on retrouve dans un des quatorze tableaux ou stations du « Chemin de Croix » dans toutes les églises, scène qui s’est précisément passée au pied de la Croix du Christ.

     * Au pied de la Croix (1)

    Cette approche très ciblée de saint Jean dit « l’Évangéliste » nécessite avant toute chose de comprendre ce qui distingue cet apôtre des autres et ce qui explique sa seule présence au pied de la Croix du Christ. Car enfin cette situation manifestement dangereuse et exposée est largement dépassée par une force bien plus grande que l’émotion de la peur.

    1. Qui est ce personnage si particulier qui occupe une place particulière auprès de Jésus ?

    Dans une dictée à Maria Valtorta, Jésus fait de Jean son confident pour les faits les plus graves de sa vie : « Par la pureté de sa vie », Jean possède la paix en lui. « Je l'ai aimé à cause de cette pureté » dit Jésus. « C'est à elle (cette pureté) que j'ai confié mes enseignements, mes secrets. Jean est l'être qui m'était le plus cher ». 

    Maria Valtorta est une mystique catholique membre du Tiers-Ordre des Servites de Marie, née à Caserte en Italie le 14 mars 1897 et morte le 12 octobre 1961 à Viareggio en Toscane. Elle est notamment l'auteur d'un livre en plusieurs volumes, « L'Évangile tel qu'il m'a été révélé », qui évoque des scènes de la vie du Christ qu'elle dit avoir reçues par visions.

    Sa jeunesse accentue sa pureté, sa douceur et sa franchise. « C'est un ange » dit de lui la Vierge Marie. Physiquement, il a « le visage rose et imberbe d'un homme à peine formé » ; ses yeux sont bleu foncé et ses cheveux blonds châtain. Il les porte longs à la mode galiléenne. Jésus le dépassant « de la tête et du cou », il devait mesurer 1,55 m ou un peu moins. Maria Valtorta note « son sourire d'enfant doux et franc, son œil limpide et rieur, sa voix joyeuse ».

    Après son élection comme apôtre, c'est l'un des tout premiers à faire une prédication à la demande de Jésus. Il y développe le thème de l’Amour révélé en Jésus. C'est aussi le premier disciple à faire un miracle au nom de Jésus par l'onction et la prière. « Le premier de mes apôtres, ce fut Jean », dit Jésus à Maria Valtorta. « Le premier à me reconnaître. Le premier à m'adresser la parole, le premier à me suivre, le premier à m'annoncer ».

     * Au pied de la Croix (1)

    Sa vocation, c'est l'amour : « Je dirai au Père de faire de moi quelqu'un qui sait seulement aimer », confie-t-il à Jésus. « Je ne veux plus que cela ». Il offre tout le reste pour la conversion de Judas.

    Avec Pierre et son frère Jacques, Jean assiste à la résurrection de Myriam, la fille de Jaïre à la Transfiguration et à l'agonie du Gethsémani. Avec Pierre, il pénètre dans la cour du Grand Prêtre lors du procès de Jésus, mais il est le seul apôtre à le suivre jusqu'au pied de la Croix. Il y a conduit la Vierge Marie qu’il a accompagnée au long de la Via Dolorosa. Avec Pierre, il court au tombeau vide « et il crut ». 

    Jean est aussi un impétueux. En voulant régler leur compte à Judas et à tous les opposants de Jésus, lui et son frère gagnent le surnom de « Fils du tonnerre ».

    Il prouve de nouveau son impétuosité lorsque, chassé d'un village samaritain, il propose avec son frère de faire descendre le feu du ciel sur le village rebelle.

    Lors de la Passion, de retour du tombeau, il croise Helchias, le synhédriste, qui profère des injures à l'encontre de Marie. Jean lui saute à la gorge, et le terrasse en lui disant : « Demande-lui pardon ou bien je t'étrangle, démon ! ».

    N.B. : Helchias était de la famille Phiabi dont sont issus plusieurs synhédristes et Grands Prêtres. Il était le gardien du trésor du temple.

    Le sanhédrin, ou grand conseil juif, siégeait à Jérusalem. Il comprenait 71 membres, président compris, en référence aux 70 anciens qui secondèrent Moïse.

    Dans un entretien testamentaire, Jésus lui confère la mission de Le continuer par l'Évangile : « L'amour pour ton Jésus se fera parole. Beaucoup, même parmi ceux qui ne seront pas de mon Église, qui ne seront d'aucune église, mais qui chercheront une lumière et un réconfort, viendront à toi et me trouveront ».      

    C'est à lui que Jésus mourant confie la Vierge Marie. Il se retire avec elle dans la maison de Gethsémani. Il est l'assesseur de Pierre dans la première communauté chrétienne.        
    Il assiste à la « dormition » de Marie (sa mort) suivie de son « Assomption ».         
    Jean est le témoin privilégié des grands évènements de la vie publique de Jésus et de certains épisodes qu'il est seul à rapporter dans son Évangile, comme par exemple la tentative de faire élire Jésus roi.

    J’en viens à présent sur cet épisode à peine évoqué au début de mes propos : la scène qui se déroule au pied de la croix.

    2. Au pied de la Croix

     * Au pied de la Croix (1)

    L’Évangile de saint Jean, outre la présence de Marie « à la Croix de Jésus », note les dernières volontés du Christ : « voyant sa Mère et, près d’elle, le disciple qu’il préférait, Jésus dit à sa Mère : « Femme, voilà ton fils ». Puis, il dit au disciple : Voilà ta Mère. Et dès ce moment, le disciple la prit chez lui ». Intention la plus délicate de Jésus à l’égard de sa Mère et de son disciple le plus aimé. Il ne les abandonne pas, Il les confie l’un à l’autre, dans l’oubli de Lui-même : c’est à eux qu’Il pense. Mais, en même temps, n’est-ce pas l’aveu qu’Il s’en va, que son Heure – la dernière – est arrivé, sans rémission aucune ? Aussi cette délicatesse devait être en même temps, pour Marie et Jean, le signe douloureux de la mort toute proche. Pour eux aussi, « tout est consommé ».

    Jésus est en train de mourir sur la croix. Jean se tient près de Marie. Jean a le courage d’accompagner Jésus jusqu’au bout.

    Jésus donne Marie pour mère à Jean, le disciple bien aimé.

    Jean devient le fils de Marie. Ce tableau descriptif a inspiré la piété chrétienne.

    Jean reçoit de Jésus la charge de s’occuper de sa mère et inversement.

    Marie devient la « Mère », mais pas simplement de Jean !

    Jean devient l’être aimé, le « frère », le témoin premier.

    La charge symbolique de cette scène pourrait à elle seule nous maintenir en débat des années durant.

    Recherches effectuées par le Frère Bruno L. pour le séminaire du 16 novembre 2018 à la Commanderie de St Léger 

    Mise en page et illustration par le Frère André B.

    Lien vers un autre parchemin sur le même sujet : Au pied de la Croix du Christ (2) 

    Bibliographie

    Maria Valtorta

    L'Évangile tel qu'il m'a été révélé

    10 tomes – 4.856 pages – traduction française de 1979

    Éditions Centro Editoriale Valtortiano

     

    Benoît XVI (Ratzinger Joseph)

    Audience générale

    Libreria Editrice Vaticana

    Mercredis 5 juillet et 9 août 2006

     

    Sitographie

    https://nominis.cef.fr/

    http://www.maria-valtorta.org/Personnages/JeanZebedee.htm

    https://christus.fr/marie-au-pied-de-la-croix-ambroise-de-milan/


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  • Jean, un Évangéliste à part - Pourquoi ?

    Les Chevaliers de l’Ordre du Temple de Jérusalem, membres du Grand Prieuré Traditionnel et Régulier de Belgique, exercent une dévotion particulière à l’égard de Jean l’Évangéliste car il en est un des protecteurs spirituels.

     * Jean, un Evangéliste "à part". Pourquoi ?

    Jean l'Evangéliste - Tableau de Le Corrège

    La tradition chrétienne attribue l'Évangile de Jean  à l'apôtre Jean. Elle identifie l'apôtre au « disciple bien aimé » ou au « Disciple que Jésus aimait ». La tradition chrétienne lui attribue également trois épîtres, ainsi que l'Apocalypse, dont l'auteur s’y présente comme ayant reçu une vision de Jésus-Christ dans l'île de Patmos. Cet ensemble d'écrits constitue ce qu'il est convenu d'appeler le « corpus johannique », un ensemble de cinq textes du Nouveau Testament que la tradition chrétienne attribue à Jean depuis l'Antiquité, étant entendu qu'il s'agit plus que vraisemblablement d'une œuvre collective rédigée par une communauté.

    Certains historiens modernes lui contestent cette paternité en assimilant l'auteur de l'Évangile dit « selon Jean » à Jean le Presbytre (l'Ancien), et non à l'apôtre Jean.  Pour ne pas entrer dans des controverses et des polémiques contre productives, je fais appel à l'argumentaire d'un éminent bibliste et exégète, le Père Yves Marie Blanchard : ''Jean, un auteur contesté''.

     * Jean, un Evangéliste "à part". Pourquoi ?

    Yves Marie Blanchard est un spécialiste de l'Évangile selon Saint-Jean et un œcuméniste convaincant et convaincu. Le raisonnement du Père Blanchard  permet de prendre de la hauteur par rapport aux considérations purement historiques :

    « L’analyse historique, si attentive à la lettre, a détaché d’abord, pour des raisons de critique interne, l’Apocalypse du reste du corpus. Puis, elle a distingué entre la première épître et les deux autres. Enfin, elle a nié le lien traditionnel entre le fils de Zébédée et le « Disciple que Jésus aimait » qui se revendique auteur de l’évangile. Ce faisant, elle nous a rendus sensibles à la diversité des écritures, au lent processus rédactionnel qui aboutit aux textes actuels, aux contextes de leur élaboration et à la vie des communautés qui les ont portés. »

    Selon le Père Blanchard, donc, cette « géguerre » entre historiens n'est en fin de compte pas ce qu'il y a de plus important.

    Yves-Marie Blanchard insiste tout d'abord sur l’unité du corpus johannique. Son analyse concerne en particulier les communautés chrétiennes d’Asie Mineure qui, d’une manière ou d’une autre, se sont référées au « Disciple que Jésus aimait ».

    Mieux, croisant la méthode historique et l’analyse narrative, le Père Blanchard s’intéresse, dans chaque écrit, à ce que dit la « voix » du narrateur.

    La personnalité historique des auteurs compte peu aux yeux du Père Blanchard. Mais, dans l’écoute de la « voix narrative », apparaît un jeu subtil de présence et d’autorité entre le « je » qui raconte ou argumente, le « nous » de la communauté chrétienne et le « il » de la parole première, celle de Jésus-Christ.

    Au terme de l'analyse, la question du disciple ne se pose plus à propos de ceux qui ont vu autrefois le salut de Dieu, mais à propos de ceux qui le lisent aujourd’hui, dans les écrits johanniques et dans la vie de tous les jours. Le Père Yves-Marie Blanchard présente une argumentation serrée mais convaincante.

    Ce qui est essentiel ici, c'est de ne pas confondre le « disciple que Jésus aimait » avec le personnage historique de Jean, car le quatrième Évangile est un texte profondément symbolique, au sens fort, c'est-à-dire qu'il relie Dieu et l'humanité. A cet égard l'Évangile de Jean se présente comme un évangile théologique et anthropologique, qui nous parle de Dieu et de l'être humain. Sous un autre angle, l'Évangile selon Saint-Jean est aussi un évangile poétique. Il ne raconte pas la naissance de Jésus. La mère de Jésus apparaît pour la première fois aux noces de Cana et tout à la fin au pied de la Croix. Elle n'est jamais appelée par son nom mais par « la mère ». C'est d'ailleurs le seul des quatre évangiles qui la situe, avec Marie-Madeleine et le disciple bien-aimé, au pied de la Croix.

    L'écrivain l'appelle « la mère » pour insister non pas sur le personnage historique, mais sur sa fonction théologique, poétique et symbolique.

    De même, peu importe qui était « le disciple bien-aimé », il est notre ancêtre dans la foi. Relevons au passage la force de cette citation prononcée par le Père Gérard Billon, président de l'Alliance Biblique française.

     * Jean, un Evangéliste "à part". Pourquoi ?

    Pour le Père Billon, La Bible est le témoignage de l'amitié de Dieu pour le peuple humain.

    Jean, un apôtre atypique devenu le fils de Marie

    N.B. Notre blog vous propose une description exhaustive de Jean l'Évangéliste, personnalité riche et contrastée, et de son côté atypique. Lien direct avec le premier dossier consacré à saint Jean l'Évangéliste.

    En ce qui me concerne, je me contenterai – très modestement – de mettre en exergue un aspect de la personnalité de Jean qui m'a fortement interpellé, à savoir comment Jean est devenu le fils de Marie.

    Fils de Zébédée et frère de Jacques, surnommé « le fils du tonnerre » en raison de son tempérament ardent et destructeur comme un orage, Jean est le seul des Douze qui ait été présent au pied de la Croix.

    Le moins qu'on puisse dire, c'est que Jean a eu un destin extraordinaire. Tentons de l'expliquer.

    La nature du secret de saint Jean est à chercher dans le fait qu'il a été confié comme fils à la Vierge Marie et qu'ils se retrouvèrent ensemble pendant sans doute une vingtaine d'années !

    Mis en perspective, les grâces et les privilèges que saint Jean a reçus nous éclairent sur la qualité d' « aigle » que la Tradition reconnaît en lui (« aigle »  en raison notamment de l'acuité de son intelligence spirituelle).

     * Jean, un Evangéliste "à part". Pourquoi ?

    Jean a d'abord été disciple de Jean-Baptiste, puis disciple de Jésus pendant 3 ans. Ensuite, il a passé une vingtaine d'années seul avec la Vierge Marie, ce qui l'aida à mûrir cet évangile et à lui insuffler clairvoyance et précision. Ensuite, pendant 40 ans, Jean va enseigner oralement l'évangile avant de recevoir la grande révélation de l'Apocalypse. Une révélation qui donnera une vision plus aiguisée du mystère du Christ à travers la méditation de l'Incarnation, méditation que saint Jean creusa pendant de longues années avec la Vierge Marie.

    Le Pape Jean Paul II a très souvent insisté sur ce moment si important où Jésus va confier à sa Mère ce disciple qu'il aimait et qui l'aimait tellement, et dans lequel chaque disciple du Christ est invité à se reconnaître : « Le nom du disciple était Jean ».

     * Jean, un Evangéliste "à part". Pourquoi ?

    C'est précisément lui, Jean, fils de Zébédée, apôtre et évangéliste, qui entendit les paroles du Christ venant du haut de la Croix : « Voici ta mère ».

    Auparavant, le Christ avait dit à sa Mère : « Femme, voici ton Fils ». C'était là un testament admirable.

    En quittant ce monde, le Christ donna donc à la Mère un homme qui serait pour elle comme un fils : Jean.

    Il le lui confia. Et à la suite de ce don, Marie devint la mère de Jean. La mère de Dieu est devenue la mère de l'homme.

    Par la volonté du Christ, Jean est donc devenu le fils de la Mère de Dieu. Quoi de plus extraordinaire que ce destin !

    Pour plus de détails sur ce sujet, veuillez consulter : Au pied de la Croix (1)

    Jean, l'apôtre de l'amour

     * Jean, un Evangéliste "à part". Pourquoi ?

    Jean a eu un destin extraordinaire comme fils de la Mère, mais encore comme « préféré de Jésus ».

    J'en veux comme preuve supplémentaire le fait que, lors du repas de la Cène, Jésus invite Jean à se pencher sur sa poitrine. Par ce geste exceptionnel, Jésus tient à lui transmettre tout l’Amour débordant de son Divin Cœur.

    Jean, le plus pur de tous les apôtres, fut pressé par Pierre de demander secrètement à Jésus qui le livrerait aux mains des juifs. C’est Jésus qui demanda à Jean de s’incliner sur sa poitrine pour lui révéler le nom de celui d’entre eux qui le trahirait.

    Conclusion provisoire : la postérité de Jean

    Jésus a confié Jean à la Vierge Marie pour qu'il soit comme son fils. La Vierge obéissante va lui faire vivre à Ephèse ce que Jésus a vécu à Nazareth, en le faisant grandir de la même manière. La « Maison de Marie » à Ephèse préfigure en quelque sorte le premier monastère dans lequel Jean va prendre le temps d'approfondir puissamment le mystère du Christ, en compagnie de Marie, dans une vie de silence, de prière et de contemplation.

