• La foi et le doute

    Mes très chers Frères et Sœurs, voici pourquoi j’ai choisi de vous présenter ce parchemin.

    C’est à la suite de la lecture du livre « Dieu », qui met en présence un dialogue entre Marie Drucker, journaliste à la chaîne France Télévisions, et Frédéric Lenoir, philosophe, sociologue, historien des religions, docteur et chercheur associé de l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales (EHESS), que je me suis intéressé à ce thème.

    J’ai été surtout surpris par une phrase dictée par Frédéric Lenoir et qui disait que « la foi permettait le doute mais que le doute ne supprimait pas la foi ». (1)

    En doutant, on parcourt donc un chemin spirituel.

    Je me suis alors dit que je devais réfléchir à cela et j’en ai parlé à notre Frère André B. qui m’a précisé de suite qu’il serait intéressant de faire une petite présentation de ce travail de recherche lors d’un prochain chapitre.

    J’ai longtemps réfléchi à la manière dont j’allais m’y prendre et je me suis dit qu’il était nécessaire d’aller à la découverte des définitions de la foi. Je me suis donc documenté avec le dictionnaire, avec Google, avec certains sites exprimant la problématique de la foi et, bien sûr, avec le livre « Dieu » de Frédéric Lenoir.

    Que dit le dictionnaire Larousse à propos du mot « foi » ?

    D’abord le mot « foi » vient du latin « fides », c’est-à-dire  engagement, lien, et se rattache à une racine indo-européenne bheidh, « avoir confiance ».

    En religion, c’est le fait de croire en Dieu, en des vérités religieuses révélées.

    On emploi aussi différentes expressions comme : « sans foi ni loi », c’est-à-dire sans religion ni respect de la loi humaine.

    La foi, c’est le dogme lui-même, la religion.

    • Avoir foi : c’est avoir confiance en quelqu’un ou en quelque chose.
    • On dit d’un témoin qu’il est digne de foi : c’est un témoin fiable.
    • Agir de bonne foi, c’est agir avec la conviction d’être honnête.
    • Un individu de mauvaise foi : c’est quelqu’un de malhonnête qui affirme des choses qu’il sait fausses ou qui feint l’ignorance.
    • Faire foi, c’est établir de façon indiscutable. Ainsi, le cachet de la poste fait foi. Il prouve la date de l’expédition de l’envoi postal.

    On utilise aussi l’expression « ma foi » pour appuyer une affirmation ou une négation.

    Enfin, ne dit-on pas aussi que la foi transporte les montagnes ?

    Mais poursuivons et essayons de découvrir les éléments principaux de la foi d’une part chrétienne et donc catholique, orthodoxe, et d’une partie des protestants ainsi que des chrétiens évangéliques, et d’autre part, de la foi musulmane.

    Je ne vais cependant pas entrer dans les détails de ce qu’est la foi pour chacune de ces religions mais plutôt essayer de découvrir certains aspects et de mettre certains points communs en évidence.

    Je vais de suite vous donner une définition de la foi musulmane mais sans l’approfondir et sans la comparer tout au long de ce texte à la foi chrétienne.

    Elle est d’une autre nature car cette foi ne permet aucunement le doute.

    Quant à la foi juive, elle s'appuie sur quelques principes de foi qui furent formulés par les autorités rabbiniques médiévales. Ces principes furent établis comme soutènements fondamentaux inhérents à l'acceptation et à la pratique du judaïsme. Mais je ne m’étendrai pas sur ce sujet.

    Je voudrais simplement souligner quelques aspects fondamentaux comme : Dieu est le créateur de l’univers ; Dieu est Un ; Dieu est tout puissant ; mais notre conception de Dieu et sa nature nous sont personnelles ; à Dieu, et lui seul, doivent s’adresser les prières, les écritures.

    A) La foi musulmane, ou plus précisément la foi du musulman

    Dans l'islam, la foi signifie littéralement : « connaissance, croyance et conviction sans aucun doute possible ». C'est la base de l'islam.

    La foi dans l’islam est soumise à six piliers qui sont obligatoires afin que la foi du musulman soit valide :

    • croire en Dieu (Allah),
    • en ses anges(Malaika),
    • en ses livres2,
    • en ses prophètes,
    • au jour du jugement dernier (Qiyama),
    • et au Destin (Qadar) favorable ou défavorable.

    Cette définition est basée à la fois sur le Coran et sur la Sunnah.

    Je vous rappelle que, dans le Coran, le terme sunna est employé pour désigner la « loi immuable » de Dieu sous l’expression sunna Allah, c’est-à-dire les « règles de Dieu ». La sunna, selon le Coran, englobe les règles ou « lois » de Dieu qui ont été prescrites à tous les prophètes, y compris le prophète de l'Islam, Mahomet.