     * Jean, un Evangéliste "à part". Pourquoi ?

    Ce temps aura une immense postérité dans l'Eglise des religieux et religieuses, centrée sur la vie de prières, la contemplation et l'approfondissement du mystère du Christ, loin du monde, dans le silence d'une vie cachée comme l'écho de ce qu'ont vécu Marie et Jean.

    Recherches effectuées par le Frère Freddy D.

    pour le séminaire du 16 novembre 2018 à la Commanderie de St Léger

    Sitographie :

    https://www.bible-service.net/extranet/pages/716.html

    https://africa.la-croix.com/le-pere-gerard-billon-a-la-tete-de-lalliance-biblique-francaise/

    https://www.laprocure.com/biographies/Billon-G%C3%A9rard/0-1381315.html

    https://www.laprocure.com/biographies/Blanchard-Yves-Marie/0-1184807.html


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  • L'identité de Jean l'Évangéliste

     ou

    Jean, un Évangéliste à part ! Pourquoi ?

     * L'identité de Jean l'Evangéliste

    Ce parchemin a pour but de trouver une réponse succincte à la question qui m’a été proposée : « Jean, un Évangéliste à part ! Pourquoi ? ». Dans un souci de garder ce travail aussi court que possible, je me permettrai de ne pas faire une analyse approfondie mais plutôt de donner diverses pistes de réflexions et de rester aussi concentré que possible à la question posée.

    Néanmoins, avant même de pouvoir commencer à formuler une ébauche de réponse, il y a une autre question qui doit d'abord être envisagée, à savoir :

    Qui est Jean l'Évangéliste ?

    Ce que nous entendons par « Jean l'Évangéliste », c'est l'auteur de six textes du Nouveau Testament :

      * L'identité de Jean l'Evangéliste   * L'identité de Jean l'Evangéliste 

                                                                                      Le Prologue                                             L'Evangile

     * L'identité de Jean l'Evangéliste  * L'identité de Jean l'Evangéliste  * L'identité de Jean l'Evangéliste  

    Les trois Épitres (ou Lettres) de saint Jean

      * L'identité de Jean l'Evangéliste

    à savoir : 

    * le Prologue

    * l'Evangile selon saint Jean

    * La première Épitre de Jean

    * La deuxième Épitre de Jean

    * La troisième Épitre de Jean

    * L'Apocalypse

    Traditionnellement, l'auteur de ces cinq textes est Jean, fils de Zébédée, un des douze disciples de Jésus, un pêcheur, mais ceci est contesté par certains historiens qui attribuent plutôt ces textes à Jean le Presbytre, un riche patricien de Jérusalem, ayant eu probablement plus d'éducation que Jean, fils de Zébédée, ce qui se ressent dans la profondeur des écrits.

      * L'identité de Jean l'Evangéliste    * L'identité de Jean l'Evangéliste

                                                  Jean, fils de Zébédée                                                    Jean le Presbytre

    Une autre piste intéressante, c’est que ces textes auraient été écrits par une communauté, une école, l'école dite « johannique », plutôt que par un seul individu.

    Et pour finir sur cette question, une autre hypothèse est que l'Apocalypse n'a pas été écrite par le même auteur que les 5 premiers textes, malgré des similitudes entre eux. L’Apocalypse aurait été écrite par Jean le Presbytre et les 5 premiers par Jean, fils de Zébédée.

    Donc, dans le cadre de la question qui nous intéresse, à savoir « Pourquoi Jean serait-il un Évangéliste à part ? », nous devons comprendre « Jean » comme l'auteur ou les auteurs de ces six textes, peu importe qui les a écrits réellement. Ces textes sont basés sur la même tradition et leur contenu les met à part, comparé aux autres textes du Nouveau Testament. Je cite saint Augustin dans « L'Accord des Évangélistes » (403-404) :

     * L'identité de Jean l'Evangéliste

    « Si donc vous prêtez une sérieuse attention, vous verrez que les trois premiers Évangélistes qui se sont attachés principalement dans leur récit aux faits de la vie mortelle de Notre Seigneur, et aux paroles qui tendent à la sanctification de la vie présente, semblent avoir eu pour objet la vie active [du Christ]. Saint Jean, au contraire, raconte peu de faits de la vie de Notre Seigneur, mais il reproduit dans toute leur étendue et avec le plus grand soin ses discours, surtout ceux qui traitent de l’unité des trois personnes divines et du bonheur de la vie éternelle, et paraît avoir eu pour dessein et pour fin dans son récit, de relever le mérite de la vie contemplative ».

    Donc, ce que nous trouvons dans les textes de saint Jean, c'est le fond de l'enseignement ésotérique chrétien. C'est par ces enseignements que nous pouvons mieux comprendre celui qui restera le plus difficile à comprendre, notre Seigneur, et dès lors mieux le servir.

    Mais, le plus important, ce qui met à part des autres auteurs « Jean l'Evangéliste », auteur de ces textes, c'est sa focalisation sur le commandement du Christ. En effet, le Christ est venu pour remplacer tous les commandements par un seul, résumant tous les autres : aimez-vous les uns et les autres.

    Jean met cet Amour au premier plan de son Évangile et par ses Épitres, nous enseigne comment et pourquoi nous devons respecter cet unique commandement. Il n'y a rien d'autre de nécessaire pour être « un » avec le Christ et le Seigneur.

     * L'identité de Jean l'Evangéliste

    L'Apocalypse, par contre, est un livre prophétique, contrairement aux autres écrits, même si nous pouvons tisser des liens entre les enseignements ésotériques et l'Apocalypse. Justement, l'Apocalypse n'est qu'un enseignement ésotérique et nous montre la voie dans laquelle nous nous engageons si nous respectons, ou pas, les enseignements du Christ.

    Elle est la juste conclusion des autres écrits et permet de faire un tout, entre le Prologue de Jean qui nous explique le commencement, et l'Apocalypse qui nous explique la fin.

     * L'identité de Jean l'Evangéliste

    En conclusion, je vous invite à ouvrir votre Bible, à relire les 5 premiers textes, de les méditer et vous laisser transporter dans les profondeurs de l'immensité divine, de vous laisser envelopper par son Amour, et au moment où vous revenez ici-bas, de lire l'Apocalypse et de vous envoler vers la Jérusalem Céleste. Aucun autre texte ne pourra vous transporter aussi loin et aussi près du divin créateur, notre Alpha et notre Oméga.

     * L'identité de Jean l'Evangéliste

    Recherches effectuées par le Frère Écuyer Kevin R. de la Commanderie Majeure ND du Temple

    Mise en page et illustrations par le Frère André B.


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  • Un miracle aux noces de Cana

     * Les Noces de Cana

    A l’aide de ce parchemin, j’aimerais aborder un passage de l’Évangile selon saint Jean, parmi les plus connus, et mettre en avant différentes interprétations auxquelles nous ne pensons pas souvent, au moins pour beaucoup de personnes... Bienheureux ceux qui savent décrypter les sens spirituels les plus élevés de chaque Parole de Jésus !

    Je vous propose d’examiner un épisode dans la vie de Jésus qui a eu lieu au début de son ministère, après son baptême et sa tentation au désert. Ce passage de la Bible est, bien sûr, important. Mais, en même temps, il est souvent mal compris parce qu’il y a une tendance dangereuse à voir dans le texte ce qui ne s’y trouve pas. Il s’agit du récit du miracle que Jésus a fait aux noces de Cana, en Galilée, qui nous est conservé dans l’Évangile de Jean.

     * Les Noces de Cana

    Écoutons d’abord la parole de Dieu ou relisons cet extrait :

    ÉVANGILE SELON SAINT JEAN - Chapitre 2.1-11

    En ce temps-là, il y eut un mariage à Cana de Galilée. La mère de Jésus était là.

    Jésus aussi avait été invité au mariage avec ses disciples. Or, on manqua de vin.

    La mère de Jésus lui dit : « Ils n’ont pas de vin ».

    Jésus lui répond : « Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue ».

    Sa mère dit à ceux qui servaient : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le ».

    Or, il y avait là six jarres de pierre pour les purifications rituelles des Juifs ; chacune contenait deux à trois mesures, (c’est-à-dire environ cent litres).

    Jésus dit à ceux qui servaient : « Remplissez d’eau les jarres ».

    Et ils les remplirent jusqu’au bord.

    Il leur dit : « Maintenant, puisez, et portez-en au maître du repas ».

    Ils lui en portèrent. Et celui-ci goûta l’eau changée en vin.

    Il ne savait pas d’où venait ce vin, mais ceux qui servaient le savaient bien, eux qui avaient puisé l’eau.

    Alors le maître du repas appelle le marié et lui dit : « Tout le monde sert le bon vin en premier et, lorsque les gens ont bien bu, on apporte le moins bon. Mais toi, tu as gardé le bon vin jusqu’à maintenant ».

    Tel fut le commencement des signes que Jésus accomplit. C’était à Cana de Galilée.

    Il manifesta sa gloire, et ses disciples crurent en lui.

     * Les Noces de Cana

    Quelles leçons pouvons-nous tirer de cet extrait de l’Évangile de Jean ?

    Plusieurs leçons ont été tirées de cette histoire.

    1. Par exemple, le fait que Jésus a accepté une invitation à un festin de mariage suggère que le Seigneur approuvait le mariage. Il ne voyait rien de condamnable dans le fait de se marier. Rester célibataire n’est pas forcément plus saint que se marier.
    2. Dans cette histoire on voit aussi la compassion de Jésus. Le couple qui se mariait tenait sûrement beaucoup à la réussite du festin. C’était la sorte de célébration qu’on faisait une seule fois dans la vie. Manquer de provisions avant la fin aurait été pour ce couple un sujet de grande honte devant tous ses amis. Leur joie aurait été changée en désolation. Jésus a eu pitié de leur sort. En leur fournissant du vin, il les a sauvés du mépris de tout le village et ses alentours.
    3. On peut aussi souligner que lorsque Jésus faisait quelque chose, il le faisait bien. Le vin qu’il a fait par ce miracle était le meilleur vin qu’on avait bu. Comme la foule a témoigné au sujet de Jésus lors d’un autre miracle : « Il fait tout à merveille » (Marc 7.37).

     * Les Noces de Cana

    Il y aurait aussi deux leçons qu’on ne peut pas en tirer.

    1. Une leçon qu’on ne doit pas tirer de cette histoire est que Jésus approuvait la consommation des boissons alcoolisées. Le passage n’enseigne pas cela.

    1.1. Quand nous employons le mot « vin » en français aujourd’hui, nous pensons à une boisson qui contient de l’alcool. Mais dans notre Nouveau Testament, qui a été écrit en grec, le mot « vin » est employé pour traduire un mot grec (oinos) qui avait un sens plus large. Il signifiait le jus du raisin, quelle que soit sa forme. C’est-à-dire, le mot était employé pour parler du jus quand il était encore dans le fruit, quand on venait le presser, quand il était fermenté, ou quand il était bouilli pour qu’il ne devienne pas fermenté.

    1.2. On pense souvent que dans l’ancien temps on n’avait pas les moyens techniques pour conserver le jus sans qu’il se mette à fermenter. Donc on n’aurait pas eu la possibilité de boire du jus de raisin non-fermenté, sauf au temps de la vendange. En réalité, la littérature du temps de Jésus montre clairement qu’on avait des méthodes pour conserver le jus non-fermenté, une boisson bien sucrée. Ceci est vrai pour les Juifs aussi bien que pour les non-juifs. Pour parler de ces boissons sucrées, on employait le même mot, « oinos », ou vin.

    1.3. Ces vins non-fermentés, sans alcool, étaient très appréciés à l’époque. On considérait que leur goût et leur qualité dépassaient ceux des vins fermentés.

    1.4. Le rabbin S.M. Isaacs de New York, a dit ceci :

    « Dans la terre sainte on n’emploie pas communément les vins fermentés. Les meilleurs vins sont conservés sucrés et non-fermentés… Les Juifs n’emploient jamais, dans leurs festins sacrés, y compris dans le festin des noces, le mariage, des boissons alcoolisées quelconques. Dans leurs libations ils emploient le fruit de la vigne, c’est-à-dire des raisins frais – le jus de raisin non-fermenté, et des raisins, comme symbole de bénédiction… la fermentation est toujours pour eux un symbole de corruption, de décomposition ».

    Nous devons donc enlever de notre esprit dès le départ cette fausse idée que par ce miracle Jésus ait donné son approbation à la boisson alcoolisée. La Bible ne dit pas que Jésus a fait de l’alcool. Les hommes en son temps connaissaient le vin sans alcool. Ils le respectaient beaucoup, et c’est probablement ce qui aurait été utilisé à l’occasion d’un mariage – le jus de raisin non-fermenté.

    2. Une autre leçon qu’on ne peut pas tirer de cette histoire est que les hommes peuvent passer par Marie pour obtenir des faveurs de la part de Jésus. Certains font remarquer que dans cette histoire, le couple qui se mariait avait un problème et que c’est Marie qui a porté le problème devant son Fils, qui n’a pas pu lui refuser ce qu’elle demandait. Ils estiment que même aujourd’hui, Marie nous servira de médiatrice. Si nous disons à Marie ce dont nous avons besoin, elle le dira à son Fils Jésus. Puisqu’elle est sa mère, il est sûr de lui accorder la faveur.

    Mais avant de décider ce que le passage enseigne, nous avons besoin de l’étudier.

     * Les Noces de Cana

    Une première chose donc qui nous frappe dans ce texte est la manière dont Jésus s’adresse à Marie. Au lieu de l’appeler «ma mère», il dit : « Femme, qu’y a-t-il entre moi et toi ? » En français ce serait certainement manquer de respect, surtout envers sa propre mère. L’expression en grec n’était pas impolie, et la littérature grecque en dehors de la Bible contient plusieurs exemples où elle fut employée par des personnes en s’adressant à des femmes qu’elles aimaient bien. Ce n’était quand même pas un terme employé habituellement en parlant à sa mère. Jésus l’utilisait généralement quand il parlait à d’autres femmes, aussi. En Matthieu 15.28, il dit à la femme cananéenne qui demandait la guérison de sa fille : « Femme, ta foi est grande ; qu’il te soit fait comme tu veux ». En Jean 4.21 Jésus parle avec une femme samaritaine : « Femme, lui dit Jésus, crois-moi, l’heure vient où ce ne sera ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père ». En Jean 8.10,11 nous le voyons en face de la femme qui avait été prise en flagrant délit d’adultère. Jésus lui dit : « Femme, où sont ceux qui t’accusaient ? Personne ne t’a-t-il condamnée ? » Elle répondit : « Non, Seigneur. Et Jésus lui dit : Je ne te condamne pas non plus. Va, et ne pèche plus ». En s’adressant ainsi à sa propre mère Jésus indique peut-être qu’il voulait éliminer l’aspect de mère et fils dans ses relations avec Marie du moment où il entrait dans son ministère public. En appelant sa propre mère «Femme», Jésus ne la traitait pas avec mépris, mais il n’accordait pas plus d’honneur à Marie qu’à d’autres femmes. On a la nette impression qu’au lieu d’accentuer la relation mère et fils, Jésus la minimisait.

    Notons aussi que la relation que tout croyant peut avoir avec Jésus en vertu de notre obéissance à la Parole de Dieu est plus importante que la relation que la mère et les frères physiques de Jésus pouvaient réclamer en vertu de leur lien charnel avec lui. Ils n’avaient pas de privilèges particuliers. Ils n’avaient pas de priorité en ce qui concerne l’attention de Jésus.

     * Les Noces de Cana

    Gérard David - Cana

    Dans ce passage nous sommes aussi frappés par la phrase que Jésus adresse à Marie : « Qu’y a-t-il entre moi et toi ? Mon heure n’est pas venue ». En fait, la phrase « qu’y a-t-il entre moi et toi ? » servait généralement à repousser une intervention non-voulue. Nous voyons par la suite de l’histoire que Marie ne l’a pas interprétée comme un refus catégorique d’aider dans cette situation, mais on peut considérer que Jésus dit à Marie qu’elle n’a pas à lui dicter quand et comment il exercera son ministère ou emploiera son pouvoir miraculeux. Loin de justifier l’idée de certains qui pensent qu’en s’adressant à Marie on peut obtenir de Jésus ce que l’on veut, nous voyons que Jésus met une certaine distance entre lui et celle qui l’a mis au monde physiquement. Jésus est intervenu pour résoudre le problème comme Marie l’avait apparemment espéré, mais il semble qu’elle a aussi compris le doux reproche que Jésus lui avait adressé. En effet, elle n’a plus cherché à guider Jésus ou lui proposer des œuvres à accomplir jusqu’à la fin de son temps sur la terre. D’autres femmes seront avec lui et l’assisteront de leurs biens (Luc 8.2-3), mais nous ne verrons plus Marie, sauf au pied de la croix. Ayant dit que son heure n’était pas venue de manifester son identité, Jésus fait le miracle de telle manière que seuls les disciples et les serviteurs l’ont su.

    Rappelons-nous que d’autres personnes aussi ont obtenu des miracles par leur prière. Qu’on se souvienne, par exemple de la prière de la femme païenne, syrophénicienne de naissance, qui obtint la miraculeuse guérison de sa petite fille, quoique Jésus lui ait dit qu’il était envoyé seulement pour les « enfants d’Israël » (Marc 7.27). Pourtant, ces personnes ne deviennent pas médiatrices de grâces pour nous. Ce qu’elles ont obtenu une fois ne peut pas constituer une règle pour tout le monde et tous les temps. Ce qu’ils ont personnellement accompli pendant qu’ils étaient en vie n’est pas une démonstration qu’ils puissent le faire aussi après leur mort. Au contraire, la Bible nous avertit clairement que Dieu ne veut pas que les hommes s’adressent à ceux qui sont déjà morts, comme Marie est morte. « Si quelqu’un s’adresse aux morts et aux esprits, pour se prostituer après eux, je tournerai ma face contre cet homme, je le retrancherai du milieu de son peuple » (Lévitique 20.6). « Un peuple ne consultera-t-il pas son Dieu ? S’adressera-t-il aux morts en faveur des vivants ? À la loi et au témoignage ! Si l’on ne parle pas ainsi, il n’y aura point d’aurore pour le peuple » (Ésaïe 8.19,20).

    La Bible n’enseigne nulle part que les chrétiens peuvent (ou ont besoin de) passer par Marie pour obtenir des faveurs de Jésus. Il est lui-même prêt à nous assister.

    Jésus est bien compatissant, et il se tient toujours prêt à secourir ses disciples. Au lieu de fixer notre attention sur Marie, nous ferions mieux de suivre la parole que Marie à dite aux serviteurs ce jour-là à Cana au sujet de Jésus : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le ».

    D’après une publication sur le blog « Descendu Vers Nous »

     * Les Noces de Cana

    Maarten De Vos - Cana

    Les Noces de Cana : le sens du texte

    Que signifie cette noce de Cana où Jésus semble se plier à la demande de sa mère, d’autant que l’obéissance à ce geste, dans un autre contexte, est loin d’être digne, puisqu’elle risque de conduire les invités à l’ivresse ?

    A travers une action chargée de symbolisme, la manifestation divine qui se déploie, va emporter l’adhésion des derniers récalcitrants campés derrière leurs doutes : le miracle de Cana s’achève par l’adhésion des disciples qui « crurent en lui ».

    Ici à Cana, Jésus n’enseigne pas par des paroles, il agit. Il manifeste la puissance divine. Toute la force de cet épisode réside dans le geste, accompagné de peu de mots.

    L’épisode de Cana est un moment festif au cours duquel Jésus transforme beaucoup d’eau en vin. Il s’agit bien d’une noce, au cours de laquelle se déploie un événement important de manifestation divine, comme au Baptême ou à la Transfiguration.

    Derrière l’aspect matériel du vin et de l’eau, c’est tout un essentiel qui est présenté. Tout d’abord, nous observons la réaction de Jésus face à la demande de sa mère qui, humainement parlant, en fait un peu trop. En effet, elle le pousse à se montrer là où il semble qu’il ne voulait pas aller, en tout cas pas si tôt.

    Moïse, afin de convaincre Pharaon de laisser partir le peuple d’Israël, avait changé l’eau du Nil en sang (Ex 7,14-25). Jésus est présenté ici comme un nouveau Moïse.

    Un autre aspect du vin qui mérite d’être abordé est celui de la fête. En effet il ne peut y avoir de réjouissances sans le vin…

    Dans l’Ancien Testament, particulièrement chez les prophètes, on trouve le vin lors du festin messianique (« Yahvé Sabaot prépare pour tous les peuples, sur cette montagne, un festin de viandes grasses, un festin de bons vins, de viandes moelleuses, de vin dépouillés ») ou dans des descriptions eschatologiques (« Ce jour-là, les montagnes dégoutteront de vin nouveau » ; « Les montagnes suinteront de jus de raisin, toutes les collines deviendront liquides ».

    Quelle est donc la portée de ce vin qui coule à flot pour marquer la fête, la joie et que l’on sert autant pour les mariages que pour des retrouvailles longuement attendues ?

    L’abondance dans les textes bibliques rappelle le don de Dieu. Toute abondance trouve sa source dans le don que Dieu fait aux hommes.

    A travers un geste qui semble bien banal, c’est le Christ qui se manifeste en tant que Fils de Dieu. Ce premier signe de Jésus réunit deux substances distinctes en une seule pour donner lieu à un miracle : l’eau transformée en vin. Ce signe placé au début de la vie du Christ évoque déjà l’ultime mystère de Jésus-Christ au cours du dernier repas avant sa crucifixion où il transforme le vin en sang.

    Miracle parallèle à celui de la multiplication des pains, il préfigure l’Eucharistie et toute une série d’évènements qui conduisent vers la reconnaissance de Jésus Christ comme Fils de Dieu.

     * Les Noces de Cana

    Véronèse - Les noces de Cana

    Les personnages principaux

    Jésus-Christ

    Au cours de son périple à travers la Galilée et la Judée, Jésus est invité à des noces à Cana de Galilée, le troisième jour après la promesse qu’il a faite à Nathanaël, disciple originaire de Cana, de voir de grandes choses s’il se met à sa suite…

    Cette fête à Cana inaugure ce que l’on appelle « la vie publique de Jésus ». Au-delà de l’histoire d’un jour, Jean invite à comprendre la vie de chaque jour comme les épousailles entre Dieu et l’humanité.

    Marie, la mère de Jésus

    Invitée, elle agit comme si elle se sentait concernée par la désorganisation du repas de noces. Pour cela, elle incite son fils à agir, sachant au fond d’elle-même qu’il peut intervenir, mais à un moment qui n’est pas encore celui que Dieu a choisi pour manifester le Christ comme Dieu sauveur.

    Jésus exprime la différence qui existe entre lui, le Fils de Dieu et Marie. Certes, elle est sa mère, mais elle n’a pas d’ordres à donner au Seigneur ni à s’immiscer dans son ministère. Il ne lui manque pas de respect, mais lui donne à comprendre qu’il agit indépendamment, en vertu de sa seule autorité, et que dans l’exercice de sa mission, il n’est tributaire d’aucun lien naturel.

     * Les Noces de Cana

    Le marié et l’épouse

    En donnant lui-même du vin destiné aux invités, Jésus prend la place de l’époux, bien silencieux par ailleurs. La remarque du maître du festin au marié, à qui il attribue le mérite d’avoir gardé le meilleur vin pour la fin, semble indiquer que c’était au marié que revenait une certaine responsabilité quant au vin !

    Par ailleurs rien n’est dit quant à l’épouse. Quand on demande où est la mariée dans cette scène champêtre au village de Cana, on est bien en peine de répondre… Jean ne la décrit pas, ne signale pas sa présence. Cet indice invite à rechercher la dimension spirituelle que Jean a voulu donner à son récit.

    Le maître du repas, l’intendant

    Il rappelle la coutume d’organisation du repas en positionnant le vin moins bon après que les papilles des invités soient quelque peu diminuées par les premières coupes. D’ailleurs il se trompe en croyant le marié responsable de la qualité du vin servi jusqu’alors.

    Les serviteurs

    Les plus humbles de la scène, témoins directs de l’eau changée en vin, acteurs impliqués dans le travail de remplir les 6 jarres jusqu’au bord, ils obéissent à l’injonction d’une invitée leur demandant de faire ce qu’un autre invité leur ordonnera. Malgré le côté insolite de la situation, ils restent discrets après le signe manifesté. Rien n’est dit quant à leur foi éventuelle en Jésus-Christ.

    Les disciples

    Chez l’Évangéliste Jean, le signe manifesté est souvent le point de départ de la foi des disciples du Christ. Jésus vient de leur révéler son identité. Les disciples commencent à entrer dans la foi.

    La situation géographique

    Cana, de l’hébreu qaneh, « roseau ». Petite localité de Galilée, sa localisation reste incertaine, certains la plaçant à Kafr Kanna à 8 kms au nord de Nazareth, mais il semble plus cohérent de la placer à 14 km au nord de Nazareth, à Khirbet Qana dont l’environnement marécageux pourrait justifier la racine de son nom.

     * Les Noces de Cana

    Giotto - Les noces de Cana

    Autres réflexions

    En finale de ce récit, saint Jean caractérisera les Noces de Cana comme le commencement des signes de Jésus, la manifestation de sa gloire et le premier accès des disciples à la foi. Ces expressions si fortes suggèrent donc que ce simple épisode recèle en fait de très riches symboles, spécialement celui des noces *.

    * Les noces. Les prophètes ont comparé à un mariage l’Alliance entre Dieu et son peuple. Mais souvent l’expérience du péché les ont conduits à considérer Israël comme une épouse infidèle (voir Ézéchiel 16). C’est pourquoi ces noces devinrent objet d’espérance. Un jour, la tendresse divine restaurerait l’union bafouée : « Crie de joie, femme stérile, toi qui n’as pas enfanté ; jubile, éclate en cris de joie, toi qui n’as pas connu les douleurs ! Car les fils de la délaissée seront plus nombreux que les fils de l’épouse » – dit le Seigneur (Isaïe 54, 1-8).

    Un terme finalement, difficile à traduire. Le lectionnaire introduit l’épisode en ces termes : Il y eut un mariage à Cana. Mais, autre traduction équivalente : « Il y eut une noce à Cana ». Notre tradition parle des Noces de Cana, au pluriel.

    Aurions-nous, dans notre langage d’aujourd’hui, quelque difficulté à distinguer entre «célébrer des noces» et «faire la noce» ?

     * Les Noces de Cana

    La mère de Jésus

    La mère de Jésus (Jean ne l’appelle jamais autrement) est interpellée en tant que Femme (comme au pied de la croix, Jean 19, 26). Elle représente Israël, figure féminine dans la Bible, mais cet Israël qui accueille Jésus et qui, au calvaire, sera confié au Disciple bien-aimé pour devenir l’Église (voir Jean 19, 25-27). Que me veux-tu ? Cette question marque une certaine distance. La mère de Jésus, l’Église, doit comprendre que l’Heure n’est pas encore venue, l’heure de la croix où se révélera le don total de l’amour de Dieu (Jn 19, 30.34) à travers l’effusion de l’eau, du sang et de l’esprit (ou l’Esprit). Mais la Femme anticipe cette heure par sa prière discrète qui nous vaut un premier signe. Tout ce qu’il vous dira, faites-le, demande-t-elle aux serviteurs. Elle relance ainsi l’engagement prononcé par Israël au pied du Sinaï : Tout ce que le Seigneur a dit, nous le ferons (Exode 19, 8).

     * Les Noces de Cana

    Le vin

    Le vin, élément nécessaire à la fête, annonçait aussi dans la Bible la venue de Dieu ou de son Messie, une ère prospère où le vin coulerait à flots (voir Osée 2, 21-24 ; Isaïe 62, 9). Or, ce temps heureux est venu, signifié, dans le miracle, par l’équivalent de quelque 700 ou 800 bouteilles. Jean insiste sur le support de la merveille : six jarres de pierre destinées aux rites de purification, le chiffre six symbolisant l’imperfection (signe de l’époque de la pierre, c’est-à-dire des « cœurs de pierre », Ézéchiel 36, 26). Ainsi Jésus comble de sa présence (jusqu’au bord !) l’histoire d’Israël parvenue à épuisement.

    Dans l’Antiquité, le vin était un produit de luxe. En effet, les pressoirs n’étaient pas alors ce qu’ils sont devenus avec la mécanisation. Les fouleurs s’affairaient nuit et jour pour extraire le jus de raisins écrasés Après le temps de la fermentation, le jus, tannique à souhait, était conditionné dans des jarres, tel quel : on peut comprendre pourquoi, à la Cène Jésus ajouta de l’eau à son vin. Ce n’est pas juste un symbole. Il y a aussi l’aspect pratique : le vin était imbuvable sans l’ajout d’eau. Le vin que produisaient les vignerons de l’Antiquité était extrêmement fort en alcool, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui !

    Qui est le marié ?

    Au marié et au maître du repas revenait le soin de fournir la noce en vin. Les deux personnages sont de pâles anonymes dans cet épisode et l’interpellation finale adressée au marié explique cet anonymat : le vrai maître du festin et le véritable Époux, encore ignoré des convives, est Jésus lui-même, comme le disent aussi les autres Évangiles (voir Marc 2, 18-20). L’histoire sainte d’Israël avait déjà du vin à offrir, mais du moins bon. Dieu a gardé le bon vin jusqu’à maintenant, c’est-à-dire jusqu’à la manifestation de son Envoyé.

     * Les Noces de Cana

    Le commencement des signes

    Ses disciples crurent en lui, à commencer par la mère de Jésus qui s’affirme ici comme l’avant-garde des croyants. Cette foi, Jean ne la fonde pas sur un stock inespéré de bon vin, mais sur la capacité des lecteurs que nous sommes à saisir sous le récit les signes bibliques, inscrits dans les symboles de l’Ancien Testament, de la venue de Jésus. De la page de l’évangile, le lecteur d’aujourd’hui doit passer aux signes que le Seigneur continue d’opérer quand nous lui avouons nos manques de fête, de vie et de bonheur.

    Le Nouveau Testament voit dans l’œuvre de Jésus, surtout dans son triomphe pascal, la réalisation des noces espérées (l’Apocalypse de Jean parle des noces de l’Agneau, Apocalypse 19, 7; cf. 21, 2.9). Les Évangélistes voient en Jésus lui-même l’Époux qui ouvre sur terre une ère de joie (Matthieu 9, 15), un époux qu’il faut encore attendre dans la vigilance (ibid., 25, 1-6), mais qui entretient déjà avec son Église des liens d’amour nuptial (Éphésiens 5, 25-32). Le mariage chrétien, quand il tient bon, veut témoigner de cette union de Dieu avec son peuple.

    Commentaires du Père Claude Tassin - Congrégation du Saint-Esprit en France

     * Les Noces de Cana

    Une noce

    Nous voici dans le cadre des sept jours de la Création. L’épisode des noces de Cana, un septième jour, lui fait donc un lointain écho : car, en réalité, à Cana, Jésus ne se contente pas de multiplier le vin, il le crée. Comme au commencement de toutes choses, le Verbe était tourné vers Dieu pour créer le monde, une nouvelle étape s’inaugure à Cana : la création nouvelle a commencé.

    Et il s’agit d’une noce ! On pourrait continuer le parallèle : au sixième jour, Dieu avait achevé son œuvre par la création du couple humain à son image. Au septième jour de la nouvelle création, Jésus participe à un repas de noces. Manière de dire que le projet créateur de Dieu est en définitive un projet d’alliance, un projet de noce. Les Pères de l’Église ne se sont pas privés de voir dans le miracle de Cana la réalisation de la promesse de Dieu : la fête des noces de Dieu avec l’humanité débute là.

    C’est pour cela que le mot « Heure » chez Jean est si important : il s’agit de l’Heure où le projet de Dieu a été définitivement accompli en Jésus-Christ. C’est bien à cela que Jésus pense quand il dit à Marie : « Femme, que me veux-tu ? Mon Heure n’est pas encore venue ». Visiblement ses préoccupations sont au-delà du problème matériel du manque de vin : il ne perd pas de vue sa mission qui est d’accomplir les noces de Dieu avec l’humanité.

     * Les Noces de Cana

    Mais la première phrase (« Femme, que me veux-tu ? ») reste surprenante et on a beaucoup épilogué. En réalité, dans le texte grec, c’est « Qu’y a-t-il pour toi et pour moi ? » autrement dit : « Tu ne peux pas comprendre ». Jésus affronte là, seul, la grande question de sa mission : pour accomplir cette mission, concrètement, que doit-il faire ? Doit-il créer du vin ? Et ainsi manifester qu’il est le Fils de Dieu ?