    Il existe néanmoins dans chaque courant islamique une définition de la foi qui lui est propre : on note, par exemple, que dans le chiisme, s'ajoute aux six piliers de la foi plusieurs dogmes, comme la foi aux Imams et croire en leur infaillibilité est obligatoire et fait partie de la foi chiite en général.

    Comme point commun, on peut affirmer que dans le monde juif comme dans le monde musulman, la Bible ou le Coran sont trop souvent lus de manière littérale.

    B) La foi du chrétien

    Le chrétien est celui qui croit au Christ Jésus.

    Catholiques, protestants et orthodoxes sont des chrétiens, car ils croient en Jésus et le reconnaissent comme étant le Messie, c’est-à-dire le Sauveur.
    Un catholique est donc un chrétien, mais un chrétien n'est pas forcément catholique ; il peut être protestant ou orthodoxe. De plus, si les catholiques reconnaissent l’autorité du Pape, ce n’est pas le cas des protestants et des orthodoxes.

    Si nous nous intéressons à certains points du protestantisme,  nous voyons qu’ils ont 5 points importants qu’ils nomment les 5 solas de la Réforme :

    • Dieu est le seul qu'il faut adorer et prier.
    • Le salut n'est pas le résultat de nos efforts ou de nos mérites mais s'obtient par la grâce seule.
    • La Bible est l'autorité suprême en matière de doctrine.
    • Le salut n'est pas donné par les sacrements ou la religion mais par la foi seule.
    • Jésus-Christ est le seul médiateur entre Dieu et nous.

    Et si nous allons voir du côté orthodoxe : leurs certitudes sont les suivantes :

    • Dieu est devenu Homme pour que l'homme devienne Dieu en lui.
    • Au mystère de la Trinité s'accorde le mystère de la vocation humaine.
    • Le cœur de l'homme aspire à l'union à Dieu.
    • Le Credo de Nicée-Constantinople

    Si nous nous intéressons à la foi du chrétien, qu’elle soit  catholique, orthodoxe et d'une partie des protestants et des chrétiens évangéliques, elle est contenue de manière synthétique et dogmatique dans les différentes versions du credo (« je crois » en latin).

    Le credo qui se décline en deux versions principales : symbole de Nicée-Constantinople et symbole des apôtres est un texte de plusieurs dizaines de phrases qui exprime successivement la foi :

    • En Dieu le Père créateur de l'univers.
    • En Jésus-Christ et les principaux événements de sa vie, de sa mort et de sa résurrection. C’est la foi au Christ historique mais aussi messianique.
    • En l'Esprit saint mais là, il existe une querelle, une divergence entre catholiques et orthodoxes, c’est la querelle du Filioque

    C’est le différend théologique qui, à partir du 8ème siècle, oppose l'Église romaine et l'Église grecque, à propos du dogme de la Trinité. Cette querelle contribuera à la séparation des Églises d'Orient et d'Occident, qui fait naître deux églises : l'Église catholique romaine et l'Église orthodoxe.

    Le débat porte sur le rapport entre le Saint-Esprit, d'une part, le Père et le Fils, d'autre part. À la question « De qui procède le Saint-Esprit ? », le Symbole de Nicée-Constantinople  et donc les orthodoxes répondent « Nous croyons en l'Esprit Saint... qui procède du Père ...». Par contre, les chrétiens d’occident disent « Nous croyons en l'Esprit Saint... qui procède du Père et du Fils... (ex Patre Filioque procedit.) ».

    Si nous devons trouver un lien commun au niveau de la foi catholique, protestante et orthodoxe, c’est bien au niveau du Credo, même si celui-ci est décliné selon certaines variantes.

    Et maintenant, revenons à notre thème principal du départ et abordons la problématique de la foi et du doute.

    Et pour cela, prenons pour commencer, l’exemple de l’apôtre Thomas qui quand il voyait le Christ et l’entendait, il était certain de sa foi. Mais après la mort de Jésus, quand il n’a plus été possible de le voir et de l’entendre, il s’est mis à douter et à poser des conditions à sa foi : « Si je ne mets pas mon doigt à l’endroit des clous, si je ne mets pas  la main dans son côté, non, je ne croirai pas » (Jean, chapitre 20, verset 25).

    Thomas doute, c’est normal et cela va faire grandir sa foi car ce doute va se dissiper lorsqu’il  « reverra » Jésus qui va lui dire « parce que tu m’as vu, tu as cru. Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru» (Jean, chapitre 20, verset 29) En fait, heureux ceux qui passent d’une certitude humaine à la certitude de la foi. (2)

    « La foi est fondée sur un témoignage qui touche le cœur et non sur une explication logique » (3).