    On a peut-être ici, dans l’Évangile de Jean, un écho du récit des Tentations dans les Évangiles synoptiques. Ce qui expliquerait, d’ailleurs, la sécheresse apparente de la phrase de Jésus à sa mère. Au désert, dans l’épisode des Tentations, la question qui s’est posée à Jésus était : « Qu’est-ce, au juste, être Fils de Dieu ? » et le Tentateur lui avait susurré : « Si tu es vraiment le Fils de Dieu, maintenant que tu as faim, ordonne que ces pierres deviennent du pain ». On remarquera une chose : quand il est seul au désert, Jésus refuse de faire les miracles que lui suggère le Tentateur, car il en serait le seul bénéficiaire. À Cana, au contraire, Jésus multiplie le vin de la fête pour la joie des convives. Ce qui revient à dire que le Fils de Dieu ne fait de miracles que pour le bonheur des hommes.

    Commentaires de Marie-Noëlle Thabut

     * Les Noces de Cana

    En guise de conclusion

    Cana, n’est-ce pas le signe de la Nouvelle Alliance que Jésus est venu nous apporter ?

    Jésus a choisi des Noces pour réaliser le premier signe de sa vie publique, preuve que le mariage est une grande vocation.

    C’est là le signe de l’alliance nouvelle et éternelle signifiée par Jésus-Christ, avec le signe du vin.

    Ce vin auquel nous goûtons tous les jours dans l’Eucharistie, c’est le vin de son Sang.

    Le vin de Cana était un bon vin :

    • signe de toutes les bonnes choses que le Seigneur veut faire dans nos vies,
    • signe de ce bonheur qu’Il veut nous donner,
    • signe déjà des fruits de l’Esprit que nous pouvons goûter dans notre vie spirituelle.

    Ce vin de la paix, de la joie, cette allégresse qui est donnée par la présence même du Fils de l’Homme.

    Jésus qui est l’artisan de cette transformation d’une eau triste en vin joyeux.

    C’est lui qui ordonne et dispose, c’est lui qui réalise.

    Mais il ne fait pas tout et il nous faut mesurer l’effort qu’a dû demander aux serviteurs, l’acte de remplir six cuves de 100 à 150 litres ! Ils ont remonté cette eau du puits dans des cuves de purification.

    Dieu ne transforme pas à partir de rien. Ce n’est pas de la magie.

    Ainsi, l’alliance que le Seigneur veut faire avec nous demande un certain nombre d’efforts.

    Il nous faut lui montrer notre bonne volonté en apportant notre eau… une eau pas toujours très claire mais peu importe.

    Apporter au Seigneur nos vies pas toujours très propres, apporter surtout le dépôt qui peut se former dans le fond et que l’on ne veut pas toujours remuer, pour nous donner ainsi l’illusion que notre eau est claire ! Jésus est venu faire alliance avec l’humanité, et une humanité pécheresse.

    Jésus demande aux serviteurs de remplir les jarres « jusqu’au bord ».

    Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus nous dit qu’il faut se présenter devant Dieu avec toute sa capacité. Il y a un point commun entre un dé à coudre et une jarre de 100 litres : c’est qu’ils peuvent être chacun plein à ras bords. L’effort dans notre vie spirituelle sera d’être toujours plein avec cette capacité que le Seigneur nous donne d’augmenter notre capacité d’aimer.

    Cela demande des « étirements » progressifs.

    Il faut du temps, et ça fait mal parfois.

    N’oublions pas cette présence fondamentale de la Vierge Marie, discrète :

    « Faites tout ce qu’il vous dira ».

    Le pouvoir de la Vierge Marie sur le cœur de Dieu, sur le cœur des hommes est manifesté dans cette toute petite phrase.

    Le but, ce n’est pas la Vierge Marie mais l’Alliance avec Dieu.

    Le but, c’est que nous connaissions le vin de la joie en participant à la Résurrection de Jésus.

    Synthèse de recherches mise en page par le Frère André B., G.C.P.

    Lien vers un autre parchemin traitant du même sujet : Les Noces de Cana

    Références :

    http://www.chretiensaujourdhui.com/livres-et-textes-et-personnages/les-noces-de-cana/

    http://theopedie.com/Que-signifie-le-miracle-des-noces-de-Cana.html

    http://thierry.jallas.over-blog.com/article-commentaires-de-marie-noelle-thabut-annee-liturgique-c-2e-dimanche-du-temps-ordinaire-20-janvier-114390347.html

    https://www.descenduversnous.com/la-vie-dissa-al-masih/7-le-miracle-aux-noces-de-cana/

    http://reflexionchretienne.e-monsite.com/pages/reflexions-personnelles-26-50/39-les-noces-de-cana-signe-de-l-eucharistie-1ere-partie/39-les-noces-de-cana-signe-de-l-eucharistie.html


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  • Jésus ressuscite Lazare

     * La résurrection de Lazare

    Jean Jouvenet - La résurrection de Lazare

    Par ce parchemin, j’aimerais aborder un passage de l’Évangile selon saint Jean, généralement bien connu, que l’on entend parfois lors d’une messe de funérailles.

    Il s’agit du récit de la résurrection de Lazare. L'explication qui en est donnée ne nous semble pas toujours très satisfaisante. On s'en tient à la description physique et à tout ce qui entoure les sentiments humains en de telles circonstances. Il me semble que ce ne soit pas raisonnable de commenter ce texte sans lui donner une référence symbolique que nous ne retrouvons pas dans les homélies et discours que nous pouvons entendre à l'église.

    Écoutons d’abord la parole de Dieu ou relisons cet extrait :

    Extrait de l’Évangile de Jean : Jean 11.1-57

    1 Il y avait un homme malade ; c'était Lazare de Béthanie, le village de Marie et de sa sœur Marthe.

    2 Marie était celle qui versa du parfum sur les pieds du Seigneur et qui les essuya avec ses cheveux; c'était son frère Lazare qui était malade.

    3 Les sœurs envoyèrent dire à Jésus : « Seigneur, celui que tu aimes est malade ».

    4 A cette nouvelle, Jésus dit : « Cette maladie n'aboutira pas à la mort, mais elle servira à la gloire de Dieu, afin qu'à travers elle la gloire du Fils de Dieu soit révélé ».

    5 Or, Jésus aimait Marthe, sa sœur et Lazare.

    6 Quand il eut appris que Lazare était malade, il resta encore deux jours à l'endroit où il était.

    7 Puis il dit aux disciples : « Retournons en Judée ».

    8 Les disciples lui dirent : « Maître, tout récemment les Juifs cherchaient à te lapider et tu retournes là-bas ? ».

    9 Jésus répondit : « N'y a-t-il pas douze heures de jour ? Si quelqu'un marche pendant le jour, il ne trébuche pas, parce qu'il voit la lumière de ce monde ;

    10 mais si quelqu'un marche pendant la nuit, il trébuche, parce que la lumière n'est pas en lui ».

    11 Après ces paroles, il leur dit : « Notre ami Lazare s'est endormi, mais je vais aller le réveiller ».

    12 Les disciples lui dirent : « Seigneur, s'il s'est endormi, il sera guéri ».

    13 En fait, Jésus avait parlé de la mort de Lazare, mais ils crurent qu'il parlait de l'assoupissement du sommeil.

    14 Jésus leur dit alors ouvertement : « Lazare est mort.

    15 Et à cause de vous, afin que vous croyiez, je me réjouis de ce que je n'étais pas là. Mais allons vers lui ».

    16 Là-dessus Thomas, appelé Didyme, dit aux autres disciples : « Allons-y, nous aussi, afin de mourir avec lui ».

    17 A son arrivée, Jésus trouva que Lazare était depuis quatre jours déjà dans le tombeau.

    18 Béthanie était près de Jérusalem, à moins de trois kilomètres,

    19 et beaucoup de Juifs étaient venus chez Marthe et Marie pour les consoler de la mort de leur frère.

    20 Lorsque Marthe apprit que Jésus arrivait, elle alla à sa rencontre, tandis que Marie restait assise à la maison.

    21 Marthe dit à Jésus : « Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort.

    22 [Cependant,] même maintenant, je sais que tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te l'accordera ».

    23 Jésus lui dit : « Ton frère ressuscitera ».

    24 « Je sais, lui répondit Marthe, qu'il ressuscitera lors de la résurrection, le dernier jour ».

    25 Jésus lui dit : « C'est moi qui suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, même s'il meurt ;

    26 et toute personne qui vit et croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela ? ».

    27 Elle lui dit : « Oui, Seigneur, je crois que tu es le Messie, le Fils de Dieu, qui devait venir dans le monde ».

    28 Après avoir dit cela, elle alla appeler secrètement sa sœur Marie en lui disant : « Le maître est ici et te demande ».

    29 A ces mots, Marie se leva sans attendre et alla vers lui.

    30 Jésus n'était pas encore entré dans le village, mais il était à l'endroit où Marthe l'avait rencontré.

    31 Les Juifs qui étaient avec Marie dans la maison et qui la consolaient la virent se lever soudain et sortir ; ils la suivirent en disant : « Elle va au tombeau pour y pleurer ».

    32 Marie arriva à l'endroit où était Jésus. Quand elle le vit, elle tomba à ses pieds et lui dit : « Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort ».

    33 En la voyant pleurer, elle et les Juifs venus avec elle, Jésus fut profondément indigné et bouleversé.

    34 Il dit : « Où l'avez-vous mis ? » « Seigneur, lui répondit-on, viens et tu verras ».

    35 Jésus pleura.

    36 Les Juifs dirent alors : « Voyez comme il l'aimait ! ».

    37 Et quelques-uns d'entre eux dirent : « Lui qui a ouvert les yeux de l'aveugle, ne pouvait-il pas aussi faire en sorte que cet homme ne meure pas ? ».

    38 Jésus, de nouveau profondément indigné, se rendit au tombeau. C'était une grotte ; une pierre fermait l'entrée.

    39 Jésus dit : « Enlevez la pierre ». Marthe, la sœur du mort, lui dit : « Seigneur, il sent déjà, car il y a quatre jours qu'il est là ».

    40 Jésus lui dit : « Ne t'ai-je pas dit que si tu crois, tu verras la gloire de Dieu ? ».

    41 Ils enlevèrent donc la pierre [de l'endroit où le mort avait été déposé]. Jésus leva alors les yeux et dit : « Père, je te remercie de ce que tu m'as écouté.

    42 Pour ma part, je savais que tu m'écoutes toujours, mais j'ai parlé à cause de la foule qui m'entoure, afin qu'ils croient que c'est toi qui m'as envoyé ».

    43 Après avoir dit cela, il cria d'une voix forte : « Lazare, sors ! ».

    44 Et le mort sortit, les pieds et les mains attachés par des bandelettes et le visage enveloppé d'un linge.

         Jésus leur dit : « Détachez-le et laissez-le s'en aller ».

    45 Beaucoup de Juifs qui étaient venus auprès de Marie et qui virent ce que Jésus avait fait crurent en lui.

    46 Mais quelques-uns d'entre eux allèrent trouver les pharisiens et leur racontèrent ce que Jésus avait fait.

     * La résurrection de Lazare

    Colin d'Amiens - La Résurrection de Lazare - ca. 1450-60. Musée du Louvre

    Comment interpréter ce passage de l'Évangile ?

    Après avoir exposé la situation, le narrateur présente des scènes successives dans lesquelles Jésus rencontre les différents personnages de ce récit : d’abord les disciples, ensuite Marthe, finalement Marie et les Juifs qui l’accompagnent. Dès le début, on entrevoit quel va être le dénouement de l’intrigue, mais le narrateur ne décrit pas tout de suite sa réalisation. Il maintient ainsi un long suspens et attire l’attention du lecteur sur les paroles de Jésus.

    Ce qu’on peut dire à ce stade de la présentation de cet épisode, c’est que son intrigue sera à la fois de résolution (on passe de la maladie et la mort de Lazare à sa résurrection) et de révélation sur l’identité de Jésus (Il n’est pas un Messie immortel, même s’il s’appelle « résurrection et vie »).

     * La résurrection de Lazare

    Rembrandt - Résurrection de Lazare

    Situation et personnages (Jn 11,1-5).

    Les premiers versets présentent la famille de Béthanie et annoncent la maladie de Lazare, sur laquelle le narrateur insiste puisqu’elle est mentionnée trois fois en trois versets (v. 1-3). Une autre information est répétée au début du récit, d’abord venant de Marthe et Marie, ensuite du narrateur : une relation d’amitié unit Jésus avec les deux sœurs et Lazare (cf. v. 3 : «Celui que tu aimes est malade» et v. 5 : « Jésus aimait Marthe, sa sœur et Lazare »).

    Cette insistance sur l’amour de Jésus ne rend que plus étonnante son attitude apparemment indifférente lorsqu’il apprend que Lazare est malade : il reste, en effet, encore deux jours à l’endroit où il se trouvait avant de se mettre en chemin vers Béthanie (v. 6). De plus, Jésus se contente de déclarer : « Cette maladie-là ne débouche pas sur la mort, elle est pour la gloire de Dieu, afin que le Fils de Dieu soit glorifié par elle » (v. 4). Or ces belles paroles de Jésus sonnent creux, car on apprendra, dans la scène suivante, que Lazare est mort, ce qui réduit à néant la belle assurance de Jésus affirmant que cette maladie n’entraîne pas la mort. À ce niveau du récit, on aurait envie de dire qu’au lieu de parler, Jésus aurait mieux fait d’agir. C’est d’ailleurs ce que lui suggèreront plus tard, l’une après l’autre, les deux sœurs : « Seigneur, si tu avais été là mon frère ne serait pas mort » (v. 21 et v. 32).

     * La résurrection de Lazare

    La résurrection de Lazare (version de Boston) - Deshays

    Dialogue entre Jésus et les disciples (Jn 11,6-16).

    Finalement, Jésus décide d’aller en Judée avec ses disciples mais, avant de partir, s’instaure entre eux un dialogue qui n’est pas exempt de malentendus, – ce n’est d’ailleurs pas un cas unique dans l’Évangile de Jean qui joue souvent la carte de ce procédé littéraire. Tandis que Jésus parle de sommeil à propos de la mort de Lazare, les disciples comprennent, en effet, qu’il dort, c’est-à-dire qu’il se repose et, en conséquence, qu’il va guérir. Mais Jésus précise que Lazare est bien mort et qu’il se réjouit de cette mort en son absence. L'attitude de Jésus se réjouissant devant la mort d’un de ses amis est, une nouvelle fois, pour le moins étonnante ! Seul le fait qu'il traite de « sommeil » la mort de Lazare laisse supposer qu'il a de bonnes raisons de se réjouir.

    Une autre source de malentendu provient de ce que le retour en Judée représente un danger de mort pour Jésus, car on veut le tuer. Les disciples le savent d’ailleurs et Thomas prend la parole pour encourager le groupe à s’unir au sort de Jésus : « Allons, nous aussi, pour mourir avec lui » (v. 16). On passe ainsi de la mort de Lazare à celle qui menace Jésus et, d’une certaine manière aussi, les disciples qui sont avec lui. Or, si Jésus ne rectifie pas sur le champ les paroles de Thomas, les événements indiqueront clairement que Jésus n’entraîne personne dans la mort avec lui. Au contraire, il mettra en pratique ce qu’il a dit : tel le bon berger, il donnera sa vie pour sauver le troupeau. Avant sa passion, il dira, en effet, en parlant des disciples, à ceux qui viennent l’arrêter : « Ceux-là, laissez-les aller ». Et l’Évangéliste d’ajouter : « Il fallait que la parole de Dieu fût accomplie, ‘’Ceux que tu m’as donnés, je n’ai perdu aucun d’entre eux’’ » (Jn 18,8).

     * La résurrection de Lazare

    Rencontre entre Jésus et Marthe (Jn 11,17-27).

    Jésus n’est pas encore entré dans le village de Béthanie (v. 30) que Marthe va à sa rencontre, tandis que Marie reste assise dans la maison du deuil. Dans son dialogue avec Marthe – le plus long de tout le récit – Jésus évoquera non seulement la résurrection, mais il se présentera comme la résurrection et la vie, révélant ainsi sa propre identité. Marthe, de son côté, manifestera sa foi en Jésus d’abord par une affirmation : « Je sais que, quoi que tu lui demandes, Dieu te le donnera » (v. 22), qui traduit son espérance que Jésus pourra ramener son frère à la vie. Ensuite, dans une véritable confession de foi, elle reconnaîtra l’identité de Jésus, indépendamment de toute référence à Lazare : « Oui, Seigneur, je crois que tu es le Christ, le fils de Dieu, celui qui vient dans le monde » (v. 27).

     * La résurrection de Lazare

    La résurrection de Lazare

    Jésus, Marie et les Juifs qui l’accompagnaient dans le deuil (Jn 11,28-37).

    Sans en avoir reçu l’ordre, Marthe avertit sa sœur que le Maître l’appelle. Aussitôt, celle qui était restée assise se met debout et part à la rencontre de Jésus. Le groupe des Juifs, venus l’accompagner dans le deuil, la suivent pensant qu’elle va à la tombe. Mais elle va vers Jésus qu’elle rencontre à l’endroit même où Marthe l’avait rencontré, et lui dit la même chose : « Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort » (v. 32). Cependant, contrairement à Marthe, Marie en reste là. Elle ne dit rien de plus. C’est le groupe des Juifs présents, auquel se joint peut-être Marie dans l’invitation « Seigneur, viens et vois » (v. 34), qui prendra la parole pour répondre à la question de Jésus, constater l’amitié de Jésus pour Lazare et se demander si celui qui avait donné la vue à un aveugle-né n’aurait pas pu éviter la mort de son ami.

    Quant à Jésus, un seul « Où l’avez-vous mis ? » (v. 34) va interrompre des réactions de frémissement intérieur (v. 33 et v. 38), de trouble (v. 33) et de pleurs (v. 35). Celui qui se réjouissait de « ne pas avoir été là » (v. 15), pleure maintenant devant la réalité de la souffrance et du deuil. Sa joie ne venait donc vraisemblablement ni d’une inconscience, ni d’une impassibilité. En outre, au-delà de la mort de Lazare, le verbe « se troubler » évoque l’affrontement de Jésus avec sa propre mort (voir Jn 12,27).

    Voyant les larmes de Jésus, les Juifs pensent à l’amitié de Jésus pour Lazare : « Voyez comme il l’aimait ! » (v. 36). Émouvants et bouleversants, ces pleurs de Jésus devant la tombe de Lazare ! Il sait qu’il va redonner vie à Lazare, mais il pleure. D’ailleurs, à sa question : « Où l’avez-vous mis ? », ils lui avaient répondu : « Seigneur, viens et vois » (v. 34), l’invitant à « faire l’expérience » du deuil et, au-delà, celle de la mort. Ils ne lui décrivent pas, en effet, l’endroit où ils l’ont mis, mais ils l’invitent à faire la démarche pour venir « voir ». Celui qui s’était présenté à Marthe comme étant la « Vie » pleure devant le deuil, et il va faire l’expérience de la mort.

     * La résurrection de Lazare

    Jésus devant le tombeau de Lazare (Jn 11,38-44).

    Arrivé devant le tombeau, Jésus demande qu’on enlève la pierre. Marthe intervient alors : « Seigneur, il sent déjà, c’est le quatrième jour » (v. 39). Cette donnée temporelle souligne le temps passé (les quatre jours ont dépassé le temps qu’il faudra pour la résurrection de Jésus !) et met en évidence la corruption du cadavre, précisée par l’odeur de mort qui s’en dégage. En conséquence, l’efficacité de la parole de Jésus n’en est que davantage mise en valeur. Tous les signes de la mort sont là, mais grâce à une parole, le mort va revivre. Jésus appelle Lazare par son nom, mais il le fait d’une voix forte (v. 43) qui n’est pas sans évoquer la voix forte du don de la Torah au Sinaï (Dt 5,22) et touche toute personne qui gît dans un tombeau. Lazare sort libre et vivant du sépulcre, mais muet sur ce qu’il a pu « vivre ». Une chose est certaine : si le narrateur ne décrit pas ici la joie de la rencontre entre Lazare et ses sœurs, alors qu’il avait détaillé la peine de Marie et de ceux qui l’accompagnaient, c’est que la perspective du récit n’est pas la joie de la famille de Béthanie, mais l’écoute des paroles de Jésus et l’attention à ses gestes.

     * La résurrection de Lazare

     

    La mort de Jésus est décidée (Jn 11,45-53).

    Comme dans d’autres passages de l’Évangile de Jean, les signes de Jésus et ses paroles ne sont pas interprétés de la même façon par tous : d’un côté « beaucoup de Juifs… crurent en lui » (v. 45) de l’autre, les grands prêtres et les Pharisiens, informés de la résurrection de Lazare, en conclurent que Jésus représentait un danger pour toute la nation (v. 47). C’est alors qu’intervient Caïphe, qui était Grand Prêtre cette année-là, pour affirmer qu’il vaut mieux qu’un seul meure plutôt que tout le peuple (v. 50). Sa déclaration, qui apparaît d’abord comme un conseil, est interprétée par le narrateur comme une prophétie.

     * La résurrection de Lazare

    La mort de Jésus acquiert ainsi une signification positive : elle sauve tout un peuple. Bien plus, elle permet l’unité de toute l’humanité dispersée (v. 52). À la fin de l’épisode, les paroles du Grand Prêtre sur la mort de Jésus renvoient à l’explication de la mort de Lazare donnée par Jésus à ses disciples au début du passage (v. 4). Si cette dernière n’a pas abouti à la mort, mais a été pour la gloire de Dieu, la mort de Jésus débouchera sur la vie d’une multitude.

    D’après l’analyse effectuée par Bernadette Escaffre

    (Références 1 à 4)

    Conclusion et morale de l’histoire

    L'histoire est digne des « Contes et légendes »... mais que signifie-t-elle ? Que Jésus peut faire revivre des morts comme il l'a fait pour Lazare ?

    Peu importe que Lazare ait ou non été réanimé de sa mort physique, les questions principales sont  : qu'est-ce qu'on peut attendre du Christ pour nous aujourd'hui? Quelle espérance ? Quelle action de Dieu dans notre existence ?

    Nous sommes sans doute peu nombreux à croire que Dieu ramènera un jour à la vie physiquement tous ceux qui sont morts biologiquement.

    Alors que peut nous apprendre ce texte trop merveilleux ?

     * La résurrection de Lazare

    Girolamo Muziano - La Résurrection de Lazare

    La clé se trouve dans l'affirmation de Jésus concernant la Résurrection : Marthe dit qu'elle y croit, mais comme quelque chose concernant la fin des temps. Jésus lui répond qu’au contraire, c'est pour aujourd'hui et maintenant (Verset 25) :

    « Je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra, quand même il serait mort ; et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais ».

    Là est le message essentiel : la résurrection, ce que Dieu peut nous faire, il ne faut pas l'attendre pour l'au-delà, mais c'est pour tout de suite, maintenant, sans attendre. Dieu peut nous « ressusciter », nous remettre debout et en marche, nous redonner confiance, nous libérer de tous les liens destructeurs qui nous enserrent.

    Cela est clair, mais quel est le lien alors avec la réanimation de Lazare ? Apparemment aucun, parce qu'il s'agit d'une « réanimation », et non pas d'une « résurrection ». Lazare revient à la vie physique, mais il mourra quand même un peu plus tard, on ne peut dire de lui qu'il ne mourra jamais... Il semble donc que la lecture littérale de la réanimation de Lazare ne colle pas avec le texte.

    Le seul moyen de trouver un lien entre l'événement rapporté et l'affirmation du Christ sur la résurrection, c'est l'analogie. Il faut voir l'histoire comme un signe, un exemple symbolique, une parabole nous montrant comment ça se passe, une résurrection dans notre vie, et quels sont les rôles de chacun : de Dieu, du Christ, de l'intéressé, et des autres, de l'entourage.

    Le mot « mort », en particulier, n'est pas utilisé dans la Bible seulement dans le sens d'une mort purement physiologique, et le mot traduit par « résurrection », en grec signifie juste la « relevée ». Dieu peut donc nous relever, nous redonner la vie, nous remettre debout, nous remettre en marche.

    Et là est le miracle et la puissance extraordinaire de Dieu, puissance qui nous est transmise par le Christ : Dieu peut nous libérer de tous les enfermements mortifères possibles, même si ça fait longtemps que notre vie semble fichue, même si tout le monde nous dit mort, même si plus personne n'a d'espoir, le Christ peut nous remettre debout, en route, contre toute attente, contre toute logique et tout pronostic.

    Comme c'est le cas pour Lazare, les autres ont vite fait de nous enterrer, de nous déclarer fichus, plus bons à rien, de nous enfermer dans des catégories, des jugements, des condamnations, ils déclarent que nous sentons mauvais et qu'il n'y a aucun espoir. Et pour que le compte soit total, ils nous ajoutent des bandelettes et cachent notre visage avec des linges, pour dire que nous ne sommes plus rien... Prisonniers de la mort, prisonniers des autres, prisonniers de notre imperfection, de notre péché, de nos échecs, de notre tristesse, de nos deuils, impression qu'on ne pourra jamais s'en relever.

    Jésus-Christ, lui peut nous relever, nous libérer, nous réapprendre à vivre, nous redonner la vie.

    Bien plus qu’une simple petite leçon de morale, nous pourrions dire qu'il nous faut garder confiance, et qu'avec un peu de courage ça peut aller mieux. L'auteur de la résurrection, ici, c'est vraiment Dieu par le Christ. Ce n'est pas Lazare qui arrive à s'en sortir plus ou moins tout seul avec force de volonté.

    Quant au processus complexe, il est merveilleusement bien décrit dans le texte.

    En fait il n'y a pas que Dieu qui soit acteur, il y a aussi le Christ, et Lazare aussi, d'une certaine manière, et puis les proches. Chacun a un rôle.

    Jésus est celui qui fait connaître cette puissance et permet d'en bénéficier. Il proclame, et il appelle. Il appelle les autres à agir, et aussi Lazare à sortir. Mais Jésus ne va pas chercher Lazare. Dieu fait ainsi le premier pas, mais ensuite, c'est au fidèle d'entendre la voix et de sortir.

    Les proches, eux, doivent enlever la pierre du tombeau, enlever les bandelettes... ils ont un rôle essentiel pour leur ami. On ne peut pas s'en sortir tout seul, même avec l'aide de Dieu : il nous faut l’aide des frères et des sœurs tout autour de nous. Ce rôle humain, c'est d'accompagner, de libérer autant que possible, de transmettre la parole. Et ce rôle des proches, il est essentiel pendant tout le processus, processus miraculeux qui s'opère quand chacun est à l'écoute du Christ.

    D’après l’analyse de Louis Pernot – Eglise protestante unie de l’Etoile (Paris)

    Première réflexion

     * La résurrection de Lazare

    Duccio di Buoninsegna

    La résurrection de Lazare

    Le texte de la résurrection de Lazare (Jn 11,1-46) a connu plusieurs couches rédactionnelles successives où s'affirme progressivement une conviction de plus en plus profonde : celle que les morts ressusciteront. Selon la croyance juive, l'âme du défunt rôdait encore pendant trois jours autour de son corps avant de s'en aller au lieu des morts. Dans la rédaction finale de ce texte, Jésus arrive quatre jours après le décès, montrant ainsi que Lazare était vraiment mort.

    Mais dans ce texte, l'accent de l'Évangéliste porte non pas sur Lazare mais sur Marthe. C'est elle qui tient le rôle principal dans ce récit, dès le v. 5. C'est à elle que s'adressent les paroles de Jésus. Il lui explique que la maladie de Lazare n'est pas mortelle pour celui ou celle qui croit en lui. « Je suis la résurrection et la vie, qui croit en moi, fut-il mort, vivra » (v. 25). Pour les chrétiens de la communauté johannique, la gloire de Dieu, qui s'est manifestée lors de la résurrection de Jésus, se manifestera à nouveau pour chaque personne qui croit en Lui.

    Dans ce texte, la gloire de Dieu se manifeste en Jésus de deux façons : par le geste de la résurrection de Lazare, mais aussi par cette révélation qu'il fait à Marthe. C'est la foi en Jésus qui garantit la résurrection et la vie éternelle. C'est lui qui fait vivre (Jn 5,21.25.28)! Il est la vie parce que son Père la lui a donnée (Jn 5,26) et qu'il la communique aux hommes (Jn 10,10.28). Le signe présent dans ce texte est celui de la vie éternelle donnée par Jésus à celui qui croit en lui.

    D’après le commentaire de Yolande Girard, bibliste

    (Référence 5)

    Deuxième réflexion : à propos des personnages

     * La résurrection de Lazare

    Caravage - La Résurrection de Lazare - c.1608-1609
    Musée Régional, Messine, Italie

    Marthe, Marie, Lazare : trois types universels.

    L’épisode de la résurrection de Lazare, le plus grand miracle de Jésus, que l’Église nous propose en ce cinquième dimanche de carême, met en scène une fratrie de deux sœurs et un frère : Marthe, Marie et Lazare. Ils étaient tous trois les amis de Jésus et habitaient Béthanie, village situé sur le mont des Oliviers, mais sur le versant opposé à celui où se situe le jardin de Gethsémani, qui fait face au Temple de Jérusalem. L’Évangile est très clair sur leur relation à Jésus : Jésus aimait Marthe et sa sœur Marie et Lazare (Jn 11,5). Les personnes de ce trio aimé par le Seigneur présentent des traits distinctifs capables de figurer trois types universels.

    Marthe, c’est la tête qui organise. Sa foi est toute doctrinale : « Je sais qu’il ressuscitera à la résurrection au dernier jour » répond-elle à Jésus après que celui-ci l’ait assuré que son frère ressuscitera. C’est la foi des pharisiens. Pour le judaïsme de l’époque, le résurrection était collective, et ne devait intervenir qu’à la fin des temps. Ce qui explique l’importance du signe posé par Jésus en ressuscitant l’individu Lazare. Avec Marthe Jésus parle « dogmatique ». « Je suis la Résurrection et la Vie ».

    Marie, elle, c’est le cœur. Elle sanglote en approchant de Jésus. Lui-même, à la vue de ses larmes, « frémit intérieurement » dit le texte. La réaction affective de Jésus va crescendo : d’abord « il frémit », ensuite « il se troubla », enfin « il versa des larmes ». Marie, c’est l’amitié qui n’a pas peur de laisser parler le cœur. A son contact, Jésus ne s’en prive pas. D’ailleurs le zèle de Marie est souligné par le narrateur : « Elle se leva très vite » dès qu’elle sut que Jésus était arrivé, et se jeta à ses pieds. De sa part une telle réaction dénote une marque de confiance en la seigneurie de Jésus. Aussi le Seigneur ne lui demandera-t-il pas une profession de foi explicite comme à sa sœur Marthe : « Crois-tu cela ? » (v. 26).

    Et Jésus pleura.

    Ce verset aura été plus efficace que toutes les bibliothèques de théologie dogmatique réunies, pour persuader les croyants de tous les temps que le Christ avait une vraie humanité, en tout pareille à la nôtre ! Et non seulement pour les en convaincre, mais surtout pour la faire aimer. Car l’humanité du Christ n’est pas celle d’un ataraxique, d’un champion de l’insensibilité stoïcienne. Jésus n’a pas rougi de l’affectivité, du langage du cœur. Ce n’est pas malgré sa tendresse tout humaine qu’il partage la gloire de son Père dans l’Incarnation, mais au cœur de cette même tendresse. La gloire de Dieu se dit également dans le mouvement des larmes de Jésus. La théologie dogmatique soulignera ce point ultérieurement, en affirmant que ce qui est dit de Jésus en son humanité peut être dit de lui aussi selon sa personne divine. C’est le Verbe éternel du Père qui est né de la Vierge Marie, qui est mort. Et c’est lui également, lui la seconde Personne de la Trinité, qui a pleuré sur la mort de son ami Lazare. Cet Évangile nous révèle que Dieu a un cœur !

    Troisième type : Lazare. Le frère représente de son côté l’homme en son destin douloureux, mais aussi glorieux. Son nom « Eléazar » signifie d’ailleurs « Dieu aide ». C’est l’homme en tant qu’il a besoin du secours de Dieu. Aussi, afin que le frère des deux sœurs réintègre la fratrie, Jésus devra poser son plus grand acte de puissance: le retirer des griffes du tombeau, de la mort. Le nom du village où ils résident tous les trois, Béthanie, se traduit d’ailleurs par « la maison du pauvre ». Il peut s’agir de la pauvreté évangélique, si chère au cœur de Jésus. Mais aussi de la pauvreté de l’homme laissé à lui-même, qui doit tout attendre de Dieu.