    La foi serait-elle quelque chose ou seulement un ensemble de vérités que l’on détiendrait une fois pour toute, que l’on garderait précieusement dans un coffret, un peu comme un bijou….que ce qui la constituerait serait immuable. La foi serait-elle seulement de croire à des vérités, mêmes révélées ? Mais n’y a-t’il pas là le risque que cette foi n’évolue jamais et finisse pas se scléroser ?

    Ou la foi n’est-elle pas plutôt quelque chose qui grandit, qui s’améliore, qui permet de faire son chemin spirituel pour certains et pour d’autres, de rencontrer le Christ, au travers d’un engagement, même si celui-ci est parsemé de doutes, d’interrogations, de difficultés. Cette foi là n’est jamais achevée, elle grandit  et ne cesse de se perfectionner.

    Et comme le dit Fabrice Midal, dans son livre «  la voie du Chevalier », pratique de la méditation laïque : « Ce n’est pas de certitudes que vit le chevalier, mais d’une constante ouverture du cœur et de l’esprit » et aussi il dit : «  le chevalier n’est pas toujours sûr d’avoir raison, il accepte de vivre au cœur d’une inquiétude, car le bien n’est jamais tout blanc et d’un seul tenant. Cette incertitude ne doit pas nous préserver de nous engager, elle au contraire la ressource d’une action authentique ». (4)

    Posons-nous donc naturellement la question de savoir si la foi implique nécessairement le doute.

    Chez les fanatiques et les intégristes de tous bords, il n’y a aucun doute, ils prétendent qu’ils savent que Dieu existe et donc ils veulent l’imposer.

    Mai qui peut apporter des preuves réelles de l’existence de Dieu ? Personne ! Seule la foi, même parsemée de doutes, permet de croire en Dieu.

    Comme l’écrivait Frédéric Lenoir dans son  livre « Dieu » : « Beaucoup de gens ont été stupéfaits d’apprendre plusieurs années après sa mort que mère Teresa avait douté de l’existence de Dieu pendant près de cinquante ans. Mais elle n’a jamais dit qu’elle avait perdu la foi et ne croyait plus en Dieu. Elle a juste dit qu’elle ne ressentait plus intérieurement la présence de Dieu, alors qu’elle l’avait maintes fois ressentie auparavant, et que confrontée à tant de souffrance, elle avait sans cesse douté » (5)

    Sa foi lui a permis le doute mais le doute n’a pas supprimé sa foi.

    Et à contrario, mais c’est un homme qui arrive à la fin de sa vie ; il a connu le succès, le bonheur mais aussi des déboires et de la souffrance. C’est le chanteur Michel Delpech qui dit : « Je suis profondément croyant. J’ai vécu un jour un “choc religieux” à Jérusalem, où j’ai rencontré le Christ. La seule chose que je ne remette jamais en doute, c’est l’existence de Dieu. (6)

    Et c’est là que l’on peut entrevoir une certaine différence entre le chrétien croyant et l’athée : le chrétien croyant ayant en quelque sorte une relation intime avec Dieu, sans nécessairement avoir des preuves de son existence et l’athée qui ne croit pas en l’existence de Dieu et de toute divinité, ou l’agnostique qui pense que Dieu est inconnaissable et prétend ne pas connaître les secrets de l’univers.

    Pour conclure

    La foi est un long chemin spirituel  à parcourir, une pierre, sans cesse, à polir, c’est aussi un engagement, sans cesse à réaliser. Et le doute constructif vient renforcer cette foi parfois hésitante, faible, interrogative mais qui fait qu’être heureux est celui ou celle qui, malgré les doutes, les absences de certitudes, les zones d’ombres, les inquiétudes, a confiance et n’abandonne pas cette dynamique, cet engagement, de croire et vouloir toujours mieux croire,  mais aussi agir, pour se rapprocher le plus possible des desseins du Créateur.

    Frère Philippe H.

    (1) Dieu. Frédéric Lenoir. Entretien avec Marie Drucker, page 212

    (2) Tiré du « Journal du Dimanche » pour le deuxième dimanche de Pâques 2016

    (3) « Dieu ». Frédéric Lenoir, entretien avec Marie Drucker, page 178. Edition Robert Laffont

    (4) La voie du Chevalier. Pratique de la méditation laïque, page 79. Edition « petite bibliothèque «Payot »

    (5) « Dieu ». Frédéric Lenoir, entretien avec Marie Drucker, page 209-2010. Edition Robert Laffont

    (6)  Emouvant témoignage de fin de vie d’un chanteur aimé dont les médias ont "pudiquement" caché     la foi....

    Sitographie

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Foi_musulmane

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Foi_chr%C3%A9tienne   

    http://www.orthodoxa.org/FR/orthodoxie/foiorthodoxe/foiortho.htm

    http://www.info-bible.org/histoire/catholique/protestants-catholiques.htm

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Principes_de_foi_du_juda%C3%AFsme#Noms_de_Dieu

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Foi_chr%C3%A9tienne

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Sunna


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