    Dans le cas de Lazare, il ne pouvait s’agir de pauvreté sociale. Le nombre élevé de personnes qui s’étaient déplacées à ses funérailles laisse penser en effet qu’il était un homme en vue. De plus la valeur du parfum que sa sœur Marie versera sur les pieds de Jésus quelque jours plus tard nous indique que la famille n’était pas pauvre matériellement. Si l’évangéliste a pris soin de préciser toutefois le nom du village où  elle résidait, c’est certainement afin de nous orienter vers un autre type de pauvreté, la pauvreté spirituelle, si chère aux amis de Jésus, cette pauvreté dont Lazare est un  type accompli.

    Une tête, un cœur, un corps : telle est la triade représentée par les trois amis de Jésus de Béthanie.

    « Je suis la Résurrection et la Vie ».

    Nous avons vu qu’au sein de la famille, Marthe était la gardienne de l’orthodoxie dogmatique – au bon sens du terme. Aussi est-ce à elle que Jésus affirme : « Je suis la Résurrection et la Vie. Qui croit en moi, même s’il meurt, vivra » (verset 25). Préalablement, comme nous l’avons vu plus haut, Marthe avait répondu à l’affirmation initiale de Jésus : « Ton frère ressuscitera » par l’acte de foi objective de la résurrection générale à la fin des temps (qui était celle des pharisiens).

    Quel saut nous oblige à accomplir alors Jésus avec une telle déclaration! Désormais la Résurrection n’est plus un événement lointain, reportée sine die. Elle est une personne ! « Je suis » dit Jésus. Affirmer cela, c’est bien sûr se placer sur le plan divin. Seul Dieu EST au sens absolu du terme.

    En ajoutant « Je suis la Résurrection », Jésus nous indique que notre levée d’entre les morts, non seulement est liée à sa personne, mais de plus qu’elle est sa personne elle-même. Autrement dit nous ne pourrons ressusciter que greffés sur Jésus. Et cette résurrection n’attendra pas la fin des temps, contrairement à ce que croit Marthe : « Qui croit en moi, fût-il mort, vivra ; et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais » précise Jésus à Marthe. Comme si la Résurrection, qu’il était en personne, avait déjà commencé.

    L’épisode de la résurrection de Lazare constitue d’ailleurs le septième signe de l’Évangile de Jean. On sait que le livre est bâti en deux parties (plus le Prologue). La première est appelée le « livre des signes » ; la seconde, relatant la Pâque de l’Agneau de Dieu, constitue le livre de la Gloire. Dans cette première partie, la résurrection de Lazare représente le septième signe (le premier est le miracle de Cana). Sept est le nombre de la perfection.

    En faisant de cet épisode le dernier signe avant la seconde partie de son évangile, Jean désire nous faire comprendre que ce signe prophétise la Pâque définitive. La résurrection de Lazare est le signe de celle de Jésus. Cependant celle-ci sera infiniment plus glorieuse. En effet, contrairement à son ami, Jésus ne mourra plus. Alors que Lazare reviendra à la vie biologique d’ici-bas, Jésus, le matin de Pâques, pénètrera dans la vie définitive du monde de Dieu. D’ailleurs la Pâque de Jésus est le huitième signe : le nombre huit est le chiffre de la résurrection et du monde à venir, le chiffre au-delà de la perfection, le chiffre de l’infinitude de Dieu.

    Ceux qui écoutent la voix du Fils de l’Homme...

    En sortant de son caveau, Lazare est déjà l’accomplissement d’une autre prophétie de Jésus énoncée au chapitre cinq du quatrième Évangile : « Elle vient l’heure où tous ceux  qui sont dans les tombeaux entendront sa voix (du Fils de l’Homme) et sortiront » (Jn 5, 28). Comme nous sommes loin, avec une telle déclaration, de l’eschatologie de Marthe, de sa résurrection reportée indéfiniment ! C’est dès maintenant que tous entendent la voix de Jésus ! C’est pour cela qu’on a pu parler, à propos du quatrième Évangile, d’une « déseschatologisation ». Comme si pour Jean, les derniers temps étaient déjà arrivés pour ceux qui entendent la voix de Jésus, et sortent de leur tombeau !

    Dans l’épisode de ce dernier signe de la première partie de l’Évangile, Jésus prend bien soin de se faire entendre par les personnes qui l’entourent sur le théâtre des événements. Jésus rappelle son ami à la vie en « criant d’une voix forte ». Ainsi le récit met en évidence que ses propos précédents au chapitre cinq ne sont pas seulement à comprendre « spirituellement », par « métaphore ». Entendre la voix du Fils de l’Homme passe au contraire par une écoute très concrète, par exemple en lisant les Écritures, ou en vivant les sacrements. Chez Jean, le spirituel et le charnel sont toujours entremêlés.

    Jésus cria d’une voix forte : « Lazare, viens ici ! Dehors ! ».

     * La résurrection de Lazare

    La résurrection de Lazare - Ciro Ferri

    Quand le cynisme de la raison d’Etat rencontre la prophétie...

    Malheureusement tout le monde n’écoute pas. Le septième signe va signer la mort de Jésus en décidant les pharisiens et les chefs des prêtres à hâter sa condamnation. Cette réaction vérifie une règle de la vie spirituelle : plus le signe donné par Dieu est fort, plus il suscite des jalousies chez ceux qui restent bouchés, fermés à son Amour.

    A cette occasion le Grand Prêtre prophétise malgré lui (toujours l’ironie johannique !) : « Vous n’y entendez rien ! Vous ne voyez pas qu’il vaut mieux qu’un seul meure pour le peuple et que la nation ne périsse tout entière ». Et Jean précise : « Il ne dit pas cela de lui-même, mais en qualité de grand prêtre il prophétisa que Jésus devait mourir pour la nation – et non seulement pour la nation, mais encore pour rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés ».

    Croyant faire le jeu de la raison d’Etat, avec son cynisme habituel, Caïphe donne en fait le sens de la mort de Jésus. Oui, il mourra bien pour la nation, mais   aussi pour l’unité de tous les hommes que le péché avaient dispersés !

    Telle est la conclusion du septième signe qui précède le dimanche des Rameaux, porte d’entrée de la Semaine Sainte. Un signe qui jette des lueurs lumineuses sur l’accomplissement de la vie de Jésus à Jérusalem.

    D’après l’analyse de Jean-Michel Castaing

    (Référence 6)

    Troisième réflexion : vie et mort, résurrection

     * La résurrection de Lazare

    La lecture que nous avons faite de cet extrait de l’Évangile de Jean traite en fait du thème de la vie. C'est là que Jésus dit « Je suis la vie ».

    1°) Résurrection de Lazare et résurrection du Christ.

    Pour introduire à l'intelligence de la résurrection du Christ, on l'oppose très souvent à la résurrection de Lazare, et cela très justement. En effet la résurrection de Lazare est un retour à la vie mortelle impliquant la nécessité de mourir à nouveau, de « remourir » s'il était permis de le dire, tandis que la résurrection du Christ est transformation et passage à une vie qui ne meurt plus. Très souvent nous-même avons eu occasion d'exploiter cette opposition qui reste, à certains égards, éclairante. Cependant, en faisant cela, on oppose la résurrection du Christ à notre idée banale de résurrection imaginée comme réanimation d'un cadavre, ou, à la rigueur, pensée théologiquement comme réunion du corps et de l'âme. Or le texte de Jean ne parle pas à partir de notre idée banale, et il faudrait voir comment la résurrection du Christ se témoigne dans la résurrection de Lazare. En d'autres termes, non contents de nous servir simplement de l'opposition pour les distinguer, il faudrait tenter de voir ce que positivement dit la résurrection de Lazare sur la résurrection du Christ.

    Lorsque Jésus guérit un aveugle, ce qu'il raconte, c'est la résurrection dans le grand sens du terme, alors, quand il parle de la résurrection de Lazare, pourquoi ne parlerait-il pas de la résurrection dans le grand sens du terme ? C'est de ce côté-là qu'il faut orienter notre recherche.

    2°) Mort propre et mort d'un proche.

    Une autre chose à prendre en compte dans notre lecture, c'est que, sous prétexte que Lazare dans cette affaire est totalement inerte et muet, en tout cas, silencieux, on peut considérer que ce qui fait l'intérêt du texte, c'est le travail de deuil qui s'opère à propos de la mort d'un autre. Autrement dit ce serait considérer que ce texte ne nous dit rien en vérité sur ce qu'il en est de sa propre mort, mais gère la question du deuil. Apparemment c'est cela qui prend beaucoup de place : Jésus, les disciples, les deux sœurs (Marthe d'abord, puis Marie), un certain nombre de Judéens, tout cela s'agite et parle autour de Lazare ! Or je pense que ce texte doit nous dire quelque chose sur la propre mort. Il faudra que nous essayions d'accéder à cela.

    3°) Les deux sens du mot de « mort » dans l'Évangile.

    Je voudrais aussi dire quelque chose de préalable sur l'emploi du mot de mort dans lÉvangile de Jean, mais c'est vrai aussi chez saint Paul. Le mot de vie (zoê), qu'il soit accolé avec l'épithète que nous traduisons par « éternel », ou qu'il ne le soit pas, qu'il soit un substantif sujet ou un substantif génitif (par exemple « le pain de la vie »), qu'il soit un verbe (« Ton fils vit »), ce terme de vie ne dit toujours qu'une seule chose, la vie éternelle, alors qu'en revanche le mot de mort est équivoque, car il dit deux choses totalement différentes :

    – On a retenu à partir de lectures de Paul, que la mort dit la même chose que le péché, qu'être mortel et être meurtrier se pensent comme appartenant à la même région. Il y aurait beaucoup de choses à dire là-dessus car c'est assez éloigné de notre façon de parler de la mort. Cependant il ne faudrait pas penser que la mort est la punition du péché, ce n'est pas du tout cela. Ce que je dis c'est que ce sont deux noms de la même réalité.

    – Et par ailleurs, nous avons très souvent dit que la mort du Christ et sa résurrection c'est la même chose. Ce ne sont pas deux épisodes successifs qui seraient liés, mais c'est la même chose. Je considère cela comme une chose acquise, sur laquelle on pourrait revenir un jour.

    Nous avons deux sens du mot de mort : dans un cas la mort c'est le péché, et dans l'autre cas la mort c'est la vie de résurrection. Et il faut bien voir que l'opposition n'est pas entre la vie et la mort, mais entre la vie mortelle et la mort vivifiante. La mort vivifiante est un des tout premiers mots qui se trouvent dans le cœur du Credo : « est mort pour nos péchés (donc pour la vie). » En revanche, ce qui est couramment appelé la mort dans l'Évangile, c'est très souvent ce que nous appelons, nous, la vie.

    Ainsi quand saint Jean dit : « Nous avons été transférés de la mort à la vie » (1 Jn 3, 14), mort et vie supposent quatre termes : il y a « cette vie » dans laquelle nous sommes nativement, et il y a « la Vie qui vient », dans laquelle nous commençons à être transférés, elle correspond à un espace de vie. Dans « cette vie », il y a ce que nous appelons la vie et la mort, mais c'est l'ensemble qui est appelé ici « la mort » : ce que nous appelons « la vie » au sens usuel du terme, c'est ce que saint Jean appelle ici « la mort ». En revanche « la mort christique », c'est la Vie. Autrement dit il y a comme quatre termes : la mort en notre sens et la vie en notre sens ; la mort christique et la vie de résurrection.

    4°) La mort en philosophie.

    Une autre chose préparatoire est alimentée par le souci d'entendre le champ des réflexions humaines sur la mort, et particulièrement dans le champ philosophique, les réflexions portent sur la mort et le temps, deux choses qui sont étroitement liées, mais mon but n'est cependant pas de faire un cours sur l'être-pour-la-mort. Même notre saint Père pense qu'il est bon que la foi rencontre quelque part la philosophie, ce n'est peut-être pas celle que nous envisageons, mais c'est totalement vrai à la mesure où la foi tombe dans quelqu'un qui est préformé culturellement par son appartenance à une tradition. Pour nous il s'agit de la tradition occidentale, et dans celle-ci, ce qu'il y a de plus aigu dans le domaine de la pensée et de la réflexion, s'est nommé philosophie. Il est donc intéressant, spécialement pour une question comme celle-là, de ne pas s'en tenir à l'usage banal du mot de mort, qui est souvent un usage usé quand il s'agit de la mort et quand il s'agit du temps. Je vais simplement vous donner quelques petites choses qui peuvent être utiles.

    L'homme meurt, il est remarquable que, pour dire les humains, certains disent « les mortels ». La mort est donc bien d'une certaine façon propre à l'être-homme. Et il serait intéressant de méditer ce que veut dire une expression comme celle-ci : « L'animal périt et l'homme meurt ».

    Ce que désigne la mort dans l'homme n'est peut-être pas bien perçu de façon essentielle par le spectacle d'un autre qui est en train de dépérir. En effet le spectacle que nous avons de la mort, c'est celui d'un dépérissement, et même rapidement, ensuite, d'une corruption, d'une dissolution. Nous verrons dans le texte de la résurrection de Lazare que le thème de la corruption est un thème très important – et il l'est aussi dans le Nouveau Testament –, mais ce n'est pas cela que j'envisage en ce moment, et ce n'est peut-être pas cela la mort. Il se pourrait bien que la mort ne soit pas l'événement ponctuel que nous pensons. Bien sûr, c'est un événement ponctuel pour ce qui concerne la mort d'autrui, mais qu'en est-il pour nous-même ? Est-ce que la mort n'est pas toujours un élément constitutif de l'homme ? De la ponctualiser et de la reculer, est-ce que ce n'est pas une façon, et pas forcément une très bonne façon, de prétendre à l'exorciser ? La reculer, ça se fait spontanément. Et en plus, aujourd'hui, non seulement on la recule, mais même on la recouvre, ce qui fait que, d'une certaine façon il n'en est plus question. Or au contraire, la question la plus essentielle n'est-elle pas la question de la mort pour maintenant ? En effet la mort est quelque chose à venir, c'est-à-dire qu'elle est la dimension à venir ou avenante. Notre être est aussi constitué par un venir, et pour les Grecs, ta erkhoména, les choses qui viennent, c'est ce que nous appelons le futur.

    Nous avons dit souvent à propos du Christ que les verbes « être » et « venir » disaient la même chose. Je ne veux pas m'avancer plus là-dessus pour l'instant, mais cela signifierait que notre mode usuel d'être au temps n'est pas pertinent pour penser et pour imaginer ce qu'il en est de la mort propre. Peut-être que, acquiescer maintenant à la mort, c'est mourir de la véritable façon.

    La mort marque ma finitude, c'est-à-dire que je suis, comme homme, non pas une chose ou un objet clos, mais je suis ouvert à, je suis une sorte d'apparemment indéfinie possibilité. Or elle n'est pas indéfinie cette possibilité puisqu'elle est vouée à une fin : j'ai à mourir. Mais que veut dire la fin ? Nous employons ce mot dans des sens très différents : nous disons que la semaine est finie quand elle n'est plus là, mais nous disons aussi que quelque chose est fini quand c'est totalement accompli. Le mot fini est donc à la fois un mot de plénitude et un mot d'expulsion. De quoi parlons-nous quand il s'agit de la mort ? D'une certaine manière la mort me rend fini.

    D'autre part la mort a d'autres traits intéressants. La mort est certaine mais indéterminée : je ne sais pas quand. Autrement dit, pour moi elle n'est pas datable. Et même pour l'Évangile, ce qui n'est pas un hasard, « Personne ne sait quand viendra ce jour où cette heure (l'heure où le Fils de l'homme paraîtra), pas même les anges dans les cieux, ni même le Fils ; le Père seul le sait » (Mc 13,32). C'est une phrase très étrange. Il est probablement de l'essence même de cela de ne pas être datable pour moi. Bien sûr les dictionnaires datent la mort des grands hommes. S'agit-il de la même chose ?

    Et dernier point, la mort a pour caractéristique de constituer mon propre. En effet nous pouvons la plupart du temps faire des choses ensemble, ou les uns avec les autres, ou les uns pour les autres, mais on meurt seul. Que signifie cette « solité » ? Il ne faut pas dire « cette solitude » parce que ce mot a une autre connotation qui n'est pas excellente. Et que peut bien signifier cela que le Christ meurt pour nous ?

    Voici un certain nombre de suggestions qui nous invitent à être réticents, prudents, devant les repères que nous croyons avoir pour parler de la mort. Et nous savons, en tout cas, que notre mode d'être au temps est inapte à dire le « temps » de la mort, et là, je ne dis pas le « moment ». Je veux dire par là que le rapport de la mort à la temporalité, et donc ce que veut dire le mot aïônios (éternel), ne peut être d'emblée élucidé, puisque nous pensons l'éternité comme a-temporalité. Or pour penser la non-temporalité, il faudrait déjà avoir pensé ce qu'il en est de la temporalité, ce que nous sommes loin d'avoir fait.

    Je crois que j'ai dit de façon assez simple des choses qui, techniquement regardées, sont très complexes. Nous sommes, par-là, alertés à entendre dans l'évangile des choses auxquelles nous n'aurions peut-être pas prêté suffisamment attention.

    Jean-Marie Martin, prêtre, théologien et philosophe

    (Référence 7)

    Quatrième réflexion

     * La résurrection de Lazare

    Jacopo Robusti, dit " Le Tintoret " - 1518–1594 – La Résurrection de Lazare

    Le récit de la résurrection de Lazare doit être envisagé d’un double point de vue : en tant que tel, comme un exemple de récit de miracle ; d’un point de vue plus large, selon la place qu’il occupe dans l’Évangile de Jean. Les récits de miracles ont en effet un sens et une valeur propre, qui autorise à les lire seuls. Mais c’est seulement dans le grand contexte du livre évangélique tout entier qu’ils prennent tout leur sens.

    (Référence 8)

    Cinquième réflexion

     * La résurrection de Lazare

    Nous avons pris l’habitude d’appeler ce passage « la résurrection de Lazare », mais, soyons francs, ce n’est pas le terme qui convient ! Quand nous proclamons  « Je crois à la résurrection des morts et à la vie éternelle », il s’agit de bien autre chose. 

    La mort de Lazare n’a été qu’une parenthèse en quelque sorte dans sa vie terrestre. Sa vie après le miracle de Jésus a repris son cours ordinaire, et elle a dû être à peu de choses près la même après qu’auparavant. Lazare a eu seulement en quelque sorte un supplément de vie terrestre. Son corps n’était pas transformé et il a dû mourir une seconde fois. Sa première mort n’a pas été ce qu’elle sera pour nous, c’est-à-dire le passage vers la vraie vie.

    Mais alors, du coup, on peut se demander à quoi bon ? En faisant ce miracle, Jésus a pris de grands risques pour lui-même parce qu’il ne s’était déjà que trop fait remarquer... et quant à Lazare cela n’a fait que reculer l’échéance définitive.

    C’est saint Jean qui répond à notre question « à quoi bon ce miracle ? ». Il nous dit c’est un  signe très important : Jésus est manifesté là comme celui en qui nous avons la vie sans fin et en qui nous pouvons croire, c’est-à-dire sur qui nous pouvons miser notre vie.

    Et d’ailleurs, les grands prêtres et les Pharisiens ne s’y sont pas trompés : ils ont fort bien compris la gravité du signe que Jésus avait donné là : d’après saint Jean, toujours, trop de gens se mirent à croire en Jésus à la suite de la résurrection de Lazare, et c’est là qu’ils décidèrent de le faire mourir.

    Saint Jean nous dit qu’à la suite de ce miracle, beaucoup de Juifs se mirent à croire en Jésus. Et d’après saint Jean, toujours, c’est à ce moment-là que les grands prêtres et les Pharisiens décidèrent d’éliminer Jésus.

    C’est donc ce miracle qui a signé l’arrêt de mort de Jésus. Évidemment, quand on y réfléchit deux mille ans plus tard, on se dit que c’est un comble : être capable de rendre la vie, cela méritait la mort. Triste exemple des aberrations où nous mènent parfois nos certitudes...

    Revenons au récit de ce que je vous propose d’appeler le « réveil de Lazare » car il ne s’agit pas d’une véritable résurrection comme celle de Jésus, il s’agit plutôt d’un supplément de vie terrestre. Je ferai seulement deux remarques :

    Première remarque : pour Jésus, la seule chose qui compte, c’est la gloire de Dieu. Mais pour voir la gloire de Dieu, il faut croire (« Si tu crois, tu verras la gloire de Dieu » dit-il à Marthe). Dès le début du récit, alors qu’on vient d’annoncer à Jésus « Seigneur, celui que tu aimes est malade », il dit à ses disciples : « Cette maladie ne conduit pas à la mort, elle est pour la gloire de Dieu », c’est-à-dire la révélation du mystère de Dieu. Non pas que la manifestation de la gloire de Dieu soit une récompense pour bien-pensants ou bien-croyants. Mais quand nous ne sommes pas dans une attitude de foi, tout se passe comme si nous laissions notre regard s’obscurcir par le soupçon, la méfiance, c’est comme si nous mettions des lunettes sombres, nous ne voyons plus la lumière. La foi nous ouvre les yeux, elle fait sauter ce bandeau de la méfiance que nous avions mis sur nos yeux.

    Deuxième remarque : la foi en la résurrection franchit là sa dernière étape.

    La foi en la résurrection est apparue très tardivement en Israël. Elle n’est affirmée très clairement qu’au deuxième siècle av. J.-C. à l’occasion de la terrible persécution du roi grec Antiochus Épiphane. Et à l’époque du Christ, elle n’est même pas encore admise par tout le monde.

    Marthe et Marie, visiblement, font partie des gens qui y croient. Mais, dans leur idée, il s’agit encore d’une résurrection pour le dernier jour. Quand Jésus dit à Marthe « Ton frère ressuscitera », Marthe répond : « Je sais qu’il ressuscitera au dernier jour, à la résurrection ». Jésus rectifie : il ne parle pas au futur, il parle au présent : « Moi, je suis la résurrection et la vie... Tout homme qui vit et croit en moi ne mourra jamais... Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ». À l’entendre, on a bien l’impression que la Résurrection, c’est pour tout de suite. « Je suis la résurrection et la vie » : cela veut dire que la mort au sens de séparation de Dieu n’existe plus, elle est vaincue dans la Résurrection du Christ. Avec Paul les croyants peuvent dire « Mort, où est ta victoire ? » Non, rien désormais ne nous séparera de l’amour du Christ, même pas la mort.

    Commentaire de Marie Noëlle Thabut

    (Référence 9)

    Sixième réflexion

     * La résurrection de Lazare

    La résurrection de Lazare - Giotto di Bondone - 1306

    Le récit de Lazare est-il un récit de miracle atypique ?

    Les récits de miracles ne sont pas une spécificité du Nouveau Testament ou même de la Bible. Il s’agit d’un héritage partagé avec l’Antiquité, grecque ou romaine. Les spécialistes s’accordent à leur reconnaître des traits communs, une structure narrative semblable qui est la suivante :

    • une présentation rapide de la situation, destinée à préparer ce qui va suivre ;
    • une demande, pouvant revêtir des formes différentes ;
    • une parole et/ou un geste ;
    • la guérison ;
    • les réactions de la personne ou de la foule présente.

    L’épisode de la résurrection de Lazare semble suivre ces cinq étapes traditionnelles : le récit début par l’annonce de la maladie de Lazare, qui s’avère bientôt incurable, puisque Lazare meurt (11, 1-16). Suivent alors les demandes successives des sœurs de Lazare, Marthe et Marie qui incitent indirectement Jésus à faire revivre leur frère – « Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort ! » (17- 32). Jésus se dirige alors vers le tombeau, demande à ce qu’on ôte la pierre qui le ferme et, d’une parole, appelle Lazare : « Lazare, viens dehors ! » (33-43). Le mort se lève alors, guéri. (44). Le récit s’achève par la réaction des témoins, lesquels tantôt se convertissent, tantôt dénoncent le miracle aux pharisiens qui vont décider de la mort de Jésus. (45-46).

    Cependant, aux yeux de certains spécialistes, ce récit de miracle est « apparu très vite comme un récit de miracle atypique » par son ampleur exceptionnelle dans les Évangiles et par le nombre de figures qu’il mobilise. Ces spécialistes imaginent donc qu’il y a pu avoir un premier récit, plus conforme à la structure narrative traditionnelle des récits de miracles tels qu’ils se présentent habituellement dans les Évangiles synoptiques (Mathieu, Marc et Luc). Le texte actuel aurait donc subi de nombreux ajouts, faisant intervenir les disciples, les Juifs et Marthe.

    Le récit de Lazare dans l’économie de l’Évangile de Jean.

    Cette hypothèse d’un récit modifié, augmenté n’est pas nécessaire, selon le point de vue d’Alain Marchadour et d’autres spécialistes qui opèrent une lecture narrative et littéraire du Nouveau Testament. Selon ce point de vue narratif, le récit, pour prendre tout son sens, doit être replacé dans l’économie de l’Évangile johannique tout entier. Il importe donc de « non plus se focaliser sur la production du texte et de sa genèse, mais (d’)accepter d’entrer dans une œuvre pour en percevoir la logique, la dynamique, la fonction ».

    Dès lors, l’épisode lazaréen apparaît à de nombreux commentateurs comme un moment clé du livre johannique : centre du livre, disent certains, moment charnière entre la première partie de l’Évangile (l’évangile des signes, constitué des 12 premiers chapitres) et la seconde (l’évangile de la gloire, où l’on assiste au dernier repas de Jésus avec les disciples puis à sa mort et sa résurrection).

    Moment décisif dans l’économie évangélique, le récit lazaréen marque aussi un moment clé dans l’histoire de Jésus : « à la fois dans la révélation de son être divin et humain et dans la réception de cette révélation, positive chez les uns, négative chez les autres, au point d’être cause directe de sa mise à mort ». C’est à partir de cet épisode en effet que « Grands prêtres et pharisiens résolurent de le tuer » (11, 53). Et Alain Marchadour d’ajouter : « faire comme si ce chapitre se suffisait à lui-même, et oublier qu’il prend sens par rapport à la révélation progressive de Jésus, c’est rompre avec le pacte de lecture de l’évangéliste, faire violence au sens du texte ».

    Un récit paroxystique centré sur la figure de Jésus.

    C’est qu’il existe une différence essentielle entre les récits de miracles tels que les connaissent l’Antiquité grecque et romaine et tels que les présentent les Évangiles : plus que le miracle lui-même, ce qui importe ici, c’est la rencontre avec la figure centrale de Jésus.

    Le récit lazaréen apparaît, à plus d’un titre, comme un épisode paroxystique au sein de l’Évangile de Jean, un véritable climax : « septième et dernier signe du Révélateur cherchant à se faire reconnaître », selon Alain Marchadour, après les deux signes donnés à Cana, la guérison de Béthesda, la multiplication des pains, la marche sur les eaux, la guérison de l’aveugle-né, le récit fait de Jésus l’interlocuteur successif de tous les personnages en présence, les disciples, Marthe et Marie et les Juifs qui doivent prendre position face à lui. L’enjeu est de taille : il s’agit, pour le texte, d’affirmer, à travers le regard de ces interlocuteurs, la nature divine de Jésus. Il est « Seigneur » sous la plume du narrateur (v.2) ainsi que dans le discours des deux femmes (v.3), de Marthe (v. 21), de Marie (v.32), des témoins (v. 34). Il est « Rabbi », Maître, dans la bouche des disciples (v.8), et « Christ, Fils de Dieu », dans le dialogue avec Marthe (v.27). L’exceptionnelle envergure du récit, en comparaison d’autres récits de miracle, est donc la marque volontaire d’un auteur johannique occupé à donner à sa narration une amplitude maximale.

    L’intensité dramatique du récit est une autre marque de cette puissance narrative. Cette intensité est accentuée par le fait que Jésus se trouve ici en présence de personnages avec lesquels il entretient un rapport étroit d’amitié ou d’amour : « Voyez comme il l’aimait ! », telle est la parole de quelques témoins, lorsque Jésus se trouve face au tombeau de Lazare. La puissance dramatique d’un récit n’est en effet pas la même, si le protagoniste se trouve en présence d’un aveugle anonyme à qui l’on a rendu la vue, ou bien d’un homme identifié par le lecteur comme un proche de Jésus. Cette proximité, qu’on le veuille ou non, crée un effet d’attente et porte l’intérêt vers la résolution du récit, la résurrection espérée. Cet effet d’attente se trouve renforcé, au début du récit, par le fait que Jésus tarde deux jours avant de se rendre auprès de Lazare. De plus, les disciples lui font remarquer que retourner en Judée est très risqué car on cherche à lapider le maître.

    Une christologie narrative.

    Climax encore, dès lors que Jésus, pour la première et dernière fois dans les Évangiles, se présente au lecteur comme un homme en pleurs : face à son ami Lazare mort, « Jésus verse des larmes ». Cette simple remarque est loin d’être anodine : Jésus pleurant, c’est Jésus homme, incarné. Extrêmement efficace sur le plan narratif, puisqu’elle renforce le suspense du récit, cette mention est essentielle sur le plan théologique. C’est à partir d’elle qu’Alain Marchadour peut parler, pour cet épisode lazaréen, de « christologie narrative » : c’est à partir de la narration, dans la narration que l’auteur du récit cherche à représenter Jésus comme homme intégral, homme de chair, au même titre que tous les autres, mais aussi Dieu intégral, Christ.

    Un récit qui fait de Jésus la seule figure qui domine la scène.

    L’autre versant de cette humanité, c’est en effet la divinité de Jésus que le récit cherche à mettre en évidence. Le protagoniste se présente alors à la lecture comme la seule figure qui domine la scène. Dès le verset 4, il interprète les événements à venir : « Cette maladie ne mène pas à la mort » et les anticipe : « Notre ami Lazare s’est endormi, je vais le réveiller » (v. 11). « Il sait que Lazare malade va mourir puis revenir à la vie (v.12-13) ». Évidemment, enfin, il possède le pouvoir de rendre la vie à un homme mort depuis quatre jours et qui « sent » déjà (v. 39).

    Le récit de la résurrection de Lazare n’est donc pas un récit de miracle parmi d’autres : il cherche à présenter l’humanité et la divinité de Jésus à leur sommet.

    (Référence 10)

    Synthèse de recherches mise en page par le Frère André B., G.C.P. de Belgique

    Références :

    1. https://www.universdelabible.net/lire-la-segond-21-en-ligne/jean/11.1-57/
    2. Bernadette Escaffre, « Autour des récits bibliques » p. 38-41 SBEV / Éd. du Cerf, Cahier Évangile n° 127 (mars 2004)
    3. https://www.bible-service.net/extranet/current/pages/581.html
    4. https://www.eretoile.org/Archives-Reflexions/la-resurrection-de-lazare-jean-11.html
    5. http://www.interbible.org/interBible/source/lampe/2004/lampe_040402.htm
    6. http://cahierslibres.fr/2014/04/resurrection-lazare/
    7. http://www.lachristite.eu/archives/2014/03/31/29561423.html
    8. http://crdp.ac-paris.fr/parcours/fondateurs/index.php/category/lazare?paged=3
    9. http://thierry.jallas.over-blog.com/2017/03/commentaires-de-marie-noelle-thabut-annee-liturgique-a-5e-dimanche-de-careme-2-avril-2017.htm
    10. http://crdp.ac-paris.fr/parcours/fondateurs/index.php/category/lazare?paged=

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  • L’Évangile selon Jean est le dernier des quatre Évangiles canoniques du Nouveau Testament. La tradition chrétienne l'a attribué à l'un des disciples de Jésus, l'apôtre Jean, fils de Zébédée.

     * Le lavement des pieds

    Cette hypothèse est aujourd'hui rejetée par la plupart des historiens, qui voient dans ce texte l'œuvre d'une « communauté johannique », à la fin du 1er siècle, dont la proximité avec les événements décrits fait débat.

    Ce texte se démarque des trois autres Évangiles canoniques, dits « synoptiques », par sa composition, son style poétique, sa théologie, et probablement par ses sources.

    Dans la doctrine trinitaire, l’Évangile selon Jean est le plus important en matière de christologie, car il énonce implicitement la divinité de Jésus dont il fait le « Logos » incarné.

    Alors, me direz-vous, en quoi l'Évangile de Jean est-il si différent ?

    L'Évangile de Jean compte deux grandes parties : les douze premiers chapitres rapportent que Jésus fait de nombreuses rencontres. Ce sont des rencontres symboliques : Jésus et Nicodème, ce grand intellectuel du monde juif ; Jésus et la Samaritaine, membre d'un peuple dont on se méfie, que l'on considère comme hérétique, une femme qui de plus a eu cinq maris. Le salut concerne tout autant Nicodème que la Samaritaine. Il y a aussi Lazare, l'aveugle-né, le paralysé… Jean dresse de grandes scènes, dépeint de grands mouvements.

    L’Évangile de Jean apporte un éclairage original. Il insiste sur le fait qu'en contemplant Jésus-Christ, nous avons accès à Dieu. « Qui me voit, voit le Père », dit-il à Philippe. Pour nous qui n'avons jamais vu Jésus, ce sont les signes écrits par le disciple Jean qui désormais nous le donnent à voir.  

    Il y a certes un fonds commun aux quatre Évangiles : le personnage de Jésus et les grands événements de sa vie. En revanche certains épisodes ne figurent que chez Jean : les noces de Cana, la résurrection de Lazare, même si Lazare, Marthe et Marie apparaissent dans d'autres Évangiles. L'épisode de la multiplication des pains figure dans les quatre évangiles, mais le grand discours dit « du pain de vie » que Jésus prononce ensuite ne figure que chez Jean.

    Et puis Jean relate le lavement de pieds, un épisode que l'on ne trouve pas dans les autres Évangiles.

     * Le lavement des pieds

    Le lavement des pieds

    01 Avant la fête de la Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, Jésus, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout.

    02 Au cours du repas, alors que le diable a déjà mis dans le cœur de Judas, fils de Simon l’Iscariote, l’intention de le livrer,

    03 Jésus, sachant que le Père a tout remis entre ses mains, qu’il est sorti de Dieu et qu’il s’en va vers Dieu,

    04 se lève de table, dépose son vêtement, et prend un linge qu’il se noue à la ceinture ;

    05 puis il verse de l’eau dans un bassin. Alors il se mit à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge qu’il avait à la ceinture.

    06 Il arrive donc à Simon-Pierre, qui lui dit : « C’est toi, Seigneur, qui me laves les pieds ? »

    07 Jésus lui répondit : « Ce que je veux faire, tu ne le sais pas maintenant ; plus tard tu comprendras. »

    08 Pierre lui dit : « Tu ne me laveras pas les pieds ; non, jamais ! » Jésus lui répondit : « Si je ne te lave pas, tu n’auras pas de part avec moi. »

    09 Simon-Pierre lui dit : « Alors, Seigneur, pas seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête ! »

    10 Jésus lui dit : « Quand on vient de prendre un bain, on n’a pas besoin de se laver, sinon les pieds : on est pur tout entier. Vous-mêmes, vous êtes purs, mais non pas tous. »

    11 Il savait bien qui allait le livrer ; et c’est pourquoi il disait : « Vous n’êtes pas tous purs. »

    12 Quand il leur eut lavé les pieds, il reprit son vêtement, se remit à table et leur dit : « Comprenez-vous ce que je viens de faire pour vous ?

    13 Vous m’appelez « Maître » et « Seigneur », et vous avez raison, car vraiment je le suis.

    14 Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres.

    15 C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous.

    16 Amen, amen, je vous le dis : un serviteur n’est pas plus grand que son maître, ni un envoyé plus grand que celui qui l’envoie.

    17 Sachant cela, heureux êtes-vous, si vous le faites.

    Essai d'interprétation

    Nous avons affaire à une illustration puissante, à une véritable parabole actée qui se veut mémorable tant pour les premiers disciples que pour les lecteurs de Jean : au cours de leur dernier repas, Jésus lave les pieds de ses disciples ! Cette tâche ingrate était de coutume réservée aux esclaves.

    Dans les trois premiers versets, le cadre narratif est posé. Il va donner du sens à l’événement.

    Le lavement des pieds se produit pendant le repas (verset 2) qui a lieu juste avant la Pâque juive, au cours de laquelle Jésus, l’Agneau de Dieu (Jean 1.29, 36), sera exécuté.

    « L’heure venue » est celle de l’élévation de Jésus à la croix. C’est sur l’arrière-fond de ce contexte très riche que l’action de Jésus doit être interprétée.

    Ainsi, dans le prologue de cet épisode (versets 1 à 3), Jean donne à ses lecteurs une clé interprétative des événements qu’il s’apprête à narrer.

    Le geste posé par Jésus est ensuite sobrement décrit dans les versets 4 et 5.

     * Le lavement des pieds

    Mais que signifie ce geste simple qui, à travers les siècles, a inspiré tant de croyants et tant d’artistes ?

    Les chrétiens retiennent habituellement une seule signification : Jésus enseigne à ses disciples à « se laver les pieds » les uns aux autres, c’est-à-dire à se servir mutuellement, même – et en particulier – lorsque cela implique de s’abaisser pour honorer l’autre.

    Pourtant un tel enseignement, bien que clairement présent dans le texte n’épuise pas la valeur symbolique de l’action de Jésus.

    En fait, une lecture attentive de l’épisode induit qu’il faut parler de trois significations du lavement des pieds. Fait inusité : c’est grâce à une série de malentendus impliquant Pierre qu’émergent du texte les deux premières significations.

     * Le lavement des pieds

    1. Le lavement des pieds, c’est la purification décisive et complète du disciple à la croix (versets 6 à 8).

    Au moment où Jésus se présente devant Simon Pierre pour lui laver les pieds, ce dernier, stupéfait, résiste vigoureusement.

    Pierre n’accepte pas que Jésus, son Seigneur, s’abaisse à ce point en le servant comme le ferait un esclave. Réfléchissant à la manière du monde, il refuse que l’inférieur soit si humblement servi par le supérieur. Il n’accepte pas l’inversion des rôles à laquelle le Christ semble se prêter. Celui que Pierre confesse comme Seigneur ne saurait effectuer une tâche ordinairement dévolue à des gens de condition inférieure. Son autorité s’en trouverait démentie, sa mission obscurcie. L’image que Pierre se fait du Christ ne tolère aucune idée d’abaissement ou de service. Ce faisant, Pierre en reste à une notion mondaine de l’autorité.

    La réponse surprenante de Jésus cadre bien avec le calendrier johannique habituel :

    Au 7ème verset, Jésus lui répond « Ce que je fais, tu ne le comprends pas pour l’instant, tu le comprendras plus tard ».

    Dans l’Évangile de Jean, plusieurs gestes ou affirmations de Jésus restent incompris sur le coup. Les disciples ne seront en mesure de les interpréter avec exactitude qu’après la Crucifixion et la Résurrection du Seigneur.

    Au 7ème verset, Jésus annonce donc que le lavement des pieds prendra tout son sens ultérieurement, c’est-à-dire lorsqu’il sera relu à la lumière de la Passion et de la Résurrection.

    En d’autres termes, ce n’est que dans la rétrospective pascale que va s’ouvrir le sens de l’agir du Christ. Pierre est donc invité à saisir le lavement des pieds sur le fond de la croix, comprise elle-même comme l’élévation du Fils.

    De fait, sans la croix et la purification qu’elle opère pour ses bénéficiaires, aucune communion avec Jésus n’est possible. Le salut éternel passe impérativement par la croix.

    Le disciple est appelé à recevoir comme un don le service que le Christ lui rend. Le don que les disciples ont à accepter et qui fonde leur relation salutaire avec leur Seigneur est sa mort.

    Ainsi, le lavement des pieds signifie que seule la purification opérée à la croix rend possible la relation avec Jésus.

    Mais l’enseignement de Jésus ne s’arrête pas là.

     * Le lavement des pieds

    2. Le lavement des pieds, c’est aussi la purification régulière de la conscience au cours de la marche (imparfaite) du disciple (versets 9 à 11).

    La réplique de Pierre est comprise par les uns comme exprimant la volonté de jouir d’une purification rituelle complète, et par les autres comme une simple réaction exubérante de la part de Pierre. Peu importe, c’est la suite qui s’avère déterminante pour notre compréhension de cette partie du dialogue.

    Que veut dire Jésus quand il dit « Celui qui s’est baigné est entièrement pur, il lui suffit de se laver les pieds. Or vous, vous êtes purs – mais pas tous. » ?

    Au niveau du sens premier, l’affirmation est limpide : celui qui, après avoir pris un bain complet, se salit les pieds en marchant (en sandales), n’a pas besoin de prendre de nouveau un bain (surtout à une époque où cela est plus compliqué qu’aujourd’hui !). Il lui suffit de se laver les pieds – le reste de son corps est toujours propre.

    Mais quel enseignement spirituel en tirer ?

    Sans doute celui-ci. Jésus semble insister sur la suffisance de la purification qu’il s’apprête à accomplir pour ses disciples à la croix. Il affirme que la purification initiale et fondamentale réalisée par son œuvre expiatrice se produit une fois pour toutes dans la vie du disciple. Elle n’a pas à être répétée une deuxième ou une troisième fois !

    Nous pouvons donc comprendre que les individus qui ont été purifiés par l’œuvre expiatoire du Christ auront certainement besoin d’être lavés de leurs péchés ultérieurs, mais la purification fondamentale ne peut jamais être répétée.

    Si une telle lecture est fondée, force est de constater que le sens du lavement des pieds évolue dans le texte. Alors que dans les versets 6 à 8, le geste de Jésus symbolise la purification accomplie à la croix, au verset 10 c’est le bain complet qui correspond à la croix (« celui qui s’est baigné est entièrement pur »); le fait de se laver les pieds (« il lui suffit de se laver les pieds ») fait alors plutôt référence à une « purification » de moindre envergure, qui sera nécessairement répétée dans le temps.

    Si le lavement des pieds évoque la croix, le fait de se laver les pieds renvoie aussi aux bonnes habitudes de l’hygiène spirituelle du disciple. Jésus enseigne donc que, après le bain complet accompli à la croix une fois pour toutes, seul un lavement des pieds régulier est nécessaire.

    Qu’a-t-il précisément à l’esprit? Probablement la confession régulière des péchés à laquelle est convié tout disciple, par l’intermédiaire de l’épître de Jean.

    De cette deuxième leçon nous pouvons déduire que le lavement des pieds signifie que la confession régulière des péchés fait partie intégrante de la vie du disciple, sans toutefois remplacer la purification accomplie une fois pour toutes par le bain de la croix.

     * Le lavement des pieds

    Enfin, terminons par la leçon la plus évidente des trois.

    3. Le lavement des pieds, c’est l’humble service mutuel parmi les disciples (versets 12 à 17).

    Après avoir lavé les pieds des disciples, Jésus leur pose la question : « Avez-vous compris ce que je viens de vous faire ? »

    Dans la suite, il insistera non plus sur la purification attachée à la croix – que lui seul est en mesure d’accomplir –, mais plutôt sur la valeur exemplaire du geste qu’il vient de poser.

    Si le lavement des pieds et la croix résultent de l’amour impressionnant de Jésus, alors la communauté des purifiés qu’il est en train de créer doit être caractérisée par le même amour (v. 34-35) et donc par la même abnégation dans le service des autres.

    En d’autres termes, le lavement des pieds signifie que les disciples sont invités à se servir les uns les autres, imitant Jésus qui s’est mis à leur service.

    Voilà, à mon sens, ce qu’il faut tirer de l’agir et des déclarations de Jésus dans ces 17 versets du chapitre 13 de l’Évangile de Jean.

    D’après l’analyse de Dominique Angers, Docteur en théologie de l’Université de Strasbourg,

    professeur de Nouveau Testament et de théologie pratique à la Faculté de Théologie Évangélique à Montréal (Université Acadia)

    Le lavement des pieds est-il un service ?

    Oui, mais au sens biblique de ce terme. Servir ne signifie pas que l'on s'engage à faire les quatre volontés des autres, à tout moment et quelles qu'elles soient. De fait, aucun des disciples n'a demandé à Jésus de lui laver les pieds, Pierre s'avère même réticent. C'est que Jésus ne sert pas les créatures, mais le Créateur dont le projet bienveillant est éminemment serviable « pour nous les hommes et pour notre salut ». Et ce projet est que le Christ se fasse l'un de nous pour nous faire participer à la divinité. Dans le geste simple et profond du lavement des pieds, cette vérité est manifestée. Dieu est à nos pieds pour que nous soyons avec lui, en lui, comme lui. Le Peuple de Dieu témoigne de cette mutation de l'humain en Dieu.

    D’après Philippe Lefebvre

     * Le lavement des pieds

    Le lavement des pieds est un geste symbolique, un geste prophétique, à la fin duquel Jésus demande aux apôtres : « Comprenez-vous ce que je vous ai fait ? ». Commence alors un des derniers grands discours, où il leur dit : « Lavez-vous les pieds les uns des autres », c'est-à-dire : « Aimez-vous les uns les autres ». Aimez-vous par les gestes du service.

    Synthèse de recherches effectuée et mise en page par le Frère André B., G.C.P.

    Références :

    https://dominiqueangers.toutpoursagloire.com/significations-lavement-des-pieds-jesus-jean-13/

    http://www.lacourdieu.com/96-mot-a-mot/evangiles-de-jean/218-jean-13-le-lavement-des-pieds.html


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  • Commentaires de l'Évangile de saint Jean

     * Commentaires à propos de l'Evangile de Jean

    Saint Jean fut l'un des douze apôtres du Christ et l'un des quatre évangélistes. Différentes scènes du Nouveau Testament témoignent de la présence de Jean auprès du Christ. Jean l'Évangéliste apparaît en effet dans plusieurs épisodes du Nouveau Testament : il assiste à la pêche miraculeuse, à la Transfiguration au Mont Thabor. Jean est auprès de Jésus au Mont des Oliviers et lors de la Dernière Cène. Au pied de la Croix, il soutient Marie que le Christ lui a confiée.

    Puis, il quitte la Palestine : la Tradition raconte qu'après la mort de Jésus et la dispersion des apôtres, Jean se serait rendu en Asie et se serait fixé à Ephèse, où Marie l’aurait rejoint. Il y aurait été arrêté alors qu'il était déjà très âgé et aurait été jeté dans l'huile bouillante dont il serait sorti indemne. Exilé sur l'île de Patmos (île des Sporades), il y rédigea l'Apocalypse qui porte son nom. Amnistié, il put retourner à Ephèse et y rédigea son Évangile.

     * Commentaires à propos de l'Evangile de Jean

    L’Évangile de Jean, dans son ensemble, se distingue des autres Évangiles par le sens symbolique qu’il offre à l’initié capable de le décrypter. Ce texte, et tout particulièrement son Prologue, a une valeur initiatique d’une portée universelle. Il veut démontrer la possibilité pour tout homme de sortir de la confusion et de trouver la Lumière.

     * Commentaires à propos de l'Evangile de Jean

    Même si ce texte a probablement été écrit, à l’origine, par Jean, l’un des disciples de ce grand initié universellement reconnu en la personne de IESCHOUA (c’est-à-dire Jésus, en hébreu, ce qui signifie « Yahveh nous sauve »), il a certainement été réécrit, traduit, remanié, corrigé, repensé, par des symbolistes de l’époque, pour lui donner un sens ésotérique que n’ont pas les autres Évangiles. Et ce n’est pas un hasard s’ils ont donné le nom de Jean à son auteur présumé.

    Quant à JÉSUS, il a enseigné que les souffrances de l’homme ont pour cause son égoïsme, ses passions, son matérialisme. Il a indiqué le moyen d’en sortir par l’amour de l’autre et l’intelligence du cœur. Son exemple est devenu pour l’humanité une source d’espoir. C’est l’essentiel de ce que veut transmettre Jean.

    Parmi les textes sacrés fondamentaux, l’Évangile de Jean est celui qui, proche de nous, correspond le mieux à notre démarche. Lu au premier degré, il peut paraître primaire, désuet, ou incohérent. C’est pourquoi il convient d’en chercher le sens caché, et d’en dégager la pensée intuitive. Le symbole ne veut pas aboutir à une preuve logique et le langage symbolique est adapté à l’expression des vérités de la vie intérieure.

    En fait, l’intention de l’Évangéliste est de conduire le lecteur à la recherche du sens profond qui se tient derrière le récit. Il veut rendre évidente la vérité proposée, non l’expliquer.

    Synthèse de recherches effectuées par le Frère André B. , G.C.P.


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